Mes oreilles recollées, « au cas où »

La première fois que je me suis vu après l’opération, j’étais encore un peu anesthésié. Le chirurgien devait m’enlever le pansement, mais c’est l’infirmière qui l’a fait. Elle l’a mal enlevé et il y a eu plein de sang. Les oreilles étaient très collées. Au début, je me suis dit : « Faut que je m’adapte. » Ce jour-là, je me suis aussi senti fier d’être allé jusqu’au bout, de ne pas m’être découragé.

En 2017, on m’a fait une anesthésie générale pour recoller mes oreilles. Le jour de l’opération, mon père était encore plus stressé que moi : « Faut faire attention ! » Il n’aimait pas trop ça car il est pompier, il a dû voir des trucs… Moi, c’était surtout le résultat qui m’intéressait. Je me demandais ce que les autres allaient dire.

Avant le collège, le royaume des moqueries

Avant, mes potes m’appelaient « Dumbo ». C’étaient des taquineries, ça ne m’affectait pas, mais, du coup, je savais qu’elles étaient grosses… Puis, je ne suis pas con, je savais que j’avais les oreilles décollées.

Je me suis dit que c’était mieux de faire l’opération tôt : plus tôt je la fais, moins ça me suivra plus grand. Comme ça, pas de moqueries au collège. Les moqueries, ça n’arrive pas en primaire. Mes potes se foutaient de ma gueule sur mes oreilles… mais c’était juste pour rigoler entre nous. Moi aussi, j’en rigolais.

J’ai voulu le faire avant de me dégonfler. Mes parents m’avaient proposé, j’avais dû leur en parler. J’ai décidé sur un coup de tête et, un an après, je l’ai fait. Avant, j’avais regardé une vidéo sur les opérations, je voulais voir les résultats chez les gens. C’est intéressant à voir, mais ça peut faire peur. On te coupe les oreilles, ils te les ouvrent pour rapprocher les deux bails. C’est… bizarre.

La fameuse rentrée en sixième

Se faire opérer, ça avait un côté stylé. À l’hôpital, les gens me disaient : « Tu es courageux. » Quand je me suis réveillé, je disais n’importe quoi, je ne me contrôlais plus trop. J’ai voulu me lever tout seul, mais je suis tombé d’un coup. L’anesthésie est partie petit à petit et j’ai eu de plus en plus mal. J’ai carrément eu un plâtre autour de la tête que j’ai gardé trois jours. Puis, j’ai dû mettre un bandage pour les garder en place. Comme tu es obligé de te mettre sur le dos, c’était compliqué pour dormir. Au bout d’environ deux mois, c’était bon.

L’opération, je l’ai faite durant les vacances d’été. Donc à la rentrée de sixième, j’avais les oreilles recollées. Je me disais que les gens allaient me poser des questions. La plupart de mes camarades ne le savaient pas. En plus de la pression de rentrer au collège, j’étais « stressé » et intrigué par la réaction de mes potes. Je ne les avais pas vus pendant trois mois. Ils ont aimé le résultat, et maintenant, ils ne peuvent plus me charrier sur ce sujet.

Même si ça fait longtemps, ça peut encore saigner un peu. Parfois, ça me fait mal si je fais un faux mouvement… Mais j’ai bien fait de me faire opérer. C’était le seul truc qui me dérangeait. Maintenant, c’est clean. Je vais devenir beau gosse.

Exaucé, 15 ans, lycéen, Yvelines