Confinement : le coronavirus n’efface pas les inégalités (médiatiques)
Cela va faire une semaine que je suis confinée chez moi à Chanteloup-les-Vignes. Un quartier dit « sensible » situé dans les Yvelines. Télétravail, infos, dodo, c’est ma nouvelle routine… Les infos justement, parlons-en. J’ai la forte impression qu’on essaie de nous faire croire que seules les banlieues et quartiers populaires ne respectent pas le confinement alors que le lendemain de l’annonce du Président la moitié des Parisiens faisaient des pique-niques au parc Montsouris et ses petites courses au marché d’Aligre.
C’est clair ou pas ? pic.twitter.com/ffYEOu2yvb
— Nacéra (@NasNacera) March 20, 2020
Depuis ma banlieue, je suis de nouveau frappée par le traitement médiatique à deux vitesses dont nous sommes témoins. Quand les journalistes tournent les caméras vers les quartiers plus défavorisés tels que Barbès ou Château-Rouge, on parle très (trop) rapidement « d’incivilité » et de non-respect du confinement. Faire ses courses à Château-Rouge pour acheter de la bouffe « exotique » (comme certain aiment bien l’appeler), c’est faire ses courses alimentaires au même titre que les autres, juste au cas où (et ça bah, c’est autorisé).
Un article Le Figaro qui parle du travail des policiers en période de confinement commence quand même par : « Certains « territoires perdus » sont d’ordinaire peu enclins à respecter l’État de droit. » C’est dire !
❌#coronavirus «Le confinement des territoires perdus de la République est difficile!» https://t.co/qEEESn29b6
— Le Figaro (@Le_Figaro) March 19, 2020
Le racisme et le mépris de classe pas confinés ?
J’ai l’impression que le confinement a fait se stopper pas mal de choses, mais certainement pas le racisme et le mépris de classe. Il n’y a qu’à observer les localisations des dernières vidéos de bavures policières qui tournent sur les réseaux sociaux depuis quelques jours. Pendant que sur le canal Saint-Martin, ça fait des shootings et des balades en famille pour profiter de la météo ensoleillée. Une jeune fille de 16 ans tabassée par la police à Aubervilliers, des amendes à gogo dans toute la Seine Saint-Denis….
Confinement : 10 % des amendes dressées dans le pays ce mercredi l’ont été en Seine-Saint-Denis. Face à l’indiscipline, police et justice sévissent. Des CRS ont été appelés en renfort. La préfecture prépare un nouvel arrêté, encore plus contraignant > https://t.co/xZzFc80AZS
— Le Parisien (@le_Parisien) March 19, 2020
Confinement : l’objectif premier c’est sauver des vies !
Ma famille à la Réunion n’avait que très peu de chance de contracter le virus et aujourd’hui on compte déjà une trentaine de cas, dont la majorité sont des personnes arrivant de métropole. J’aimerais bien que les médias documentent plus ce phénomène de fuite totalement inconscient par exemple ?
C’est pas les pauvres qui prennent leur billet d’avion égoïstement pour fuir vers les départements d’outre-mer et l’étranger (et contaminer le reste du monde en passant). Ni les pauvres qui vont se réfugier dans leur petite maison de campagne en ruralité (et contaminer le reste de la France en passant). Et surcharger les petites cliniques/hôpitaux qui n’ont pas les mêmes moyens et capacités d’accueil que les grands CHU de Paris.
En Nouvelle-Aquitaine, les médecins sont très inquiêt.e.s : « Ce qui nous inquiète le plus c’est l’afflux de Parisiens qui viennent passer la période de confinement dans leur famille ou dans leur résidence secondaire en Creuse. Ça augmente le risque localement. »
Le témoignage de cette infirmière est glaçant. #RestezChezVous https://t.co/sR9WfMFRKN
— Vincent (@vincentFUUU) March 19, 2020
L’objectif premier, c’est de sauver des vies et pas de faire des battles pour savoir qui respecte le plus le confinement. Mais c’est difficile de garder mon calme lorsque, en plus du stress ambiant, on essaie de me faire croire que c’est particulièrement de notre faute, nous les pauvres des quartiers populaires, si le virus se propage. Le but n’est pas de se renvoyer la balle mais de rappeler à tout le monde qu’il n’y pas UN coupable et j’apprécie très peu le vilain méchant pauvre de cités que les médias sont en train de dessiner.
Bref @tous : #RestezChezVous et @les médias #SoyezDignes
Yasmine, 23 ans, étudiante, Chanteloup-les-Vignes
Crédit photo Hans Lucas // © Hervé Lequeux (Série Coronavirus – Paris-Banlieue)
il ni à personne sur terre pour gouverner justement nous sommes dans un pays qui à coloniser qui est rester coloniale mépris des plus faibles des différences montrant leur supériorité la roue elle tourne lentement et surement
Je partage tout à fait ton point de vue à propos des médias de droite comme de gauche qui orientent notre perception des choses, mais saches que pour ma part, même si je vis en maison en province, je suis davantage scandalisée par les riches parisiens qui migrent dans leur résidence secondaire et se croient en vacances (et propagent le virus par la même occasion) qu’en sachant que les enfants des quartiers continuent à jouer ensemble au bas des immeubles… les médias ne sont pas le reflet de l’opinion publique, j’ose espérer que la majorité des gens, tous milieux confondus, font la part des choses. Merci pour ton article
Le pire, je pense, c’est qu’ils ne s’en rendent même pas compte. Tu cites Le Figaro ? Magazine de droite, qui parle de « quartiers perdus de la République » (peut-être que c’est vrai pour certains lieux, pour certains domaines, mais la faute à qui ? c’est un autre débat…) Pour eux, c’est la situation : des quartiers populaires remplis de voyous et ils sont incapables de voir les nuances. Je pense que l’on trouvera moins ce genre d’article sur Libé, par exemple, ou dans l’Huma. Parce que ça a trait à des visions du monde. Le pire, en fait, c’est pas cette dualité de traitement entre centre-ville et banlieues, c’est le fait que ce soit sans doute parfaitement inconscient, et que si on leur en faisait la remarque, ça ne suffirait peut-être même pas à leur faire voir le problème.
enirenrekhtoues.blogspot.com