Whitney F. 20/10/2021

2/2 « Ah bon ? Il y a des filles dans le foot ? »

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Whitney a envoyé bouler les conventions sur sa féminité. Elle, c'est en jouant au foot qu'elle prend du plaisir.

Je m’habille plutôt streetwear années 90, pas de style particulier mais plutôt overwear, des vêtements pas genrés quoi, mixtes. Ça ne m’a jamais posé de problème, sauf au moment où on me manquait de respect : « Est-ce que tu es une fille ou un garçon ? » Alors que j’avais 12–13 ans ! C’est plutôt les adultes, les profs à l’école ou en famille, qui me demandaient de « mettre une touche de féminité ». Plein d’autres choses comme ça, alors que, moi, ce n’est pas comme ça que je me vois. En tout cas, ça m’a forgée pour la vie.

Favoriser l’accès au foot pour les filles et les femmes, c’est le but initial du Gadji FC, une équipe de foot féminine amateur. Les joueuses organisent régulièrement des matchs dans les quartiers pour s’entraîner. Rencontre avec Manon, artiste et fondatrice du club :

Ma mère m’a toujours dit : « Tu es unique et différente, et tu déranges ! Si on ne t’avait pas faite, faudrait t’inventer. » C’est bien dit. Le bail, c’est que je n’aime pas mettre les atouts de la femme en avant, à part dans le sport. Depuis petite, j’ai mon propre style, ce qui fait que les gens me voient comme un « garçon manqué ». Mais ce n’est pas parce que je ne mets pas de talons, de jupes, de robes, et j’en passe, que je ne suis pas une femme.

Dans le foot, l’homme est comme le Saint Graal

Dans le sport aussi, je l’ai ressenti. J’en ai pratiqué plusieurs, dont un où je savais que c’était mon sport depuis le ventre de ma mère : le foot. C’est ma passion. J’ai commencé dans un club à Paris, dans le 19e arrondissement, au stade Ladoumègue. Ce n’était pas facile au début car il n’y a pas de sections féminines, et très peu de filles y jouent au foot. Beaucoup disaient que c’est un sport d’hommes… Dans le sport, l’homme est représenté comme le Saint Graal.

Mais j’ai fait mes preuves ! J’étais capitaine de mon équipe en poussins jusqu’en minimes en football mixte. J’ai reçu beaucoup d’encouragement et de soutien. Mais les mauvaises langues sont apparues en cadet, à 11–12 ans. C’était plutôt les entraîneurs de l’époque. Les parents des garçons faisaient aussi des remarques parfois. « Tu ne seras pas la joueuse que tu veux être, le foot c’est un sport de garçon » ; « Ah bon ? Il y a des filles dans le foot ? »

Ça ne m’a pas empêchée de m’impliquer et de me dépasser jusqu’en seniors féminines au Paris FC. On m’a beaucoup questionnée sur mon genre, et c’est dans le foot que c’était le plus agaçant.

Ma place dans le monde a été mise à rude épreuve. On m’a casée dans une boîte, alors que je suis juste une femme différente de celles qu’ils veulent. Un de mes rêves est de créer un centre sportif spécialisé en football féminin, en Afrique et par la suite à l’international. Ouvrir des dispositifs pour les jeunes femmes, toujours dans le sport, entre une école et un centre de formation. Je voudrais pour le futur que les femmes soient au même niveau que les hommes dans n’importe quel domaine.

Whitney, 25 ans, en formation, Paris

Crédit photo Unsplash // CC Joppe Spaa

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