De l’île Maurice à la Réunion : le voyage vers ma nouvelle vie
Ça ne fait pas si longtemps que je vis à la Réunion. Je suis arrivée ici le 8 mars 2021 avec mon frère. Devant l’aéroport Roland-Garros à Saint-Denis, ma mère et mon beau-père nous attendaient. C’était le début d’une nouvelle vie.
Je les ai serrés dans mes bras. J’étais tellement heureuse, elle m’avait tellement manquée ces dernières années. Il faut dire qu’avant ça, ce n’était pas vraiment pareil. À Maurice, c’était dur de quitter mon oncle et mes cousins parce que je les aime vraiment, on était tout le temps ensemble. On avait des bons délires, on rigolait, on faisait des tiktoks. J’avais envie de pleurer, mais pas devant mes cousines. Alors, j’ai attendu d’entrer dans l’avion avec mon frère et j’ai tout lâché.
Je me suis rendu compte que tous ces délires, c’était fini. Je me sentais triste, déprimée même. Mais j’avais pris ma décision : quitter mon île pour retrouver ma mère que je n’avais pas vue depuis des années.
Mon père violent
Je n’ai pas vu ma mère pendant trois ans. Quand j’étais petite, c’était très compliqué entre mon père et elle. Il la frappait. Mes parents se disputaient tout le temps. Lui, ne faisait rien dans la maison. Il n’achetait rien et passait son temps dehors, avec ses amis.
Pendant les scènes de violences, je partais jouer avec mes cousins et cousines. Mais, un jour, ma mère a décidé qu’on devait quitter la maison. On a pris nos affaires : direction chez ma grand-mère. Évidemment, mon père n’a pas accepté. Il était vraiment énervé qu’on soit parti et venait frapper chaque jour à la porte en demandant à ma mère de revenir. Il lui disait que c’était « terminé les bêtises ».
Je ne sais pas trop combien de temps s’est écoulé mais, à un moment, ma mère m’a dit qu’elle avait rencontré quelqu’un. J’étais petite, je n’ai pas compris ce que ça voulait dire. Puis, elle m’a annoncé qu’elle devait partir vivre à la Réunion.
Le grand jour est arrivé
Quand elle m’a déposée chez ma grand-mère, j’ai pleuré, et elle aussi. Je me sentais triste, mais je comprenais sa décision. J’ai vécu un moment chez ma grand-mère. Je m’y sentais bien, même si, évidemment, ma mère me manquait trop. J’avais mes affaires, mes cahiers, ma trousse. Elle me faisait à manger et elle me donnait même de l’argent. Et puis, ça allait parce qu’elle me disait que ma mère allait revenir me chercher.
Mais, quand je suis partie vivre avec mon père, là c’était différent. Je n’avais plus mes affaires d’école, on n’avait pas d’argent, ni à manger. J’étais franchement malheureuse. Du coup, au collège, ça a commencé à être compliqué. J’avais beaucoup de mal à me concentrer sur mes études. Puis, le grand jour est arrivé. J’étais chez ma grand-mère quand j’ai appris qu’on allait partir à la Réunion.
Ma mère avait payé tous les billets. Le jour de notre départ, mon père n’était pas là. Il nous en voulait de partir et ne voulait plus nous voir. Mon frère et moi, on est donc partis seuls. Je ne sais pas si je retournerai un jour à Maurice, ni si je reverrai un jour mon père. Mais à la Réunion, j’ai commencé une nouvelle vie, et retrouvé ma mère.
Alicia, 15 ans, collégienne, Saint-Louis (La Réunion)