Comment se lancer en politique à 15 ans ?
Je suis une fille timide. Pourtant, j’ai une passion où le mot timide n’existe pas, c’est la politique. J’appelle ça une passion parce qu’il n’y a pas d’autre mot pour décrire l’intérêt que je lui porte. Plus tard, je veux être journaliste politique et, pour ça, j’ai envie d’acquérir le plus d’expérience possible. Il y a d’ailleurs beaucoup d’adultes autour de moi, qui m’écoutent, me prennent au sérieux et m’ouvrent beaucoup de portes sur ce monde.
Bien sûr, la politique, c’est vaste. On me demande souvent pourquoi j’aime ça. Je raconte ce que je peux, même si c’est encore un peu flou. Moi, j’aime tout dedans, mais surtout les débats. Lors de la première élection de Macron, ma mère regardait beaucoup l’actualité et je regardais avec elle. Je comprenais un peu, mais pas trop. Regarder la politique, je trouvais ça drôle ! Mais comme j’étais petite, il n’y avait rien pour que j’en fasse.
Depuis, cette passion m’a amenée à entreprendre des choses que jamais je n’aurais pu imaginer auparavant. J’ai dû vaincre ma timidité pour y arriver. Par exemple, le 1er avril, je me suis retrouvée sur le plateau de LCI en direct, à faire une chronique où je devais parler du poisson d’avril et des retraites, avec toutes les grèves. Ce n’était pas un sujet super simple, mais il l’est devenu car je suis passionnée donc je ne voulais pas me rater… J’ai réussi à me retrouver là-bas, car avant, j’étais allée à une conférence où j’avais rencontré la directrice de la fondation TF1 et… elle m’avait proposé de faire une chronique.
Je me suis dit : « Je peux tout faire »
Déjà à 13 ans, je voulais aller à l’Assemblée nationale pour mettre un pied dans ce monde. Mes profs ne croyaient pas en moi. C’est vrai, j’avais fait des lettres de motivation, des CV… sans réponse. Mais je n’ai pas baissé les bras. Et, à 14 ans, j’ai fait mon stage de troisième à l’Assemblée avec une députée Renaissance, Madame Charrière. C’est une institution incroyable ! Après mes candidatures sans réponse, j’étais allée voir le directeur adjoint du collège, je lui avais dit : « Je veux faire un stage à l’Assemblée nationale. » C’est le seul qui a cru en moi. C’est lui qui m’a dit d’aller voir la députée de Gagny. Il m’a aidée à faire les démarches. Je me suis alors dit : « Je peux tout faire, c’est pas l’âge qui compte, c’est pas de là d’où tu viens qui compte. »
Parce qu’une fois, mon oncle m’avait dit : « Samreen, tu viens du 93, faudra toujours que tu te battes pour te faire une place. » Et une amie, dès que je commence à lui parler de politique, elle me dit : « Ça me donne mal à la tête. »
En seconde, j’ai voulu refaire des choses en rapport avec la politique. J’ai donc refait un stage à l’Assemblée pendant les vacances. Je m’y suis prise toute seule, car je savais comment faire. Mon CPE m’a dit « personne ne t’en empêche » en riant, donc j’ai fait toutes les démarches. Je n’ai pas fait ça vraiment toute seule bien sûr, j’ai juste fait le premier pas vers les bonnes personnes. Ça faisait des mois que j’essayais de contacter la députée mais ils me baladaient à gauche et à droite. Mon CPE m’a alors envoyée vers un professeur d’histoire, qui m’a aidée sans hésiter.
Je m’entraîne au débat, sur Twitter et en famille
J’ai découvert tellement de choses, et un point de vue différent par rapport à mon premier stage. En effet, eux étaient du groupe LFI (La France insoumise). J’ai vu comment ils préparaient les manifs, les grèves, de quoi ils parlaient… Au fur et à mesure du temps, j’apprends les différents bords et couleurs politiques. J’ai commencé à être d’accord avec les idéaux de LFI, mais je découvre encore les partis.
Maintenant, j’aime bien aussi exprimer mon avis et mes idéaux politiques sur Twitter. Je donne mon avis sur des propositions de lois par exemple. Des amis et des personnes de mon âge m’ont d’ailleurs beaucoup critiquée pour ça. On me dit que ça peut me nuire, mais je ne suis pas du tout d’accord. Les députés, par exemple, exposent bien leur avis. Ils ont des critiques certes, mais ce n’est pas si mal vu que ça et c’est un peu leur boulot.
Les adultes au contraire ne me critiquent jamais. Je suis plus à l’aise pour parler avec eux car ils ont plus de connaissances, et les conversations peuvent durer une heure des fois, c’est trop bien. J’ai commencé à m’intéresser aux débats pendant les repas de famille, quand j’étais en cinquième. Je me permettais de prendre la parole et de donner mon avis. Bon, j’avoue, on me remettait souvent à ma place. Dans ma famille, ils aiment bien parler de politique. C’est un peu ancrée en eux, surtout au niveau des métiers. Mon grand-père paternel était un journaliste au Pakistan et il suivait Benazir Bhutto, la première femme élue Première ministre au Pakistan. Et je sais que d’autres personnes de ma famille que je ne connais pas trop sont journalistes.
Ce n’est pas si mal de débattre, car des fois j’ai des idéaux opposés à ceux de certains membres de ma famille. Heureusement, j’ai la chance d’avoir ma maman qui me suit dans tous mes projets, et qui me défend quand je suis en mauvaise position ou quand je n’ai plus d’arguments.
Prise de conscience et engagement
Depuis que j’ai commencé à m’intéresser à la politique, j’ai pris conscience de beaucoup de choses, notamment une pour laquelle j’essaie de faire entendre ma voix en profitant des oraux en classe : la discrimination dans les banlieues. Moi-même, je viens de la banlieue donc c’est un sujet qui me touche personnellement et je trouve que c’est mis sous le tapis. Le rappeur Kerry James, qui est très engagé dans cette cause, en parle dans ses chansons et ça m’a fait ouvrir les yeux.
Comme j’ai toujours voulu faire partie d’une association, j’ai voulu rejoindre les jeunes de LFI, notamment Voix Lycéenne. Mais je n’ai pas réussi, c’était difficile de les contacter. Alors maintenant, je fais partie de Renouveau Lycéen, une association apolitique. Je suis dans la commission « épanouissement scolaire ». Mon adhésion est toute récente, donc pour l’instant je découvre et j’essaie de mettre en place un projet pour le bien-être des élèves dans mon lycée, mais pour l’instant c’est top secret.
Actuellement, je me prépare à un concours d’éloquence. C’est un challenge que je me suis lancée pour voir jusqu’où je peux aller. Un super professeur m’aide pour ce projet. Heureusement car, sinon, j’aurais peut-être abandonné. Même si des fois on veut faire des projets seule, c’est bien aussi de demander de l’aide !
Samreen, 15 ans, lycéenne, Gagny