Municipales (4/5) – Activiste et maintenant… candidate !
En janvier, j’ai dit à mon copain : « Pendant trois mois, ne compte pas beaucoup sur moi. » Une campagne aux élections municipales ce n’est pas un sacrifice, mais on renonce quand même à plein de choses de la vie privée. Quand on est candidate, on devient une personne publique à l’échelle de la ville.
Depuis deux ans, je vis aux Lilas et je m’y présente en co-tête de liste. Au niveau local, on se rend compte très vite qu’on passe d’une citoyenne lambda à une candidate. Les gens vont voter pour une liste et pour une tête. Il faut assumer de mettre sa tête sur une affiche dans la rue, sur les tracts.
Au quotidien, je continue ma vie d’avant mais… j’ai même plus le temps d’aller acheter du pain ! Je ne ratais jamais mon rituel du dimanche au marché. Maintenant quand j’y vais, c’est avec ma casquette politique, pour tracter, de 9h à 12h. C’est l’hiver, il fait froid et et dès que c’est fini je me dépêche de rentrer chez moi pour me réchauffer les pieds. Sur un mois, je prends quand même trois-quatre jours de pause totale, pour recharger les piles. Pour le reste, chaque minute compte.
Est-ce que je suis en train de me trahir ?
Je ne l’avais pas complètement anticipé. Le plus marquant, c’est quand j’ai voulu organiser un événement en tant que bénévole pour Tous Élus. Certaines associations présentes m’ont rejetées parce que j’étais candidate aux élections municipales : « T’es naïve, aujourd’hui t’es candidate tu peux pas faire quelque chose sans cette casquette. » J’ai eu deux trois larmes pendant cette campagne. Là il devenait évident que pendant des mois j’aurais été « la candidate », alors que j’avais gardé ma casquette société civile non encartée justement pour ne pas tomber dans cette dichotomie. J’ai choisi ce niveau d’engagement parce que c’est celui proche du quotidien des habitants. Mais pendant une campagne, il peut y avoir une forme de réticence à s’afficher proche de telle ou telle liste. Tout est perçu comme « politique », et pas dans le meilleur sens du terme.
Pour les élections municipales de 2020, la ZEP a recueilli les témoignages de jeunes candidats. Car pour s’engager en politique, pas besoin d’attendre la cinquantaine !
1/5 : « Un jeune candidat noir, ça ne laisse pas indifférent »
2/5 : « La politique c’est pas que pour les hommes de 50 ans »
En m’engageant sur une liste, je m’engageais aussi à changer mes modes d’action. J’ai beaucoup milité dans des collectifs pour la transition écologique et sociale : j’ai vécu pendant quatre mois dans une clinique désaffectée à Pontivy avec La Bascule, un mouvement de lobby citoyen. J’étais devant le tribunal administratif de Rennes lors de la procédure contre l’arrêté anti-pesticides de Daniel Cueff et j’ai passé une partie de mon été en tant que volontaire dans un écolieu dans les Cévennes.
Au début j’ai eu un conflit intérieur : est-ce que je suis en train de me trahir ? Mais non. Mes valeurs n’ont pas changé, je change juste de modalités.
Armonia Pierantozzi, 33 ans, candidate aux Lilas (93)
Crédit photo © Armonia Pierantozzi // Visuel La ZEP