2/4 L’amour parti en fumée
Il est venu me voir direct après les épreuves du bac. Peu à peu, on a commencé à se rapprocher physiquement. Puis on s’est mis officiellement en couple. On a passé un de mes meilleurs étés ensemble, en faisant beaucoup de sorties à deux. On se posait avec un autre couple. On regardait des films. C’est là qu’il a commencé à bédave devant moi, et que j’ai essayé aussi. Le shit, ça nous a mis dans un mood de merde. On est devenu un couple de bédaveurs.
Dès le départ, je lui avais posé mes bases : pas de remise en cause de mes tenues, ni de jalousie oppressive. Je voulais du respect.
Peu à peu, on a moins traîné en groupe, par flemme. On passait notre temps à fumer dans la tchop et on se faisait livrer des UberEats. On était nés exactement à la même date, donc on a fêté notre anniversaire ensemble. Avec le temps, on a eu beaucoup de problèmes de compréhension. Un jour, on est allés au grec ensemble. J’avais un gilet long et un jean. Il a cru qu’un mec me regardait et il est parti d’un coup, en me laissant en plan. Je me suis retrouvée à pleurer toute seule dans le grec, en me demandant ce que j’avais fait de mal alors que rien. On a fini par rentrer sans manger.
« Le vice s’est installé »
C’était de la jalousie maladive. Il me prêtait des intentions, alors que pour moi tout allait bien. Il me demandait d’envoyer des photos de mes tenues tous les jours, même quand j’allais au sport. Et c’est allé de plus en plus loin. Le vice a commencé à s’installer. Je devais dire où j’allais, avec qui j’étais et qui je croisais. Je devais tout le temps prouver que je faisais une sortie normale en envoyant des photos. J’ai carrément arrêté d’aller au sport pour éviter qu’il me fasse des phases.
Je n’arrivais pas à arrêter de fumer et ça m’a porté préjudice, même après lui. C’est devenu un médicament pour régler nos conflits. Un matin, je devais partir à la mission locale. On s’est pris la tête et il m’a poussée. Je me suis pris un miroir sur le pied qui m’a coupé le tendon de l’orteil. J’ai dû rester chez moi un mois et demi pour m’en remettre. Immobilisée, je restais assise toute la journée et j’ouvrais la porte à l’infirmière avec une chaise de gamer à roulettes.
« Ma mère avait peur pour moi »
J’ai commencé à trouver ça chaud comme relation, mais j’étais en dépendance affective et j’avais aussi des galères pro. Cet événement m’a perturbée, ça a créé une cassure dans notre couple. Ma mère aussi avait peur pour moi. Elle se disait que carrément il pouvait tuer sa fille.
Quelques mois plus tard, j’ai eu le déclic. Il est venu chez moi en puant l’alcool. Ensuite il a été violent une nouvelle fois, chez lui. Il m’a pété la lèvre. Je lui ai dit : « Tu vois que ça va pas. Tu te remets pas en question. » À chaque fois, il s’excusait. Je revenais. Il repartait en couilles derrière. Il ne changeait pas.
Ça s’est définitivement terminé quand il m’a menacée de mort par téléphone. J’ai ressenti tellement de tristesse que j’ai vite perdu mes sentiments. J’ai voulu couper court et m’en sortir toute seule. Sans lui pour m’encourager à fumer. Aujourd’hui, je passe mon permis et je vais reprendre mon BTS communication. Depuis qu’il n’est plus dans ma vie, elle avance mieux.
Yanissa, 22 ans, volontaire en service civique, Corbeil-Essonne
Illustration © Camila Plate
Série Violences conjugales jeunes : quitter le mâle, Récit 3/4 : Jetée sur le bord de la route
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