Linda L. 06/07/2023

Je ne supportais plus mon corps

tags :

Très tôt, le corps de Linda a commencé à changer. Très tôt, elle a commencé à complexer. Un calvaire qui, pour elle, a duré plusieurs années.

Mon corps a toujours été un poids, physiquement et surtout mentalement. C’était une catastrophe. Quand j’étais petite, le physique n’était en aucun cas ma priorité puisqu’on me considérait déjà comme « jolie ». Ma mère m’expliquait que les gens s’arrêtaient pour m’admirer. Pour eux, je ressemblais à une « poupée ».

À l’âge de 10 ans, mon corps a évolué. Pour cause, la puberté. Eh oui, à 10 ans, je commençais déjà à prendre de la poitrine et des hanches. Mais je prenais surtout des kilos. J’en ai pris conscience quand ma mère m’a dit : « Tes cuisses ressemblent à celles de ta cousine, elles sont grosses. » Je sentais bien que ce n’était pas bien d’avoir de « grosses » cuisses pour elle. Ce n’était pas horrible, plutôt dérangeant. Je n’ai pas le souvenir d’avoir fait face à des remarques de la sorte à l’école, ce qui est extraordinaire.

Je me faisais vomir

C’est également à cet âge-là que je suis tombée amoureuse d’un garçon qui, détail important, était très mince. En parlant avec moi, il a fait quelque chose qui m’est resté longtemps en tête : il a pris la largeur de sa cuisse pour la comparer avec la mienne. Déjà complexée, j’ai eu terriblement mal. J’avais honte et j’étais embarrassée d’exhiber une quelconque partie de mon corps.

Pour essayer de lui plaire (mais aussi pour faire plaisir à ma mère), j’ai fait une liste. Vous vous doutez bien de la première chose inscrite sur cette liste : perdre du poids, évidemment. Pour atteindre cet objectif, j’ai tout fait : régimes, exercices physiques, me faire vomir… La perte de poids était devenue une obsession.

Je prends et perds du poids lentement. Après de nombreux « efforts », je ne voyais toujours pas de résultats et j’ai fini par abandonner. Je voulais couper avec des ciseaux toute la graisse que j’avais en trop. Je me pesais et pleurais tous les soirs. Je détestais l’été parce que je devais porter des shorts…

Je ne voulais pas être ce que j’étais

Mes cuisses étaient mon plus gros complexe, mais en réalité je n’aimais aucune partie de mon corps. Mes bras étaient des « chauves-souris », je rentrais mon ventre pour paraître plus mince, mes seins me donnaient encore plus de poids et je trouvais la forme de mon visage immonde. Je ne voulais pas être ce que j’étais.

Ça a duré trois ans. Un jour, ça a fini par exploser, probablement au pire endroit : en cours. J’ai beaucoup pleuré. Mes yeux étaient gonflés, on avait l’impression que je m’étais fait agresser par des guêpes. J’avais essayé de cacher le désastre mais c’était quasi mission impossible. Je vous passe les détails mais, en gros, mes parents ont décidé de m’emmener voir un psychologue.

J’étais au départ réticente mais j’ai accepté parce que si je n’y allais pas, il fallait que j’en parle à mes parents. Je n’étais pas du tout prête à les confronter, surtout quand l’un d’entre eux était la principale raison de mon mal-être. Séance après séance, j’ai senti que ça commençait à aller mieux. Puis, j’ai arrêté d’aller chez ma psy. Sûrement parce que mes parents n’en voyaient pas l’utilité comme je ne leur en parlais toujours pas.

J’ai appris à m’aimer

Même sans psy, j’ai réussi à garder le cap. J’en parlais avec ma meilleure amie. Elle ne comprenait peut-être pas ce que je vivais mais elle me soutenait : un soulagement. Au fil des jours, des semaines, et des mois, j’ai finalement réussi à me défaire du calvaire intérieur que je vivais. J’ai appris à communiquer, à dire quand ça n’allait pas et ce qui ne me plaisait pas.

J’ai trouvé mon objectif de vie, mais c’est secret. Avec ma mère, ça se passe beaucoup mieux. Je me suis rendu compte qu’elle était elle-même complexée et qu’elle me transmettait ses complexes parce qu’elle s’inquiétait que je ne rentre pas dans les critères. Je ne pense pas qu’elle savait à quel point ses mots étaient horribles. En ce qui concerne le garçon, quand j’y repense, c’était vraiment maladroit de sa part, il ne voulait pas me faire de mal. On est toujours de bons amis.

J’ai arrêté de complexer sur mes cuisses et mon poids, ça ne veut pas dire que je n’ai plus de complexes. Il y a quelques petites choses qu’il est préférable de ne pas avoir selon moi, mais rien de trop important. J’ai appris à m’aimer, même avec mes petites imperfections, à prendre confiance, et je peux dire aujourd’hui que je suis fière et heureuse d’en être arrivée ici.

Linda, 15 ans, lycéenne, Chelles

Partager

Commenter