L’Alzheimer de ma grand-mère, on vit tous avec
Depuis petite, je vis avec la maladie d’Alzheimer. Ma grand-mère maternelle en est atteinte. Quand je lui raconte mes histoires ou mes journées, elle m’écoute mais change de sujet sans vraiment s’intéresser à ce que je lui raconte. Elle ne reconnaît plus ma tante (qui est sa fille), elle imagine que c’est sa sœur, et elle imagine que mon oncle est son mari à elle… Elle confond les rôles, c’est assez spécial. Une nuit, en 2019, avant qu’elle s’installe dans un Ehpad, elle a disparu. Mes parents ont dû appeler les gendarmes et on l’a retrouvée le lendemain matin.
J’ai toujours vu ma mère aider ma grand-mère, dans toutes les situations possibles, même quand ma grand-mère était méchante avec elle. Elle n’a jamais baissé les bras, elle a craqué plein de fois, mais elle est super forte. Elle l’aidait pour faire ses repas, pour s’habiller, se mettre en pyjama, pour se promener, pour faire un café… Toutes les tâches quotidiennes basiques pour nous.
Quand ma mère a un coup de mou, mon père prend le relais
En plus de ma mamie, ma mère s’occupe aussi de nous, ses trois enfants. Mon père a toujours été présent pour elle, il l’a toujours accompagnée. Quand ma mère avait un coup de mou, il allait voir ma mamie à sa place ou alors ils y allaient tous les deux pour que ce soit plus facile pour ma mère. Et il s’est toujours occupé de nous quand ma mère ne pouvait pas.
Le collectif Alzheimer Ensemble Construisons l’avenir a publié un guide pratique à destination des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, leurs proches et les personnes qui les côtoient au quotidien. Les objectifs : sensibiliser, informer, et bâtir une société plus inclusive pour les personnes malades.
https://twitter.com/CollectifAlzEns/status/1339617603900362754
À l’adolescence, je me suis sentie un peu délaissée. J’avais l’impression que ma mère n’avait pas assez de temps pour moi : pas le temps pour faire des activités ensembles, comme du shopping, aller rendre visite aux autres membres de la famille, passer du temps avec mon père, mon frère et ma sœur, comme une vie de famille quoi. Tous les soirs, après le travail, ma mère va voir ma grand-mère. Elle passe au moins deux heures avec elle. Surtout ces deux dernières années, maintenant qu’elle est en Ehpad.
Notre famille s’est soudée autour de son Alzheimer
En grandissant, j’ai pris conscience de l’impact de la maladie, du fait qu’on en subissait tous les conséquences à cause du stress, de la pression, de ne jamais savoir dans quel état d’esprit serait ma mamie d’un jour à l’autre… J’ai compris que cette maladie, il ne fallait pas la prendre à la légère. Surtout quand je voyais que ma mamie avait de plus en plus tendance à confondre des objets, qu’elle avait de plus en plus de mal à réaliser les tâches de la vie quotidienne. Mais aussi qu’à cause de cette maladie, la famille s’était soudée, malgré les disputes. La famille aurait pu se déchirer de nombreuses fois mais ça n’a fait que la rendre plus forte. J’ai dit à ma mère de ne pas tout laisser tomber. Mes parents m’avaient dit que ma grand-mère serait toujours comme ça, voire pire, donc je me suis dit que si ma mère aidait ma mamie, c’était pour son bien. On va dire que je m’y suis faite, petit à petit.
Être aidant.e, c’est une tâche à plein temps, quelle que soit la maladie. Lucy et sa maman ont décidé de se battre aux côtés de son père, malade du sida.
Et puis, en grandissant, j’ai voulu faire comme ma mère et aider ma grand-mère. C’est comme si j’imitais ma mère, sauf que ce n’était pas un jeu. Grâce à elle, j’ai trouvé mon orientation. Depuis mes 12 ans, je veux travailler dans le secteur social, je suis actuellement en BTS SP3S (services et prestations des secteurs sanitaire et social) et j’ai pour projet de devenir conseillère en économie sociale et familiale. J’ai voulu faire comme ma mère, et j’ai décidé d’en faire mon métier.
Adeline, 18 ans, étudiante, Brest
Crédit photo Unsplash // CC Dominik Lange
Putain de maladie
Génial ma fille ta grand mère malgré sa maladie on tient à elle