Un Erasmus sans argent, ce n’est pas L’Auberge espagnole
L’année dernière, j’ai quitté Paname. J’ai laissé derrière moi la tour Eiffel, qu’en bonne parisienne je n’ai jamais visité. J’ai abandonné tout ce que je connaissais : les trajets dans la ligne 7 bondée pour aller à la fac, les cinoches à Montparnasse avec mon frère, les restaurants asiatiques de Tolbiac avec mes potes, mes balades autour de Bastille. J’ai quitté tout ce qui depuis des années constituait ma vie, pour partir en Erasmus. On pense toujours aux fêtes et aux histoires d’amour internationales qu’on voit dans les films. Seulement voilà, devenir soudainement autonome et refaire sa vie loin de sa famille et de ses amis n’est pas si facile.
Âgée d’à peine 20 ans et étudiante en langues, je me suis installée à Birmingham en Angleterre pour un an. Un échange finalement écourté par le Covid. Cette destination était mon premier choix, étant fan de l’anglais et ne souhaitant pas me ruiner d’un coup en partant trop loin. Ma première expérience loin de chez moi.
En Erasmus, mon porte-monnaie n’a pas pu suivre
Après un voyage de cinq heures, je posais enfin mes deux grosses valises dans une petite chambre d’un vieux bâtiment très moche mais que j’avais choisi. C’était la résidence la moins chère, avec un loyer à environ 500 euros. Je me suis installée dans un appartement que je partageais avec quatre étudiants anglais. Seulement voilà, ils ont très vite formé deux groupes de deux. Soit parce qu’ils se connaissaient déjà, soit parce qu’ils avaient cours ensemble. Je me suis très vite retrouvée toute seule.
Auparavant exempté·e·s des frais de scolarité des établissements britanniques grâce à Erasmus, les Français·e·s devront désormais payer de leur poche. En cause : le Brexit. Depuis la rentrée 2021, ils·elles devront débourser aux alentours de 20 000 euros par an pour un cursus en licence. Un obstacle pour de nombreux étudiant·e·s décrypté par France Info.
Brexit : la fin du programme Erasmus outre-Manche rebat les cartes pour les universités en Europehttps://t.co/YYQXkm9KEi pic.twitter.com/jESczmm2hW
— franceinfo (@franceinfo) April 3, 2021
Les élèves locaux ne cherchaient pas à se faire des amis qui ne faisaient que passer. Je me suis alors rapprochée d’un petit groupe d’étudiants australiens. Malheureusement, j’ai très vite compris qu’on n’avait pas grand chose en commun. Ils passaient leur temps à boire, faire la fête et aller en boîte. Ce n’est pas trop mon truc. En plus, comme ils venaient de loin, à plusieurs occasions, ils sont partis visiter des villes européennes ensemble. Je les ai suivis quelquefois mais, très vite, mon porte-monnaie n’a pas pu suivre. Chaque voyage ne coûtait pas moins de 100 euros. Ces voyages à Copenhague, Paris, Édimbourg, et bien d’autres villes les ont rapprochés et m’ont mise à l’écart.
Mon porte-monnaie en a pris un coup, autant que mon moral
Ils n’avaient pas à se soucier de l’argent, alors que moi, boursière, j’ai stressé toute l’année par rapport à mes dépenses. Quand ils décidaient d’aller au restaurant à 20 euros ou en boîte avec son cocktail à 15 euros, leur seule préoccupation était de trouver un endroit sympa. Moi, je pensais tout de suite à combien cela allait encore me coûter.
Je les ai donc suivis dans leur délire, de peur de me retrouver complètement seule, et évidemment, mon porte-monnaie en a pris autant un coup que mon moral. L’aspect financier fut un facteur de privation et un véritable frein à ma prise d’autonomie et de sociabilisation. Mes parents me soutenaient financièrement car je ne pouvais pas trouver un job étudiant dans un pays étranger. Demander un visa de travail aurait été un véritable cauchemar administratif et une dépense en plus. Je n’aurais d’ailleurs pas eu la garantie de l’obtenir, presque impossible pour les étudiants Erasmus présents sur le territoire pour un an.
