Shainez S. 30/05/2025

2/2 Enfant solo

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Shainez vit seule avec sa mère. Loin de l'image de l’enfant unique et gâtée, elle a dû se responsabiliser très tôt.

« Maman, j’aimerais que tu passes plus de temps avec moi. Signé : ta fille qui t’aime. » Il n’y a pas longtemps, j’ai retrouvé une lettre adressée à ma mère que j’avais écrite plus jeune. J’ai eu les larmes aux yeux. Petite, j’étais déjà consciente de la réalité. 

J’ai grandi avec ma mère. Mon père était absent. J’ai été seule très jeune. Dès l’école primaire, je me couchais seule et je dînais seule. Je mettais mon pyjama et me couchais à la bonne heure. Ma mère travaillait énormément pour s’en sortir. Elle pouvait travailler de nuit ou combiner deux emplois à la fois. Je ne lui en ai jamais voulu parce que je sais qu’elle faisait ça pour moi. 

Elle avait beaucoup de choses à gérer. Elle a dû assumer le rôle d’un père et d’une mère, entamer les démarches du divorce, ainsi que celles liées aux violences conjugales et à l’expulsion de mon père. Elle était très souvent occupée et j’ai toujours fait attention à ne pas lui apporter des problèmes supplémentaires. Aujourd’hui encore, j’ai toujours la crainte de la déranger. Ça a beaucoup joué sur ma manière de faire et d’agir. 

Je n’ai pas eu d’épaule sur laquelle m’appuyer. J’ai appris à prendre sur moi, à trouver des solutions et gérer des problèmes seule. J’ai été très rapidement responsabilisée. J’ai appris à faire à manger, ranger et faire le ménage toute seule. 

La vie des autres

Depuis toujours, quand nous sommes toutes les deux dans l’appartement, nous sommes chacune de notre côté. Aucun bruit dans l’appartement. Chacune mange de son côté. Je reste dans ma chambre et elle, dans le salon. Lorsque je me retrouve chez des amies, ça me fait un choc. Voir des frères et sœurs jouer ensemble ou bien même se chamailler me provoque de l’envie. Je perçois ça comme un monde parallèle. Je n’ai pas connu une maison chaleureuse et remplie de vie. 

Quand je dis que je suis fille unique, les gens entendent : ne rien partager, ne pas se prendre la tête, avoir de la tranquillité, être pourrie gâtée. Je suis loin d’être pourrie gâtée. Mais je suis très reconnaissante d’avoir une mère qui a toujours essayé de m’offrir ce que je voulais. 

J’ai quand même su trouver un bon entourage. C’est comme si j’avais créé ma propre famille. J’ai souvent considéré mes amis comme les frères et sœurs que j’aurais aimé avoir. Ils sont des repères pour moi. Parfois, je ne me sens plus vraiment enfant unique. 

Shainez, 17 ans, lycéenne, Yvelines

Crédit photo Pexels // CC cottonbro studio

 

Slash Grandir trop tôt, récit 1/2 : La deuxième maman de la famille 

Quand sa mère travaille, Ava la remplace à la maison. À 17 ans, la jeune fille s’occupe de ses six frères et sœurs tous les soirs.

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