Hugo A. 05/04/2017

En allant faire les courses, j’ai rencontré Nono…

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Aujourd'hui, quatre millions de personnes souffrent du mal logement en France. En dix ans, le nombre de personnes sans domicile fixe a augmenté de 10%, selon un rapport de la fondation Abbé Pierre. Et derrière les chiffres, des visages, des vies. En allant faire les courses, j'ai rencontré Nono.

Aujourd’hui, en allant faire des courses, je me suis fait interpeller par un sans domicile fixe qui me demandait une cigarette. Après lui en avoir donné trois, je suis resté discuter avec lui quelques instants, le temps pour lui de me raconter qu’il était dans la rue depuis maintenant quatre mois, alors qu’il était pourtant employé en tant que réparateur de coques de paquebots à Vénissieux.

Son salaire était trop bas pour qu’il puisse continuer à payer son logement et comme il n’avait personne pour l’aider, il s’est trouvé dehors.

Il avait fait des études, voyagé et exploré trois continents. Et il maîtrisait trois langues. J’ai été choqué qu’un homme travaillant dur ne puisse pas avoir droit au minimum vital qui est de vivre sous un toit.

Pas beaucoup des « comme moi »

Je suis rentré dans le magasin et ayant été assez retourné par notre bref échange, j’ai voulu lui acheter de la nourriture. En sortant, je me suis dirigé vers lui et lui ai tendu les deux sandwichs que j’avais achetés pour trois euros.

Très reconnaissant, il m’a dit qu’on n’en trouvait pas beaucoup des « comme moi ». Il a ensuite caché sa nourriture sous une veste. J’ai demandé pourquoi il faisait ça et il m’a répondu qu’il était obligé de cacher sa nourriture pour ne pas que les passants la repèrent.

En effet, le peu de nourriture accumulée l’après-midi durant décourageait les passants de lui faire quelques dons.

Norbert, plus couramment surnommé Nono, m’a expliqué qu’avec les deux sandwichs marque magasin à un euro cinquante, je lui avais fourni deux jours de nutrition. Je n’ai pas osé regarder l’apport calorique des sandwichs, mais nous savons tous que c’est absolument insuffisant pour deux jours. Et on passe, et on se dit : « Tiens, lui a déjà de quoi manger, on ne va pas s’embêter à lui acheter de la nourriture. » On ne va pas s’embêter à dépenser trois euros, un vingtième du prix mensuel d’une carte de transport lyonnaise pour une personne adulte.

Trouver une place pour tout le monde

En vérité, il ne coûte absolument rien d’aider quelques personnes par jour, que celles-ci soient en possession de nourriture ou non, puisque si un bon nombre de personnes le fait, chacun aura au moins un sandwich. Il ne s’agit pas d’être juste en cherchant à qui donner, mais bien de donner à la personne qui se trouve en face de nous et qui a faim.

Plus tard, Norbert m’a raconté l’injustice qu’il voyait dans les foyers d’accueil qui, en raison du contexte politique, mettraient les sans-abris étrangers « en priorité ».

J’ai d’abord été réticent face à son discours, l’associant aux idées véhiculées par le Front National qui défend la priorité aux SDF français.

Pour eux, les migrants des quatre coins du monde seraient accueillis à bras grands ouverts dans des foyers où ils seraient traités « comme des rois » et où on leur trouverait du travail, emplois qu’ils « voleraient » aux français. Il était clair pour moi que Norbert se trompait en disant cela. J’ai pensé qu’il était influencé par la haine contre le système qui l’a mis dehors.

Puis je me suis rendu compte que Nono avait plus que raison dans la mesure où il sous-entendait que chacun devrait avoir droit à un abri, peu importe son origine ou sa langue. Il ne s’agit pas de traiter des gens « en priorité », mais bien de laisser une place pour tout le monde. Ce qui va mal dans le système, c’est sa façon de loger les gens. En fait, une « cohabitation » est largement possible puisque, lorsqu’on cherche à fuir les températures extrêmes de l’hiver, on s’en fiche de qui est à côté de nous.

Et, à l’approche de l’élection présidentielle de 2017, il est du devoir des votants d’offrir un monde meilleur POUR TOUS, puisque ce qui est important, c’est que nous sommes tous des humains et que nous devrions tous avoir droit, à titre égal, de survivre, et même d’avoir accès au confort.

Cette entrevue m’a bouleversé et je crois qu’une personne en or comme Norbert et beaucoup d’autres méritent le monde. « Tous les Hommes naissent libres et égaux en droit », disent-ils. Alors que tous les Hommes vivent libres et égaux en droits.

 

Hugo, 17 ans, étudiant en géographie, Lyon

Crédit photo Marc Melki Exils intra muros

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3 réactions

  1. Bravo HUGO… Et des NONO y’en a des milliers… et déjà a notre porte… ou juste un peu plus loin… et souvent près des gares…
    HUGO sais-tu que chaque français (ceux qui peuvent acheter à manger…) jettent 29 kg de nourriture par an…?
    Tu peux rejoindre les nombreuses associations qui oeuvrent pour les récupérer et les re-distribuer…

  2. la réalité et bien cruelle, et je ne comprends pas ,je n »admets pas
    toute cette souffrance .
    toi qui n’a qui n’a que 17 ans ,je te félicite d’avoir su écouter nono.
    je suis très émue

  3. Je suis d’accord, il faut trouver une place pour tout le monde.
    Les gens doivent être plus solidaires. Chacun peut basculer du jour au lendemain.
    Sans amis ou sans famille, la réalité peut être cruelle !
    Merci pour cet article !

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