Ben M. 31/01/2025

4/4 Harceler le harceleur

tags :

Yanis, le meilleur ami de Ben, a été victime de harcèlement. Face à l'inaction des adultes du collège, Ben a décidé de prendre les choses en main.

Il lâchait toute sa haine sur lui. Sur Yanis. Mon ami. C’était sur Snap que ça se passait. Tous les jours des insultes. Son harceleur se défoulait et mon ami le vivait très mal. Il voulait arrêter de venir en cours et changer de collège car il en avait marre de tout ça. Et puis, il manquait les preuves. Sur Snap, le harceleur avait coché l’option « supprimer les messages une fois vus ».

C’était le crime parfait. Dès qu’il lui envoyait un message, une fois que Yanis le voyait, le message disparaissait immédiatement. Impossible pour lui de le dénoncer à la principale car il n’avait rien à montrer. Et même le jour où il en a eu une, l’école n’a rien fait.

Je vous explique. Un jour, Yanis a tout anticipé et il a réussi à prendre une capture d’écran du message, ça permettait de l’identifier. Il est parti le montrer à un surveillant pendant la permanence. Le harceleur était dans la salle.

Au lieu de défendre mon ami, le surveillant a éclaté de rire et il a dit au harceleur :

« T’es sérieux toi, tu harcèles des p’tits ?

Mais nan… tu connais, c’est un p’tit con lui » , a répondu le harceleur.

— Fais ce que tu veux hein, moi j’men fous. Je gère pas ça », a balancé le surveillant.

Yanis est retourné à sa place en criant : « Vous servez à rien. À chaque fois que je rentre chez moi, j’ai envie de me suicider. » Et le harceleur a répondu : « J’men fous, suicide-toi. »

Là, j’ai compris que ça allait trop loin et qu’il fallait que j’agisse car personne ne ferait rien. Lorsque Yanis m’a tout expliqué en détail, je suis allé voir le harceleur pour comprendre pourquoi il agissait comme ça.

Il m’a expliqué sa méthode. Comment il créait tout un tas de faux comptes sur Snap avec des fausses informations pour jamais se faire griller. J’ai demandé gentiment qu’il arrête, mais il n’a pas écouté. Alors je l’ai harcelé à mon tour de messages haineux, tous les jours. Je le tapais. Et j’ai continué comme ça jusqu’à ce qu’il arrête et qu’il s’excuse auprès de Yanis. Je voulais qu’il comprenne que s’il continuait, ça pouvait aller très loin de mon côté, et il a fini par comprendre. Mon ami n’a plus été harcelé.

Ma réaction a finalement été plus efficace que les sanctions de l’école comme les exclusions. Ces trucs-là ne servent à rien car, souvent, le harceleur et le harcelé vivent dans la même ville. Ça peut très bien continuer dehors, ou le harceleur peut demander à ses potes de continuer le harcèlement pendant qu’il est exclu.

En ce moment au collège, on nous fait faire des tests sur le harcèlement. L’idée c’est de savoir si on a déjà été harcelé. On a des questions où il faut dire si ça nous est arrivé. On nous parle de vidéos qui tournent sur internet. Des gens qui sont filmés sans qu’ils le sachent et après c’est posté sur les réseaux.

Je ne crois pas que ça serve à grand-chose. C’est comme quand on nous dit qu’il faut prévenir le proviseur en cas de harcèlement. Yanis, il avait peur que son harceleur soit encore plus énervé et lui fasse encore plus de mal après. Il n’avait pas non plus envie d’avoir une réputation de « balance » ou de « poucave » dans le collège. La meilleure solution, c’est de régler ça par ses propres moyens.

Ben, 15 ans, collégien, Bobigny

Illustration © Merieme Mesfioui (@durga.maya)

 

Qui contacter ?

Vous êtes victime de harcèlement ? Vous avez des craintes pour un·e proche ?

Le 3018 est le numéro unique qui traite les situations de harcèlement scolaire ou de cyberharcèlement. Des écoutant·es spécialisé·es pourront vous apporter un soutien psychologique et juridique. L’appel à ce numéro est gratuit et anonyme. Une application est également à votre disposition.

Série En finir avec le harcèlement scolaire, récit 1/4 : Trouver une oreille attentive

Pour s’intégrer et parce que sa tante avait minimisé la situation, Jamilya n’a pas eu tout de suite conscience de ce qu’elle subissait. Jusqu’à ce qu’un adulte pose pour elle le mot « harcèlement »

Partager

Commenter