Lili Y. 06/05/2020

Mon prof d’éducation sexuelle, c’est Google

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En cours, Lili a été choquée par les remarques d'une prof. Elle, elle préfère apprendre sur internet, là où personne ne la juge.

C’était l’année dernière en quatrième. Le surveillant est venu dans notre salle de cours et a dit : « Demain, cours d’éducation sexuelle, sortez vos carnets et notez dedans ! » Je me suis dit : « Il y aura de la gêne, ça va pas apporter grand chose. » J’avais déjà lu pas mal d’articles sur le plaisir sexuel sur internet. Et je m’étais fait un avis à partir de tout ce que j’avais lu. 

Au début, la prof a parlé des maladies qui pouvaient découler du sexe, puis du harcèlement, et c’est là où ça a dérapé. Elle a beaucoup donné son avis : « Faut faire attention à votre cercle d’amis : si vous avez un ami du sexe opposé, ça arrive qu’il tente une approche. » Elle nous a donné un exemple : imaginez Jeanne qui sort avec Benjamin. Elle a un ami, Timothée, et à la fin elle est pas loin de se faire violer par Timothée. Puis, elle a dit que l’amitié était la meilleure base pour former un couple… ce qui était assez contradictoire.

Ensuite, elle a parlé des règles, que ce n’était pas honteux. Elle nous a expliqué les cycles menstruels et les moments où on peut tomber enceinte. C’était plutôt intéressant. Mais comme si elle ne pouvait pas s’en empêcher, elle a recommencé à donner son avis, sur le plaisir féminin cette fois. D’abord, elle nous a dit que les femmes ne prenaient que rarement du plaisir lors de rapports sexuels, que c’était normal, et que les choses comme la masturbation, la pornographie et l’orgasme, c’était des « conneries ». Pour elle, la masturbation et la pornographie, c’était mal.

Sur Google, personne ne me juge

Le fait qu’elle soit si négative m’a choquée, car je m’étais créée une opinion totalement différente avec internet, à partir de ce que j’avais lu : des articles qui m’ont redonné confiance en moi, qui m’ont appris qu’il n’y a aucune honte à se masturber et qu’il n’existe pas de corps plus beau qu’un autre. J’ai commencé à me documenter dessus à 12 ou 13 ans et ça m’a beaucoup aidée à me construire.

Alors, quand elle a parlé de sexe de cette manière, comme si tout ce qu’elle disait était une vérité générale, ça m’a énervée. Je ne comprends pas comment elle a pu nous contraindre à sa manière de voir les choses. Alors que tout le monde n’est pas forcément renseigné sur le sujet et pourrait croire tout ce qu’elle dit, sans en douter.

Avec internet, on peut se documenter sur des sujets dont on ne parle pas avec la famille, ou les amis. J’ai du mal à aborder ce sujet avec ma famille parce que la différence d’âge fait que j’ai plus de mal à me fier à eux. Ils s’inquiètent tellement pour moi qu’on ne parle que des dangers du sexe. Avec mes amis, c’est aussi difficile car soit ils jugent, soit ils se braquent ou sont juste trop innocents.

Au moins, avec Google, personne ne me juge : le site se contente juste de donner les réponses à mes questions. Ça me permet d’avoir des conseils de la part de personnes que je ne connais pas et qui ne parleront pas dans mon dos. Même s’il est important de faire le tri car tout n’est pas forcément bon à prendre.

Internet m’a permis de me débarrasser de certains tabous

On n’est pas toujours assez mature pour comprendre certaines choses auxquelles on est confronté. Il y a environ deux ans, je suis tombée par hasard sur un site hard qui m’a fait peur. Je ne comprenais pas comment les acteurs pouvaient avoir l’air si vides, comme s’ils n’étaient pas humains et ça a été brusque pour moi. J’en étais presque dégoûtée. Il faut être prudent quand même.

Diane, elle, a l’habitude de parler de sexe sans complexe avec ses parents. « Un privilège », dit-elle, qui l’aide à aborder ses relations amoureuses au quotidien.

Pour moi, internet a été bénéfique pour forger mon propre esprit critique et m’a permis de me débarrasser de certains tabous dont j’avais honte de parler. C’est dommage que l’école ne soit pas plus ouverte et reste dans l’optique d’une éducation sexuelle se limitant aux IST et aux règles. On ne nous parle pas concrètement de l’acte sexuel et du plaisir. J’aurais aimé que les profs nous parlent plus des côtés positifs du sexe que des côtés négatifs. Parce que ça ne donne franchement pas envie.

Lili, 14 ans, collégienne, Rambouillet

Crédit photo Giphy // © Metro

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1 réaction

  1. Merci de ce témoignage. C’est dommage que la prof n’est pas rester neutre surtout pour un sujet si important.

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