Nos enfants ont chamboulé notre couple
À la tombée de la nuit, après avoir mis les enfants au lit, on se retrouve. On se met au salon, on regarde des films sur Netflix, et on se pète des joints. On se raconte nos journées. Les week-ends, on se fait des soirées à deux. On fume et on boit, rarement. On écoute de la musique aussi. Je prépare à manger, ou on se fait livrer des plats. Il n’y a que ces moments-là qui nous ramènent à notre vie avant les enfants. Ça nous rappelle des souvenirs.
La fête, c’est fini
Notre première fille vient d’avoir 5 ans et le petit a 7 mois. On les a eu jeunes. J’avais 19 ans quand la première est née et son père 21. On s’est connus quand j’en avais 14 et lui 16. Avant, on faisait le héla (on s’amusait beaucoup). On sortait, on passait notre temps ensemble, on allait en boîte de nuit. C’était tous les week-ends sans exception. On faisait la fête, comme tous les couples à cet âge.
Mais maintenant, la nuit, pour nous, c’est le seul moment de tranquillité après des dures journées avec les enfants. C’est : boulot-enfants-manger-dodo. Même s’ils sont trop mignons et qu’on les aime de toute notre force, ce n’est pas facile. On est tout le temps enfermés, et ça pèse de ne plus sortir.
On n’a plus de moments à nous, ce qui entraîne des disputes à tout bout de champ. On se dispute pour la vaisselle qui n’est pas faite ou le linge qui n’est pas étendu, parce qu’il y a tellement de choses à faire… Et moi, je suis hyper débordée. On a les nerfs tendus parce qu’on est tout le temps pressés. On vit la fast life, comme on dit.
Quelque chose a changé
On n’a plus de complicité comme avant. Il y avait quelque chose entre nous, je ne sais pas comment l’expliquer. Quelque chose de fort, qui n’était pas forcément lié au sexe. On était trop complices, les meilleurs amis du monde. On riait aux éclats, il n’y avait pas trop de stress. On se saoulait, on faisait nos bails… tranquilles quoi. On mangeait la vie, si on peut le dire comme ça.
On est toujours jeunes, mais ce n’est pas la même chose que quand on avait 15 ans. Je le ressens mal parce qu’en vrai, ça me manque cette complicité. Peut-être que ce qui a changé c’est le fait de réellement vivre ensemble, seuls avec les enfants et sans parents. De prendre nos responsabilités et d’avoir nos problèmes à côté.
Moins de sexe
Le sexe n’était pas la base de notre relation, mais ça comptait beaucoup. Peut-être parce qu’on était encore jeunes, donc on ne pensait qu’à ça… Je ne sais pas. Mais, maintenant, les vrais bails ont commencé, parce que c’est à partir du deuxième gosse que ça devient un vrai boulot, la vie de parents. Après la naissance de la première, ça allait. C’était au Sénégal, on ne vivait pas ensemble, mon copain et moi. Moi, je vivais avec ma mère et elle pouvait garder la petite. Quand on a déménagé ensemble en 2018 en France, ça allait aussi. Il n’y avait qu’un seul enfant, et elle était déjà grande. Mais, depuis la naissance du dernier, tout a été chamboulé.
On baise rarement, genre une fois par semaine, alors qu’avant c’était quatre à cinq fois. Et ça nous pèse grave. Ça n’a pas changé beaucoup de choses, mais c’est compliqué. Je ne peux pas trop expliquer. On est enfermés dans une vie de famille et on ne peut plus rien faire de ce qu’on faisait avant. C’est devenu dur, tellement on est fatigués avec le bébé, les pleurs…
Moins de sommeil
On ne dort plus sur nos deux oreilles. On se réveille la nuit, pour ensuite se réveiller le matin à 6 heures du mat’ pour se préparer et repartir pour une autre journée. En plus, on n’a personne pour nous aider, on est tout seuls. Personne ne nous aide parce que nos deux familles vivent au Sénégal et, depuis le Covid, pour venir, c’est toute une galère.
Aïssa a donné naissance à deux enfants : une fille, puis un garçon. Pour elle, aimer le second n’avait rien d’une évidence, car la grossesse n’était pas désirée.
On a tous les deux besoin de reprendre notre vie d’avant mais ce n’est plus possible, du moins pour le moment. On n’a que la nuit pour nous, où on essaie de maintenir une relation de couple. Même si on ne peut pas oublier qu’on est parents en vivant constamment avec les enfants….
Maryam, 24 ans, en formation, Paris
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