J’ai divorcé… à 18 ans et avec un enfant !
Etudiante, adolescente, je suis devenue maman à 17 ans. Malgré mon jeune âge, j’étais responsable et prête à assumer ce rôle. J’ai été obligée de me marier au père de ma fille, aujourd’hui mon ex-mari. On était rarement d’accord à cause de nos différences culturelles. Je suis née et j’ai grandi en Italie. J’ai la culture italienne, j’ai toujours été libre même si mes parents, parfois, me mettaient des limites. Lui, il est né et a grandi en Côte d’Ivoire. Les hommes africains sont un peu compliqués : y en a comme mon père qui donnent beaucoup de liberté à la femme sans problème et d’autres où dans leur propre foyer, c’est la dictature.
Une fois qu’on a eu notre fille, j’ai compris que notre histoire n’allait pas durer. Il voulait le respect absolu, même de la part de son bébé qui ne savait pas ce qu’il faisait. Et j’avais peur de l’éducation qu’elle allait recevoir car, selon lui, je n’avais pas le droit de le conseiller dans l’éducation de sa fille. J’ai décidé de prendre les choses en main et de le quitter pour donner une vie meilleure à ma fille, et à moi.
Je ne l’ai jamais aimé, seule solution : le divorce
La bonne décision ? Chez nous, en Afrique, une fois que la femme divorce, elle couvre ses parents de honte et même si mes parents m’ont imposé ce mariage, je suis très proche d’eux. Je ne voulais pas leur faire ça. Le père de ma fille me promettait un changement radical. Il me disait de retourner à la maison, que sans moi c’était vide, que je ne pouvais pas faire ça à notre fille et que si je l’aimais vraiment, j’allais revenir. Exactement… Si je l’aimais ! Je ne l’ai jamais aimé. Même le regarder dans les yeux me dégoûtait. Chaque fois qu’il me touchait, j’avais envie de vomir, mais par amour pour mes parents, je laissais faire.
Ma seule confidente, ma mère, savait que je le détestais, mais chaque fois que je craquais, elle me rappelait que la plupart des femmes (africaines) étaient passées par là et que j’allais apprendre à l’aimer. Je lui disais que je ne l’aimerais jamais. Je priais Dieu de me donner la mort, car je ne pouvais pas faire semblant d’aimer une personne toute ma vie, je ne pouvais pas accepter que mes parents soient indifférents à ma souffrance. Je me sentais seule au monde, la seule chose qui me donnait le sourire était ma fille. Un être innocent, le sang de mon sang. J’éprouvais pour elle un amour immense.
Je me suis promis que son bonheur viendrait toujours avant le mien. Mais cette fois-ci, je me suis choisie, moi. Je méritais de vivre ma vie comme je voulais. Cet homme ne me méritait pas et je n’allais pas gâcher ma vie pour quelqu’un qui n’en valait pas la peine. J’ai divorcé. Même si mes parents étaient déçus, j’ai pu retourner chez eux. Le jour où j’ai fait mes bagages et que je l’ai officiellement quitté, c’était un des plus beaux jours de ma vie. Je voulais crier, pleurer et danser de joie, mais je me suis contenue devant mes parents. Enfin libre. J’étais une fille de 18 ans avec une fille et qui sortait d’un divorce. Wow le scandale chez les gens, une honte chez mes parents.
Comment il peut m’imposer ça ?!
Entre-temps, j’ai continué mes études et le week-end, ma fille passait du temps avec son père. J’ai finalement rencontré un homme avec lequel je m’entendais bien. Il vivait à Paris et j’ai pris la décision de le suivre. Je vivais un des meilleurs moments de ma vie, avec l’homme de ma vie et ma fille… Jusqu’au jour où j’ai reçu un appel de ma mère. Le choc total : mon ex-mari voulait que je lui ramène notre fille en Italie pour qu’il puisse la ramener en Côte d’Ivoire pour que sa grand-mère la fasse grandir. Jamais !
Qui peut prendre soin d’elle mieux que moi ? Comment il peut m’imposer ça ? Comment il peut seulement penser me séparer de ma fille ? C’était trop pour moi, j’ai craqué, j’étais paniquée. Les journées passaient et je n’arrêtais pas de pleurer, jusqu’au moment où je me suis dit : « Cherche des moyens pour empêcher ça. » J’ai été orientée vers des avocats gratuits qui m’ont rassurée : comme depuis notre séparation, j’avais la garde de notre fille, je pouvais demander la fixation de sa résidence avec moi. Et le père aurait toujours un droit de visite. J’ai amené les papiers qu’il fallait pour compléter la demande et pouvoir la déposer au tribunal.
Maman à 18 ans, Alyson aussi a assumé ! Être maman lui a donné la force de reprendre sa vie en main. Malgré la précarité de sa situation.
Aujourd’hui, j’attends la convocation en espérant que le verdict sera le bon. En attendant, il peut emmener sa fille où il veut et je pourrais perdre sa trace. Je vis au jour le jour en profitant d’elle le plus possible et en cherchant un travail car son père ne nous aide plus financièrement depuis quelques mois. J’espère vraiment reprendre mes études en septembre et lui donner un futur meilleur pour qu’elle ne manque de rien.
J’espère que quand elle grandira, elle comprendra mes choix et sacrifices. Et je lui apprendrai à ne jamais renoncer à ses rêves. J’ai que 20 ans, je ne peux pas changer mon passé, mais je peux changer mon présent. Y a jamais d’échecs dans la vie, on apprend ! Mon expérience a appris à mes parents l’erreur qu’ils ont faite, je suis très contente que ça ait servi de leçon et que mes petites sœurs n’aient pas à vivre ce que j’ai vécu.
Khadidja, 20 ans, en recherche d’emploi, Paris
Crédit photo Unsplash // CC Zach Vessels