Yañ Erest 13/09/2023

À plus dans le bus du lycée

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Tous les jours, Yañ Erest prend le car pour aller en cours. Il y règne une ambiance bien particulière, entre éclats de rire des lycéens et jurons du chauffeur.

Il faut l’imaginer comme une chose répétitive chaque matin. D’abord la course pour ne pas le rater. Je covoiture avec mes voisins pour rejoindre l’arrêt, en plein cœur de notre petit village. Il est assez éloigné pour que nous soyons obligés d’utiliser une voiture. Ensuite, notre arrivée pile à l’heure. La journée lancée par cette piqûre d’adrénaline, je monte dans le car. C’est le tic-tac régulier de la journée. À peine réveillé, déjà parti, les pensées encore brumeuses dans un semi-état. Il est 7 heures.

À l’intérieur, il faut s’imaginer un chauffeur parfois bourru, parfois accueillant. Il y a déjà un grand nombre de jeunes entre 11 et 18 ans, silencieux, chacun dans sa bulle. Bulles à deux, doux chuchotements, réseaux sociaux, séries, musique dans les écouteurs, ronflements discrets. Il y a ces éclats de rire qui percent le silence, troublant la monotonie matinale. Parfois c’est toi, parfois c’est d’autres.

Posé à la fenêtre, je regarde le paysage défiler. Tous les jours le même, tous les jours différents. Les nombreux champs parsemés de récoltes, quelques animaux, vaches, buses et parfois chevreuils, le chassé-croisé des véhicules sur la route, des habitations encore plongées dans les ténèbres.

Arrêt suivant : l’endroit devient plein à craquer, tel une boîte de sardines. Un grand nombre de jeunes montent, s’installent, remplissent les trous. Il y a les paniqués qui finissent leurs devoirs à toute vitesse et ceux qui révisent. Ainsi que d’autres qui, troublés par le bruit, lâchent de mauvais regards aux agitateurs.

Une bataille acharnée

J’habite à la campagne dans le département des Côtes-d’Armor, et plutôt loin de mon lycée. Les deux lycées les plus proches se situent dans la même ville. C’est la plus grosse des environs et pourtant, elle n’est que de taille moyenne. Tel un soleil qui rayonne, elle attire tous les jeunes vivants autour. Mes parents travaillant loin d’elle, je suis obligé d’utiliser les transports scolaires. Et je ne suis pas le seul dans ce cas-là.

7h40. C’est l’arrivée à la gare routière. Je vois ceux qui bousculent pour sortir le plus vite possible et rejoindre leurs amis, ceux qui sont du lycée d’à côté et descendent lentement, et ceux qui se pressent pour rejoindre les navettes qui les amèneront jusqu’au leur. Pour moi aussi, cet arrêt n’est qu’une étape. L’ambiance des navettes est différente de celle de mon premier car. Tout le monde semble se réveiller. Les discussions enflent, chacun retrouvant des amis, des camarades, des connaissances. C’est plus bruyant, plus vivant. Les dix minutes passent vite. Et déjà me voici arrivé pour une nouvelle journée.

17 heures. À la sortie du lycée, c’est presque une bataille acharnée. Il y a foule. Les navettes apparaissent les unes derrière les autres. C’est une loterie, un jeu de pari. Il faut deviner où elles vont précisément s’arrêter, quelles portes vont s’ouvrir pour bien se placer et essayer d’y entrer les premiers. Premier arrivé, premier servi. Pour se poser seul sur un siège tranquille ou garder des places pour des amis. Pendant le trajet, c’est la folie, le brouhaha, la fin de la journée, tout le monde est excité : ça crie, ça parle et ça rigole.

L’ambiance de la gare routière

À la gare routière, je me retrouve englobé dans une mer de personnes, avec différents courants qui montent qui descendent, chacun cherchant son car ou ses amis. Là-bas, ce n’est que du plaisir : retrouver ses amis d’autres lycées, croiser de vieilles connaissances ou encore faire des nouvelles rencontres. Autour de nous, une vingtaine de bus, chacun déchargeant à son arrivée un nouveau flot de personnes.

Finalement surgit la première sonnerie. Un bruit long et continu, hurlant telle une sirène. Une bise par-ci, une poignée de main et un check par là, et déjà voilà que tout le monde se précipite vers son car. Certains n’auront que quelques minutes de trajet tandis que d’autres en auront pour plus d’une heure. Quelques-uns habitent au bord de la mer, d’autres bien profondément à l’intérieur des terres. À peine montés dedans, le temps de retrouver ses « colocs de car », que survient la deuxième sonnerie, sonnant le départ de la course. Le moteur hurle, les cars s’élancent. Les jurons et les coups de klaxons du chauffeur ponctuent l’atmosphère. Le but : éviter les bouchons à la sortie de notre gare routière.

Pour moi, c’est 30 minutes de discussions ininterrompues, chacun racontant sa journée, ses découvertes et ses projets. Une sorte de parenthèse avec ses amis, une pause bienvenue permettant de souffler avant le retour chez soi et les montagnes de devoirs qui nous attendent. Une atmosphère plaisante, pleine de rires et de sourires.

À l’arrêt avant le mien, il faut envoyer un message : « Coucou, j’arrive dans 5 minutes 🙂 » Pour être sûr que quelqu’un soit là à ma sortie et me ramène. Il est 18 heures, je viens enfin d’arriver chez moi.

Yañ Erest, 17 ans, lycéen, Côtes d’Armor

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