Ne me parlez plus de la « journée de la femme » !
À l’attention de celles et ceux qui, le 8 mars, m’ont offert des roses, des bons de réduction dans des magasins de lingerie, de maquillage, de vêtements… pour « célébrer la femme ».
J’ai été profondément déçue, choquée et blessée par vos petites « attentions ». Le 8 mars est la journée internationale de lutte pour les droits des femmes et non pas la « journée de la femme » !
Le 8 mars, pas une Saint-Valentin bis
Le 8 mars n’est pas une Saint-Valentin bis réservée aux femmes. Elle doit et devrait être une journée de luttes, de débats et d’échanges sur la condition des femmes et comment faire avancer l’égalité hommes-femmes.
Il n’y a rien à fêter ni à célébrer, car tant que cette journée existera, cela signifiera que des femmes souffrent encore du sexisme.
Offrir des cadeaux à une femme ce jour-là est aussi déplacé que d’offrir un cadeau à une victime de discrimination raciale le 21 mars, journée de lutte contre le racisme, tout en lui disant : « Le reste de l’année nous te manquons de respect mais tiens, prends ce cadeau pour nous faire pardonner car aujourd’hui, c’est ta journée. »
Vous avez renommé cette journée « journée de la femme », mais pour vous, que veut dire « la femme » ?
À voir vos attentions particulières, « cette femme » est une femme qui se maquille, aime les roses, la lingerie, faire du shopping…
Elle correspond au modèle de papier glacé des magazines, pas à la réalité.
Si je ne me maquille pas, ne porte pas de talons ni de robe, on dit de moi que je ne suis « pas une vraie femme ». Si je prends soin de moi, parle de sorties shopping et de coupe de cheveux, je deviens superficielle. Si je mets une robe et un peu de maquillage dans les transports en commun, je suis presque certaine de subir du harcèlement. Il n’y a pas de « la femme » qui tienne. Nous sommes bien plus que ça.
Dire « journée de LA femme », c’est nous réduire à un seul modèle et nous manquer de respect.
Les droits des femmes, à défendre avec acharnement
Le 8 mars, vous avez méprisé les femmes vivant dans les pays où l’excision est encore pratiquée. Vous avez méprisé les femmes vivant dans des pays où les violeurs sont innocentés s’ils épousent leurs victimes, les femmes vivant dans des pays où elles n’ont pas le droit de vote, toutes ces femmes et filles qui n’ont pas pu ou ne peuvent pas aller à l’école.
Vous me direz qu’en France, pays des droit de l’Homme, l’égalité hommes-femmes est respectée. Le 8 mars, vous avez aussi méprisé 52 % de la population française (oui nous sommes une majorité), parce qu’aujourd’hui, à temps de travail, compétences et niveau d’études égaux, nous sommes, en moyenne, payées 20% de moins.
Nous vivons dans une société où naître avec un vagin plutôt qu’un pénis amène à devoir travailler plus dur qu’un homme pour le même résultat.
Nous vivons dans une société où être une femme signifie que, peu importe ce que nous avons accompli, notre légitimité sera toujours remise en cause. Vous direz que je suis pessimiste, moi je pense que je suis juste réaliste.
Une journée de lutte devenue opération marketing
J’ai 19 ans et je ne me sens pas en sécurité en dehors de mon domicile. Et pour cause, depuis mes 14 ans, je suis régulièrement abordée par des hommes qui ont parfois trois fois mon âge.
J’ai 19 ans et déjà, une de mes amies a subi une agression sexuelle et une autre a été victime de viol. J’ai beau leur répéter que tout ira bien, que ça n’arrivera plus, même moi je n’y crois pas.
Comment leur dire que tout ira bien alors que nos représentants ne prennent même pas la peine de se déplacer pour défendre nos droits. Le 27 juin 2016, un amendement visant à rendre inéligibles les députés déjà condamnés pour violences ou agressions sexuelles a été rejeté par l’Assemblée nationale avec seulement 15 députés présents sur nos 577 élus.
Comment leur promettre que le monde évolue alors que des droits si durement acquis sont encore et toujours remis en cause ?
La journée du 8 mars, c’est pour toutes ces femmes et ces hommes qui se sont battus et se battent encore pour faire avancer l’égalité. Car l’égalité concerne aussi les hommes. Nous n’y arriverons pas sans eux.
Vous nous avez volé notre journée pour en faire une vulgaire mascarade, vous avez fait de la journée internationale de lutte pour les droits des femmes une banale opération marketing. Si vous tenez tant à faire plaisir aux femmes, le 8 mars, pas la peine de nous offrir une rose ou un bon de réduction, commencez déjà par nous traiter avec respect.
Kenza, 19 ans, étudiante, Nantes
Wouah quel article ! Je suis à fond avec toi ! Merci ! <3
Rien n’à ajouter … Merci ❤