Ma mère intermittente du spectacle et mon père avec sa petite retraite m’ont soutenue comme ils ont pu. Ma mère payait mon loyer et mon père me donnait entre 250 et 300 euros pour mes courses et pour quelques sorties comme le cinéma. Ils voulaient que je puisse profiter, mais je me suis sentie coupable toute l’année. Dans ma famille, on a toujours fait attention à ce qu’on dépensait. Ma mère a déjà du mal à boucler les fins de mois. Que mes parents dépensent autant pour moi m’a rendue soucieuse de leurs besoins.
Pas de supers souvenirs de soirée, pas d’amitiés à vie, pas d’histoire d’amour
C’était aussi la première fois que je sortais d’un cadre familial. J’ai donc dû apprendre à vivre seule, à faire mes courses en faisant attention à ce que j’achetais, à faire mes comptes, le ménage… J’aidais à la maison bien sûr, mais devoir y penser est bien plus prise de tête. Les supermarchés étaient très chers à Birmingham. À la fin du mois, il arrivait que je ne mange plus que des pâtes, n’ayant plus les moyens d’acheter de la nourriture saine.
Je vivais avec des gens que je croisais peu et qui n’avaient pas du tout la même éducation que moi, que ce soit concernant la propreté (j’ai fini par faire le ménage toute seule) ou le bruit. Je n’ai donc pas été aidée du fait d’être en « coloc ». Ça en a même rajouté en termes de charge mentale et de négativité. Intellectuellement, l’année a été intéressante mais je n’avais que quelques heures de cours par semaine, ce qui a renforcé mon sentiment de solitude.
Je m’attendais à un Erasmus comme dans L’Auberge espagnole
Sûrement à cause du fait d’être à l’étranger, je n’osais pas parler de ce que je vivais à ma mère ou à mes amies. Je disais que tout allait bien et je racontais toutes les choses que j’avais faites avec la bande d’élèves internationaux en accentuant le positif. Je me disais que le problème venait de moi. Ne pas en parler minimisait le problème.
Mon année a fini par s’achever dans le chaos et la panique de la crise sanitaire et je suis rentrée en France plus tôt que prévu. J’ai retrouvé ma famille, mes amies, et un poids s’est levé de mes épaules.
Pendant son année d’Erasmus en Grèce, Maëlle s’est conscientisée politiquement. Vivant dans un quartier anarchiste d’Athènes, elle n’avait jamais été autant confrontée à la précarité… et à la solidarité.
En quittant la France, je m’attendais à vivre une expérience comme dans L’Auberge espagnole, mais je n’en garde pas de supers souvenirs de soirée, pas d’amitiés à vie, pas d’histoire d’amour. Vivre seule, repartir de zéro, n’est pas aussi facile que dans les films, surtout à l’étranger dans un cadre que l’on ne connaît pas. Cette année à l’étranger a plutôt été une épreuve. Une prise d’indépendance qui a engendré une sacrée charge mentale.
Rebecca, 21 ans, étudiante, Villejuif
Crédit photo Unsplash // CC Keith Wong
Je partage les sentiments de cette étudiante et ce en tant que parent.
Mon fils est parti cette année en erasmus, colocataire également.
Le seul hic c’est est qu il est boursier et que les autres n’ont manifestement pas de préoccupation financière.
Il a une charge de travail demandé moins importante que en France. Donc ses camarades en profitent pour sortir, voir du pays..
Le public conseillé est traditionnel en Irlande mais à 20 euros en moyenne par soirée pub 3 fois par semainë, nous ne suivons pas financièrement.
Le loyer, à 540 euros, les fournitures scolaires , la nourriture de base…
Et la bourse erasous qui ne tombe pas …
Je passe mon temps à dire à mon fils de faire attention, qu il ne peut pas faire comme les autres.
Je culpabilise car je aimerai qu il en profite et ce n’est est pas en stock excluant faute de moyens financiers qui il va y arriver.
Dans une belle expérience de vie est en train de devenir un cauchemar…
Je comprends très bien la jeune fille qui a écrit le article ci dessus.