Sexualité : à 20 ans, enfin prête
Je ne me positionne pas en ovni. Un tas de nanas prennent le temps qu’il leur faut ou se foutent complètement des relations amoureuses, et du sexe même. Moi, j’étais encore vierge à 20 ans. Et j’ai franchi le pas à 20 ans, pour les deux. Parce que oui, j’avais peur de ce délire de se mettre en couple. J’avais peur de m’ouvrir à quelqu’un, de me donner, de faire confiance. Peur de tomber sur la mauvaise personne et qu’on me fasse du mal, peur de me faire jeter après m’être fait baiser. Parce que j’entendais des histoires comme ça autour de moi, de mes potes, des ragots qui se racontaient, et je voulais vraiment pas que ça m’arrive.
En seconde, une fille de mon lycée a tellement pris cher. Elle et son mec, c’était un peu un couple star, genre tout le monde les connaissait. Un jour, ils l’ont fait pour la première fois et le lendemain le mec l’a quittée. Il l’a raconté à tous ses potes en donnant des détails intimes et gênants pour elle. Bien sûr, ça a tourné dans tout le bahut. Est-ce que cette histoire était vraie ? Je ne sais pas mais c’est ce qu’on a tous retenu d’elle.
A 16 ans, ma pote me racontait des trucs que je pouvais même pas imaginer
Et les expériences de mes potes m’attiraient pas du tout. J’avais une copine qui faisait des tas de trucs avec différents mecs, elle était comme une abeille qui allait de mec en mec, sans engagement. Elle me racontait en détail ses relations, ses ébats sexuels. Je trouvais ça ouf, on avait seize ans et elle me racontait des trucs que je pouvais même pas imaginer moi ! J’écoutais ce qu’elle me racontait, on rigolait beaucoup mais ça m’attirait pas. Je trouvais que c’était trop hardcore et ça me mettait pas en confiance. Je me disais que si les mecs attendaient ça des meufs, c’était mort pour moi.
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J’avais aussi un pote qui était malheureux dans sa relation mais qui restait, ce que je comprenais pas, ou encore des potes ensemble depuis plusieurs années déjà, en mode darons, flemme. Je trouvais leur couple pas assez fun, trop calme, la routine qui tue quoi.
Du coup, j’ai eu des flirts, des bisous, mais j’ai toujours été bloquée d’aller plus loin ; même si je voulais être amoureuse et que quelqu’un soit amoureux de moi, sincèrement.
Je ne collais pas à ce modèle de femme
Le fait que je ne m’identifiais pas aux relations qui m’entouraient me faisait poser des questions sur moi, du genre : est-ce que c’est moi le problème ? C’est vrai, ça baisait à droite à gauche et moi rien. J’étais le bébé innocent, la petite, celle qui se sentait en décalage quand ça parlait de ça.
Non, le problème c’était pas moi. Mais les pressions sociales et ce que je voyais et entendais de mes potes ont beaucoup joué sur moi et mon comportement. Malgré toutes mes remises en question j’ai pas voulu céder, coller à l’image de la femme véhiculée partout autour de nous. J’avais des copines à fond dans ce genre de trucs, à vouloir plaire aux mecs, se faire belles. Y en a une qui, à chaque fois que je dormais chez elle ou elle chez moi, mettait des vidéos de youtubeuses beauté avant de dormir. Elle était captivée. Moi je regardais sans plus, ça m’interpellait pas, me donnait pas envie de me maquiller, d’être belle grâce à ça. Parce que j’avais une pote qui pensait ça : elle pouvait plus sortir sans maquillage, elle préférait être en retard mais maquillée, qu’à l’heure et naturelle. C’était trop pour moi.
Du coup, je ne correspondais pas au modèle de la femme désirable de mes potes. Ils kiffaient surtout sur des filles très apprêtée, « féminine », qui mettaient leurs fessiers en avant, haut court et bas moulant, souvent maquillées. Tout l’inverse de moi ! Je me rappelle d’une fois en soirée, ils m’ont tous complimenté : je portais un slim blanc et un haut qui ne cachait pas mon derrière… Quand j’y repense ça me fait rire, mais je me dis aussi que ces mecs avaient une vision limitée et restrictive de la féminité. Cette vision, je l’ai intégrée quelque part, ce qui ne m’a pas donné confiance en moi, en ce que je valais. Je me rabaissais face à ça et je me suis longtemps dit que je ne plaisais pas. Mais j’ai pas essayé de me changer pour autant, j’ai gardé mes sweats larges et mes baskets.
Être vierge et m’assumer ? Ça n’a pas été facile avec mes potes
Après le lycée, je me suis confortée dans ma situation de célibataire vierge, je passais tout mon temps avec mes potes, et ça me plaisait. J’assumais devant mon groupe de potes mecs mais ils se foutaient de ma gueule avec ça. Ils me disaient que j’étais un bébé ou lesbienne. Y en a un qui m’appelait « petite fille ». Quand ça me taillait je ne répondais pas forcément, je laissais parler et j’en rigolais. Mais je souffrais de voir « l’amour » tout autour de moi, dans mes relations, dans la rue, les films, les réseaux. C’était comme une pression quotidienne ; quand tu le vois, tu te demandes quand viendra ton tour et ça peut être démoralisant. Forcément, je m’impatientais quelque part. Il me manquait cette expérience du couple et du sexe.
Elizabeth a 18 ans, elle est vierge. Bien dans sa peau et s’assumant, elle raconte toutefois que les remarques de son entourage pèsent sur elle : « Je suis vierge et pour les autres, c’est un problème ».
Aujourd’hui, je suis avec quelqu’un depuis un an. On se connait depuis plus longtemps, on a d’abord été amis. Il m’a connue dans tous mes états, physiques comme psychologiques. On partageait déjà beaucoup. C’est ce qui m’a mis en confiance. Je n’ai pas dû changer pour lui plaire. De plus, il connaissait mes craintes par rapport au fait que c’était nouveau pour moi et que c’était difficile de m’ouvrir intimement à quelqu’un. Il aime tous mes styles plus ou moins féminins, mon naturel et c’est ce que j’attendais pour me lancer. J’ai longtemps pensé être « en retard » par rapport aux gens de mon âge, mais je suis ravie d’avoir pris le temps.
Laura, 21 ans, volontaire en service civique, Villiers-sur-Marne
Crédit photo Unsplash // CC Lucas Favre