J’ai participé à un tournoi de foot entre Éthiopiens d’Europe

En 2019, je suis parti aux Pays-Bas pour faire un tournoi de foot : le « Tapha kubba miilaa ». C’est le nom en oromo [l’une des langues parlée en Ethiopie, ndlr], et ça veut dire « jeux de ballon ». Ça se passe tous les ans, à part en 2020 et 2021 à cause du Covid-19. Il n’y a que des Éthiopiens d’Europe. Ce tournoi est organisé pour réunir tous les Éthiopiens, pour qu’ils se changent les idées et pour qu’ils se connaissent. 

C’est important parce que, nous, les Éthiopiens, on n’est pas beaucoup en Europe, donc ça nous aide à nous retrouver avec des anciens amis ou bien à s’en faire des nouveaux.

Je suis parti avec des joueurs. Il y avait aussi ma mère et mes potes qui m’ont accompagné. Et beaucoup de supporters sont venus nous soutenir. D’ailleurs, ils n’étaient pas qu’Éthiopiens, il étaient de différentes nationalités.

Ma chance de représenter les Éthiopiens de France

Je n’avais que 16 ans et les autres joueurs avaient plus de 20 ans. J’étais très content d’avoir été convoqué pour représenter les Éthiopiens de France. Pour moi, c’était une chance. 

En mars 2018, j’ai participé à l’évènement « Walgahi » : c’était une après-midi où on se réunissait entre Éthiopiens autour de la culture. Là-bas, j’ai rencontré un ancien joueur qui est devenu entraîneur : c’est lui qui convoque des joueurs qui vont participer au tournoi. Je suis parti jouer avec des Éthiopiens car je n’avais pas de club à ce moment-là. Ils ont vu mon jeu et mon comportement. 

Après, ils ont appelé mon père pour demander l’autorisation de passer l’examen. Mon père a accepté, mais moi je n’étais pas au courant. Le lendemain, l’entraîneur est passé au centre de mon entraînement pour me voir. Puis, il m’a appelé pour me dire qu’il était intéressé par moi.

Seize pays différents

Bref, on est arrivés là-bas deux jours avant le tournoi. D’abord, on s’est reposés. Le lendemain, on a fait l’entraînement, on a visité un peu la ville, on a testé le terrain… Je n’étais jamais allé aux Pays-Bas avant ça. 

Il n’y a pas eu de phases de groupe, vu qu’on n’était pas beaucoup : seize équipes de seize pays différents. Du coup, on a directement joué les huitièmes de finale contre la Norvège et… on a gagné 4-2. Malheureusement, je n’ai pas marqué, mais j’ai livré deux passes. J’ai fait deux passes décisives, et grâce à moi on a marqué. On perdait 1-0 avant que je rentre. Et on a mis quatre buts en vingt minutes.

C’était le premier match. J’étais remplaçant et je suis rentré à la soixante-douzième minute. J’étais le plus petit ! J’avais peur d’être blessé, mais j’étais très content d’être là. Ils m’ont dit que je n’avais pas le physique, mais que j’avais la technique.

J’ai mis un triplé ! On a pété un câble !

Le lendemain, on a joué les quarts de finale contre l’Angleterre : on a gagné 3-1. J’ai mis un triplé ! On a pété un câble. Sur le terrain, tous les supporters sont rentrés, c’était incroyable ! On a bien fêté, on a même dansé. Ils m’ont pris dans les bras et m’ont lancé comme ça ! Je voulais que les caméras soient sur moi parce que je voulais vraiment perçer, alors j’ai tout donné.

Ensuite, on a joué la demi-finale contre les Pays-Bas et on est sortis avec une défaite 2 – 1. La finale, c’était les Pays-Bas contre l’Allemagne : les Pays-Bas ont vaincu l’Allemagne 2-1  et ils ont remporté la coupe chez eux. Je suis allé regarder, mais j’étais vraiment triste parce que je ne voulais pas du tout qu’ils remportent ; parce qu’ils nous avaient éliminé lol.

On est partis au concert pour oublier cette défaite, parce ça nous avait fait mal. C’était un concert de danse et de musique, un peu loin du lieu de tournoi, mais dans la même ville. J’ai pris une photo avec un chanteur célèbre que j’aime bien, Qamar Yuusuf, et je me suis senti heureux malgré la défaite. 

Cette organisation, ça m’a permis de me faire des amis. Avec un garçon rencontré là-bas, on est même devenus meilleurs amis. 

Nabil, 19 ans, en alternance, Paris