Cassandre C. 02/04/2025

1/2 Envie d’amis

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Cassandre se sent à part depuis l’enfance. Peu à peu, la solitude s’est imposée à elle, jusqu’à devenir un poids difficile à porter.

Je n’ai jamais eu d’amis. L’idée de m’en faire au lycée semble un peu impossible. Cette année, en seconde, je ne m’en suis fait aucun. Sur le groupe de classe, je n’ai pas envoyé un seul message. Les professeurs se sont inquiétés. Ils ont vu que dans cette classe de 35 personnes, il y avait toujours cette fille seule avec qui personne ne voulait parler.

Un jour, mon professeur principal est venu me voir pendant un cours de vie de classe. Il m’a demandé pourquoi j’avais l’air anxieuse. Tout le monde était en train de socialiser, sauf moi. Je restais au fond de la classe en train de dessiner.

Il m’a recommandé d’aller voir l’infirmière pour garder un œil sur mon état mental et pour voir si je m’intégrais dans la classe. Ces séances ont duré environ deux mois, puis à un moment j’en ai eu marre et j’ai arrêté. J’avais l’impression d’être une sorte de désespérée qui ne savait pas aller vers les autres. Mais ça m’a fait réaliser à quel point j’étais seule, et que ça devenait alarmant.

« L’impression d’avoir raté toute son adolescence »

J’ai passé la majorité de ma scolarité sur un banc, seule, pendant que les autres faisaient des rencontres. Depuis petite, je suis vue comme une personne bizarre. En fait, j’ai toujours aimé les choses bizarres. Je joue à Splatoon, Zelda, Genshin Impact, Honkai : Star Rail, Project Sekai, Zenless Zone Zero. Depuis la primaire, je m’habille différemment. J’aime les vêtements mignons. Les jupes, les longues chaussettes, les vêtements avec des froufrous. J’ai souvent été comparée à une « meuf dans les animés » ou à une lolita.

Les gens, dont mes « amies », se moquaient souvent de moi. De mon apparence et de mes centres d’intérêt. Même ma personnalité et le fait que j’aime lire et dessiner étaient moqués. Je restais souvent dans mon coin, sur mon téléphone ou avec de la musique, alors les gens se disaient qu’il fallait rester loin de moi. Au collège, ils disaient que j’étais une satanique.

En primaire et au collège, je me suis parfois retrouvée dans des duos ou trios, ou des grands groupes d’amis, mais c’était toujours la même histoire : soit on me remplaçait, soit on se moquait de moi et on me laissait de côté. J’essayais de positiver. Je me disai  : « Je trouverai des vrais amis. » Mais quand t’as bientôt 17 ans, que t’es jamais sortie avec des potes, tes contacts sont quasi vides et ta galerie a plus de photos de persos de jeux et d’animés que d’amis, ça donne simplement l’impression d’avoir raté toute son adolescence.

« Je garde toujours mes distances »

J’ai l’impression d’être en retard. De rater les sorties, les messages tard le soir jusqu’au matin. Je n’ai jamais ressenti cette joie de retrouver mes amies après les cours. Je me sens ridicule d’espérer qu’à mon âge je puisse avoir mon groupe ou un·e meilleur·e ami·e. Quand j’entends certaines personnes me parler de leur meilleur·e ami·e, ça me rend envieuse. Moi aussi, j’aurais aimé parler de quelqu’un ou qu’on parle de moi de cette manière. Dans ma tête, les autres ont tout fait et tout le monde a déjà son ou sa meilleure ami·e.

Avoir un ami est devenu une obsession. Début seconde, j’ai décidé de m’inscrire à la chorale. Dans l’unique espoir de trouver au moins une personne. Mais ça a été une expérience très longue et douloureuse. On était à peu près 80, mais malgré ça j’étais seule. Ça m’a encore plus découragée. J’essayais de me convaincre que je m’en fichais d’être seule. Finalement, j’ai détesté la chorale.

Aujourd’hui, je garde toujours mes distances. J’ai peur d’être déçue. Je ne parle jamais de moi, de ce que j’aime, de ce que je ressens ou de mon passé. Quand les gens me disent qu’ils peuvent « comprendre », j’ai l’impression qu’ils expriment cette gentillesse par pure pitié. Je déteste ça. L’idée que quelqu’un reste avec moi après avoir appris ces « secrets » et découvert ma véritable personnalité me semble impossible. Une partie de moi veut y croire, mais une autre me dit qu’ils pourraient me laisser tomber.

Cassandre, 16 ans, lycéenne, Asnières-sur-Seine

Crédit photo Pexels // CC Eugene Lisyuk

 

Slash Solitude : enfer et paradis, récit 1/2 : Seule, pour mieux respirer

Mahawa, 18 ans, a toujours été différente dans sa façon d’être avec les autres. Hypersensible, elle perçoit tout plus intensément. Loin de l’agitation sociale, elle a trouvé son équilibre dans une solitude choisie.

 

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