Elias M. 07/05/2024

1/2 Une famille d’accueil en or

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Abandonné par ses parents à la naissance, Elias, 18 ans aujourd’hui, a été accueilli par une super famille. L’épreuve de l’abandon a renforcé ses liens avec ses frères de sang.

Une semaine après ma naissance, je suis placé en famille d’accueil. Comme début dans la vie, il y a mieux. Le temps passe. Je crois que si je vis bien la situation, c’est parce que mes parents  adoptifs  ne m’ont jamais caché le fait que je ne suis pas leur « vrai » fils. Depuis tout petit, j’ai la chance d’être dans une famille d’accueil exceptionnelle. Je reçois beaucoup d’amour, je suis chouchouté, je ne manque absolument de rien.

Jusqu’à mes 10 ans, j’ai reçu des visites de mes géniteurs un week-end sur deux. C’est là que j’ai rencontré mes trois autres frères, tous plus âgés que moi. À 10 ans, mes géniteurs n’ont plus souhaité venir. Au début, je n’ai pas compris leur décision. Est-ce que je suis le problème ? Je ne suis pas assez bien pour eux ? Je suis hyperactif, super agité, est-ce que c’est ça le souci ?

« Êtes-vous sûr de vouloir abandonner vos enfants ? »

La dernière fois que je les vois, c’est à l’âge de 10 ans, lors d’une audience avec le juge pour enfants au tribunal. Nous sommes dans une grande salle avec le juge, mes trois autres frères et nos géniteurs. Il y a également mes parents adoptifs. L’ambiance est vraiment lourde. Je suis stressé, je ressens beaucoup de pression.

Je me souviens plus particulièrement du moment où le juge prononce les mots suivants en s’adressant à mes géniteurs : « Êtes-vous sûrs de vouloir abandonner vos enfants ? » Je ne comprends pas tout de suite le sens de cette phrase alors je me retourne vers mes parents d’accueil. Ils me regardent avec tristesse, les larmes aux yeux. C’est là que je saisis l’importance du moment. La suite de ma vie est en train de se jouer ici et maintenant. Mes géniteurs m’ont regardé dans les yeux puis se sont tournés vers le juge, et ils lui ont répondu : « Oui, nous sommes sûrs. »

Mes parents adoptifs ont fondu en larmes, tout comme mes grands frères. Tout le monde a pleuré et moi j’étais dans l’incompréhension, totalement perdu. À la fin de l’audience, mes géniteurs m’ont pris dans leurs bras et m’ont dit : « Désolé. » Je leur ai souri et répondu que ça n’était pas grave. C’est le tout dernier moment que j’ai passé avec eux.

Des liens très forts avec ses frères

Le temps m’a donné quelques réponses à la question : « Pourquoi mes parents nous ont-ils abandonnés ? » Ils nous ont abandonnés parce qu’ils n’étaient pas apte à prendre soin de nous. C’est ce que j’ai compris en prenant connaissance de mon dossier d’abandon à 18 ans. D’autres interrogations restent sans réponse, comme : « Pourquoi ont-ils préféré garder et élever ma grande sœur ? Pourquoi ont-ils fait le choix de nous abandonner, mes grands frères et moi ? »

Le temps m’a aussi permis de créer des liens très forts avec mes frères. On se voit souvent, au moins trois à quatre fois par semaine et à des occasions spéciales, comme les anniversaires et le Nouvel An. Cette épreuve de l’abandon, on l’a traversée ensemble et elle a renforcé nos liens. On sait qu’on ne se lâchera jamais.

Enfant placée, Marie vit dans une Maison d’enfants à caractère social et a peu de contact avec sa mère. C’est là qu’elle a tissé des liens « plus forts que ceux du sang » avec sa grande sœur de cœur. C’est là aussi qu’elle prend soin des plus jeunes.

Capture d'écran du deuxième article du slash : "Comme des frères à la MECS". Il est illustré par une photo de deux enfants, pris par le haut. Ils sont assis côte à côte, regardant un seul et même téléphone, posé sur les genoux de l'un d'entre eux.

Ma grande sœur essaie de revenir vers mes frères et moi mais nous avons beaucoup de mal à l’intégrer en tant que sœur. Je pense que je ne pourrai jamais la considérer comme telle. Elle n’a pas connu ce que nos frères et moi avons subi. Je n’ai jamais eu le temps d’apprendre à la connaître. Peut-être que la situation va évoluer.

J’ai également des frères et des sœurs adoptifs incroyables. Je n’ai pas été baladé de famille en famille, ni été placé en foyer. Je réalise aujourd’hui à quel point j’ai eu de la chance d’avoir été élevé par deux parents formidables.

Elias, 18 ans, étudiant, Lens

Crédit photo Pexels // CC Andrea Piacquadio

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