Je me suis battue contre la fermeture de mon collège
Un collège qui ferme, c’est un monde qui s’écroule. Et c’est ce qui aurait pu arriver au mien. En 2018, le Conseil Départemental a annoncé la fermeture prochaine de trois collèges dans la Somme dont celui où j’étudie, pourtant classé en REP+. Les raisons invoquées ? Une « nécessité de restructuration » et un besoin de faire des économies. Je comprends que c’est juste pour l’argent, quel égoïsme !
Pour moi, la fermeture du collège rimait surtout avec fin de l’adolescence et de l’innocence. C’était aussi perdre ce que je considère être ma deuxième maison. Car mon collège, c’est l’endroit où je passe le plus de temps. C’est là où j’ai eu mes plus grands fous rires, c’est là que sont tous mes potes, c’est là que j’ai rencontré ma meilleure amie. Je craignais qu’on soit tous séparés et envoyés dans différents établissements scolaires. Le collège le plus proche c’est Jean-Marc Laurent, à deux kilomètres.
Les gens disent qu’à Guy Mareschal on est des « cassos »
Pour moi, le collège c’est aussi un lieu de découvertes : le carnet de liaison, la permanence, les exclusions de cours, les nouvelles matières comme l’espagnol ou la physique-chimie, et puis le téléphone portable, les réseaux sociaux, la mixité, la mode.
En septembre 2019, 359 écoles rurales ont mis la clef sous la porte. Libération a interrogé des élus locaux pour comprendre les motivations qui les ont poussés à donner leur accord.
Fermeture des écoles rurales : pris au piège, contraint ou désabusé, des maires expliquent leur décision https://t.co/ECiYxGiWVV pic.twitter.com/n8uv0sIXqS
— Libération (@libe) July 4, 2019
Le collège, c’est un endroit rempli de souvenirs. Pour nous mais aussi pour nos aînés. Ouvert depuis les années 1980, mon collège, Guy Mareschal à Amiens, en aura vu passer des générations d’élèves parmi les habitants du quartier. Dans ma famille, ce sont mes grandes sœurs qui m’y ont précédée. Alors à l’annonce de sa fermeture, tout le monde s’est inquiété.
Avec les profs, on s’est mobilisé, on a lutté, on a manifesté. Élèves, profs, parents, tous ensemble, on a scandé des slogans en marchant dans les rues de la ville. On s’est donnés à fond, ça se voyait que tout le monde tenait à ce collège, ça faisait chaud au cœur. J’étais aux côtés de ma mère. Je me souviens qu’il y avait aussi plein de journalistes avec leurs caméras, leurs micros et leurs carnets.
C’étaient mes toutes premières manifs, la première fois que je me battais pour quelque chose qui comptait vraiment à mes yeux. J’étais déterminée. À l’extérieur, les gens disent qu’à Guy Mareschal on est des « cassos ». Ils pensent que parce qu’on vient d’un quartier, on est forcément mal éduqués. Alors que c’est faux et on voulait leur prouver le contraire.
Une première victoire !
Et notre mobilisation a payé ! Le président du Conseil Départemental a fini par annoncer le report de la fermeture des trois collèges. C’est une première victoire mais s’il le faut, on manifestera à nouveau.
Llona s’est engagée politiquement pour la première fois à l’université. Une expérience militante chargée en apprentissages, mais aussi en déceptions : « Nanterre pas tes rêves ! » : ma fac, mon entrée dans la vie politique »
Je suis fière d’avoir participé à ce que le collège ne ferme pas. Car quand on change de collège, on ne connaît pas le nouvel établissement, ni les profs, ni les autres élèves. On perd toutes ses références et ses habitudes, on a tout à reconstruire. Dans le quartier, voir un établissement scolaire où étudient plus de 380 élèves mettre la clé sous la porte aurait été une véritable catastrophe.
Aziza, 14 ans, collégienne, Amiens
Crédit photo © Collèges à défendre – Somme