Chloe C. 19/01/2019

J’ai commencé à boire pour me faire accepter

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J'ai commencé à boire de l'alcool pour me faire accepter des autres. Jusqu'à la cuite de trop... La maturité aidant, j'ai appris à boire avec modération et par plaisir.

Au départ, j’étais fière de ne pas boire. Je me sentais différente et je pensais que c’était un atout. Je parle au passé car tout a changé à la fin de l’été 2016. L’été avant de m’installer définitivement à Paris est l’été de ma première cuite.

J’ai vécu 18 années dans un village de 3500 habitants avant d’arriver à Paris. J’ai passées mes années lycées entre chez mes grands-parents et mes parents. J’avais très peu d’amis et les soirées lycéennes, je n’y étais tout simplement pas conviée. Je me sentais rejetée, mise à l’écart. Je pensais être différente des autres filles, je ne m’intéressais ni aux garçons, ni à l’alcool, ni à la drogue. J’ai d’ailleurs détesté mes années lycées. Toutes ces raisons m’ont poussée à partir le plus loin possible.

Nouvelle école, nouveaux amis, nouveau départ

J’ai quitté ma province pour Paris, ma ville de cœur, ma ville d’accueil. J’y ai passé toutes mes vacances pendant ma terminale car c’était là-bas que je me sentais vivante. Paris abritait aussi un amour de jeunesse et une amie chère. Plus rien me retenait dans mon village, si ce n’est mes parents. Mon père a eu beaucoup de mal à me laisser partir, moi sa seule fille.

J’ai quitté le nid et je suis arrivée courant 2016 en région parisienne : nouvelle école, nouveaux amis, nouveau départ. Pourtant, le malaise social continuait de me tourmenter.

Un soir, avec une amie, on a décidé de se joindre à une fête dans un club sportif. Comme à mon habitude, je refusais tout verre d’alcool. Même si les gens ne comprenaient pas, je suivais mes convictions. Refuser les verres et tenir mon discours « je ne bois pas, je n’aime pas ça et c’est mauvais pour la santé » me rendait fière, ainsi que ma mère. Il faut savoir que ma mère ne boit pas une goutte d’alcool. Enfin si, elle boit une coupe de champagne, et elle a mal à la tête. Donc l’alcool, elle évite.

Un autre jour, on se baladait sur les quais de Seine quand on a croisé les garçons qu’on avait rencontrés à la soirée du club sportif et on a décidé de se joindre à eux. Les garçons ont offert un verre, puis deux à mon amie. Je refusais de boire, j’écoutais les autres et plus le nombre de verres augmentait, plus leur comportement changeait. Les garçons ont commencé à chanter et parler fort. Les gens semblaient comme dépossédés de leur sens, intelligence, personnalité.

C’était ma première cuite

Vers minuit, on a rejoint mon cousin à une soirée qu’il organisait chez lui. J’étais très déçue de mon début de soirée, j’avais encore cette impression d’être rejetée. Déjà, parce que je ne buvais pas, mais surtout parce que je pouvais pas comprendre leurs « délires ». On a commencé à jouer à des jeux d’alcools (pyramide, tu perds tu tises, ou le fameux beer-pong) et au départ, jouer avec des softs était plutôt convivial, tout le monde rigolait. Mais j’ai vite remarqué que j’étais exclue, malgré moi, car la boisson dans mon gobelet était différente de la leur. Je me sentais mise à l’écart. Je ne comprenais pas les effets de l’alcool sur le corps et le cerveau, puisque je n’en consommais pas.

Alors, j’ai décidé de goûter un premier cocktail (vodka, jus d’orange et grenadine). Une fois la première gorgée avalée, j’ai senti le liquide m’anesthésier la gorge : «  BEURK, mais comment font les gens pour boire ce truc infâme ? » La pression sociale que j’avais subie des mois durant est immédiatement retombée, je me sentais plus mature avec mon gobelet en plastique entre les doigts. J’ai continué à siroter mon verre en grimaçant tant le goût était fort. C’était ma première cuite.

Je n’ai pas bu en grande quantité mais suffisamment cette fois-ci pour me sentir différente. Quand on boit en quantité suffisante, on perd vite le contrôle de nous-même. J’ai commencé à faire et à dire des choses que je n’aurais jamais osées en temps normal. Je suis allée jusqu’à insulter une pote car je ne me contrôlais pas et que ce soir-là mon alcool n’était pas bon. Je peux vous assurer que mon amie s’en rappelle encore et que je ne suis pas du tout fière de cette épisode. J’ai failli perdre une amie chère à mes yeux à cause d’une boisson qui m’a fait perdre mes moyens.

Je bois par plaisir

Aujourd’hui, mon rapport avec l’alcool a beaucoup évolué. L’alcool a arrêté d’être un objet de socialisation le jour où je me suis rendu compte que mes amis m’aimaient pour ce que j’étais, par pour ce que je pouvais prétendre être. Ça fait maintenant une bonne année que boire de l’alcool est devenue une pratique banale. Mais des séquelles sont restées : depuis ma première cuite, je suis incapable de boire de l’alcool fort (et c’est pas plus mal). A contrario, j’ai pris plaisir à découvrir de nouveaux alcools tels que la bière ou le vin, j’en consomme occasionnellement quand je suis avec mes amis ou à certains diners en famille.

Chloë se contrôle, Mathilde, elle, n’a pas réussi. Résultat : « 15 ans, une plage, des potes et un coma éthylique »

Je ne bois plus pour me sentir intégrer à un groupe, mais par plaisir. La maturité et la confiance que j’ai pu acquérir durant mes deux premières années d’études supérieures m’aident à me contrôler. J’ai bu mes premiers verres d’alcools, car je ne me sentais pas intégrer à mon groupe d’amis, j’ai bu mes premiers verres d’alcool pour plaire. Bref, j’ai commencé à boire pour être acceptée.

 

Chloë, 20 ans, étudiante, Paris

Crédit Photo Pixabay // CC0 Free-Photos

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