Comment je suis devenue « digital native » à 22 ans
« Tu n’étais pas au courant que Madame Machin était absente ? Ah oui, c’est vrai, tu n’as pas Facebook ! » Eh oui. Je suis la seule à être venue en cours alors que la déléguée avait posté un message sur le groupe de la classe pour prévenir de l’absence.
22 ans et pas de profil Facebook
J’ai toujours eu dix ans de retard. Au collège, je n’avais pas MSN. Au lycée, je n’avais pas de portable. A la fac, je n’avais pas de smartphone.
Mais en moins d’un an, tout s’est accéléré, et en 2015, j’ai fait ma révolution numérique : je suis entrée dans le XXIe siècle.
Un peu contre mon gré. Je me suis créé un profil Facebook il y a moins d’un an, quand j’étais seule en Allemagne, sans mes amis bienveillants pour me tenir au courant des sorties Erasmus ou des anniversaires de potes. « Tu verras, tu seras obligée d’y passer », m’avait-on dit, avec une pointe de moquerie. C’est vrai que je n’étais pas fière, moi qui tenais de grands discours sur la pauvreté des relations virtuelles, de rentrer finalement « dans la norme ».
J’aime à dire que j’ai créé mon compte Facebook par instinct de survie.
Parce qu’isolée, à l’étranger, si tu veux garder contact avec des personnes tout juste rencontrées, Facebook est un formidable moyen de créer du lien. J’ai franchi le cap un soir de novembre, dans ma chambre à Leipzig : je me suis créé un compte Facebook.
Un monde s’est ouvert devant moi, et chacun y allait de son petit commentaire :
« Quoi, Louise, tu es sur Facebook ??? »
« Waouh, t’es connectée dis-moi XD !»
« Bienvenue au XXIème siècle. »
Je me sentais comme une gosse à Noël avec son nouveau jouet : j’ai retrouvé d’anciens camarades de classe, des amis perdus de vue, même d’anciens profs !
Alors vous imaginez quand j’ai eu un smartphone il y a un mois, ça a été encore une grande avancée !
« Génération connectée » ? Ca me fait sourire
Faut dire que même ma mère commençait à avoir pitié de moi. Je me trimballais un portable qui m’avait coûté 6 euros, le basique de chez basique. Mais ça me suffisait, il faisait SMS et appels, avec un joli petit fond d’écran à palmiers.
Je revois ma mère me dire : « Ecoute, je t’achète un smartphone, tous les jeunes ont ça, c’est pratique quand même ! ».
Même ma maman était plus XXIe siècle que moi.
J’ai découvert les joies du smartphone : l’appareil photo à portée de main, la boîte mail dans sa poche, le T9… Le T9 ! Jamais je n’ai écrit aussi vite ! Mes potes n’en revenaient pas de l’explosion du nombre de SMS que je leur envoyais.
« Mais Louise, tu deviens accro ! »
Accro ? Moi ? Alors que mon nombre total d’heures passées sur Facebook doit égaler celui de certains collégiens ?
Alors quand on me parle de « génération connectée », ça me fait sourire. T’as beau être née en 1993, les premiers pas sur la toile et les réseaux sociaux ne sont pas évidents pour tout le monde, et parce qu’on a aussi le droit de ne pas vouloir suivre le mouvement.
On ne naît pas connecté, on le devient, et on le devient parfois à reculons.
Avant d’avoir Facebook, je n’en avais pas besoin. Avant d’avoir un smartphone, je n’en avais pas besoin. Maintenant, faire marche arrière serait plus compliqué.
Et tout bien réfléchi… je n’en ai pas envie.
Louise B., 23 ans, étudiante en allemand, Strasbourg
Crédit photo Pexels
Ton témoignage m’a fait sourire et m’a rappelée un peu mon vécu !
Ayant un handicap qui m’empêche d’écrire manuellement, j’ai commencé l’ordinateur dès la maternelle. Pourtant mes parents étaient très frileux, limite parano avec tout ce qui concernait internet. Pendant toute ma scolarité jusqu’au lycée, je n’avais pas le droit à Internet, je faisais mes recherches sur la vieille Encyclopédie (totalement disparue) Encarta. Donc, pas de MSN au collège alors que mes amies me saoulaient avec ça. J’ai eu droit à Internet à 16 ans.,et ayant été mise en garde jusqu’à la nausée contre les fameux réseaux sociaux, j’ai longtemps dédaignée Facebook, Twitte…etc, et même les forums de discussion. Mes parents disaient que c’était dangereux , et moi je les croyais. Je me souviens de la première fois où j’ai osé poster un message sur un forum ! J’avais vraiment la trouille d’avoir fait une connerie !
Le téléphone, c’est pareil : Mon 1er portable à 18 ans. Quant à Twitter, je me suis inscrite il y a seulement 4 ans et Facebook, il y a un an par nécessité.
Quant à mes frères et sœurs, ils ont été privés de jeux vidéos, consoles et autres pendant des années.
Aujourd’hui ,nous les jeunes, avons réussi à faire totalement fondre les préjugés de nos parents sur le numérique. Ma mère regarde même des vidéos de « Gamers » et ça la fait rire. Elle a même joué un peu avec mon frère. De fait, ma petite sœur a beaucoup plus rapidement accès à la technologie que moi à son âge