4/5 Une séance de prévention, mais pas de sanction
Trois intervenants nous ont montré des témoignages sur des personnes qui se faisaient harceler. Pour inciter les élèves à ne pas harceler car ça pouvait engendrer des difficultés scolaires et un impact négatif sur la santé. Ils nous disaient : « Certaines de ces personnes envisageaient même de se suicider, alors il faut être très vigilants. » Ils nous parlaient aussi des personnes qui se sentaient mal dans leur peau et qui ne voulaient pas venir au collège. Les trois intervenants ont conclu en disant : « Faites attention, vous êtes jeunes, vous ne pensez pas forcément aux conséquences de ce que vous faites. » Mais ça n’a pas été très utile : mes camarades n’étaient pas attentifs.
Lors de cette intervention contre le harcèlement en cinquième, je ne pensais pas que j’allais en subir.
Je lui ai dit qu’il y avait une fille qui me harcelait
Quelques mois après, en rentrant chez moi, j’ai pris mon téléphone et j’ai aperçu plein de messages sur Snap. Une personne de ma classe m’avait envoyé des vocaux qui disaient clairement : « J’ai pas envie que tu sois déléguée parce que tu l’as été ces dernières années, alors je vais dire à toutes la classe de ne pas voter pour toi et, s’il le faut, je me présenterai pour que tu ne sois pas déléguée. » Elle a poursuivi en m’envoyant des vocaux avec des rires méchants. Elle a continué : « Personne ne t’aime dans la classe et moi je te déteste, tu n’es pas intelligente. » Ce harcèlement a duré trois mois par messages et elle m’affichait devant la classe.
Né sur les réseaux sociaux à la rentrée scolaire, le #Anti2010 a souligné la gravité et l’ampleur du cyberharcèlement à l’école. Si vous êtes concerné·e, la Cnil (Commission nationale de l’informatique et des libertés) vous explique comment réagir.
La seule chose que le collège a mis en place lorsqu’on subit du harcèlement, c’est de se confier auprès de l’infirmière. C’est la principale qui nous l’a dit en début d’année. Alors, je lui ai dit qu’il y avait une fille qui me harcelait. Elle m’a dit qu’il serait temps d’en parler à mes parents. La direction a reçu un mail de mes parents expliquant la situation, mais ils n’ont pas mis de sanction à la fille. J’ai trouvé ça inadmissible.
La principale ne pouvait « rien faire de spécial »
L’infirmière en a parlé à la CPE, et j’ai eu un rendez-vous avec elle et la fille qui me harcelait. Je me suis portée volontaire pour expliquer la situation. La personne concernée disait : « Je ne l’ai jamais harcelée, je lui ai juste dit que je n’étais pas d’accord avec elle. » Donc j’ai sorti mon téléphone et j’ai fait écouter à la CPE tous les vocaux qu’elle m’avait envoyés. Elle a dit : « Tu lui a fait subir du harcèlement, ce qui est interdit au collège et tu le sais très bien. Tu n’as pas à l’afficher et à la harceler de vocaux, c’est inadmissible. »
Une semaine après, mes parents ont reçu un appel du collège disant que mes parents et moi avions rendez-vous avec la principale et la CPE. Elle m’a dit qu’elle ne pouvait rien faire de spécial. Alors je lui ai dit que je voulais changer de classe dans l’urgence totale. Nous avons procédé au changement le lendemain.
Une seule séance d’intervention, c’est inefficace
Après ce jour-là, rien d’autre n’a été mis en place. Il n’y a jamais eu de de nouvelles interventions, et les professeurs n’ont plus jamais abordé ce sujet. C’est inefficace de mettre en place une seule séance d’intervention pour alerter l’infirmière. Les élèves ont besoin de plus, afin d’être mieux conseillés ou informés.
Pour Tifenn, victime de harcèlement scolaire, parler avec sa directrice l’a sauvée : la confrontation avec ses harceleuses a permis d’arrêter les insultes.
Je ne me suis pas sentie bien prise en charge, car l’infirmière ne m’a pas vraiment donné de conseils. Malheureusement, depuis, le système d’intervention n’a toujours pas changé…
Jenny, 14 ans, collégienne, Mantes-la-Jolie
Illustration © Merieme Mesfioui (@durga.maya)