Ilhem 23/01/2019

Je suis footballeuse, et alors ?

tags :

Pendant huit ans, j'ai fait, contre mon gré, « un sport de fille ». Puis, à 13 ans et contre l'avis de mes parents, je réalise mon rêve : jouer au foot dans une équipe féminine et me qualifier pour des championnats.

Je suis footballeuse. J’ai commencé à jouer dès mes 3 ans avec mon grand frère, autant à la maison que dehors. Petite, je regardais les matchs à la télé, je jouais à Fifa, c’était vraiment plus qu’une passion : plus je grandissais et plus j’avais cette envie de m’inscrire en club. J’ai fini par le demander à mes parents : déception, ils ont refusé sous prétexte que le foot « c’est un sport de garçon ».

J’étais une enfant assez active donc il fallait que je fasse un sport. L’année de mes 5 ans, ma mère m’a inscrite… à la gymnastique rythmique ! Pendant huit ans, j’ai pratiqué un sport que je n’aimais pas du tout.

Quelle émotion la première fois que j’ai joué en équipe !

Quand je suis arrivée au collège j’ai commencé à faire plusieurs sports avec l’association sportive de mon collège et j’ai arrêté la GRS. Puis, à 13 ans, une amie m’a emmenée à son entrainement de foot féminin dans le club de notre ville (Gennevilliers). Je m’en souviens comme si c’était hier. Je me suis entraînée avec les filles et j’étais vraiment émue, excitée. L’entraîneur est venu me voir à la fin avec une fiche d’inscription. Je me suis dit que c’était le bon moment pour faire mes preuves. J’ai rempli la feuille, je suis allée chez le médecin pour avoir un certificat et j’ai fait du babysitting pour payer les frais d’inscription qui étaient de 200 euros pour l’année.

Une fois inscrite, je l’ai annoncé à mes parents. Ils étaient énervés, mais j’étais tellement heureuse ! C’était plus fort que moi. Petit à petit, ils ont commencé à accepter la situation et à m’acheter mon équipement. Comme toutes les filles avec qui je joue, j’ai toujours dû aller dans les rayons « garçons » pour trouver mes survêtements, mes crampons, mes protections…  Car il n’y a pas de gamme de foot féminin dans les magasins de sport. C’est injuste, car les femmes jouent même à un niveau professionnel !

À partir de là, je n’ai jamais raté un entrainement. Comme l’entraîneur a vu que j’étais déterminée et que je progressais très rapidement, je suis devenue titulaire alors que je venais juste d’avoir 14 ans, et j’ai pu jouer tous les matchs. On avait une équipe vraiment superbe avec quatre entraîneurs, tous des hommes jeunes, en or, qui nous donnaient les meilleurs conseils.

Pour dépasser ces préjugés, j’ai transgressé les « règles »

C’est avec les garçons de mon âge que j’ai rencontré le plus de difficultés. Ils jugeaient tous les jours notre équipe négativement, jusqu’à ce que l’on remporte plus de coupes et de médailles qu’eux ! Quand on a démontré notre niveau, ils ont voulu jouer avec nous et même disputer des matchs.

J’ai déjà assisté à plusieurs matchs d’équipes professionnelles masculines. Les supporters, les stades remplis, c’est une ambiance incroyable. J’en ai à chaque fois des frissons. Les places coûtent de 30 à 4000 euros, ce qui est un grand contraste avec les matchs féminins où les gradins sont presque vides, et les places descendent jusqu’à cinq euros. Avez-vous entendu parler de la coupe du monde de foot féminin qui va se passer en France en juin 2019 ? Probablement pas. Il n’y a eu aucune diffusion : pas d’affiche, pas de pub. Je suis sûre et certaine que si l’équipe de France féminine remporte la coupe l’année prochaine, on en entendra parler, mais bien moins que les hommes. Sinon, il n’y aura rien, aucun soutien, aucune information dans les médias.

Aziza a elle aussi dû batailler pour imposer à sa famille (et aux garçons de son quartier) son goût pour le foot : Le foot au féminin, c’est toujours pas gagné !

C’était la même pour mon équipe :  parfois, les gradins étaient vides ou les gens ne venaient nous voir que s’il y avait des matchs masculins à côté. À 14 ans, avec mon équipe nous avons remporté tous les tournois, ainsi que le championnat départemental, puis le championnat régional. C’était vraiment la plus belle période de ma vie.

Je retiens de cette expérience qu’il faut faire ce qu’on veut pour pouvoir avancer sans regrets, quitte à le faire en cachette. On peut en parler à quelqu’un de confiance car avoir un soutien dans ces moments fait toujours du bien. J’avais un objectif et je l’ai atteint en me disant que les hommes ne sont pas supérieurs aux femmes. Pour dépasser ces préjugés, j’ai transgressé les « règles ».

On a beau se révolter, on ne sera jamais entendues par la société, donc il faut agir directement et saisir les opportunités, en vivant sans regrets. Grâce à cette expérience, aujourd’hui, à 17 ans, à chaque fois que j’ai envie de faire quelque chose, je le fais !

 

Ilhem, 17 ans, étudiante, Gennevilliers

Partager

8 réactions

  1. J’aime jouer le foot comme tous les autres je rêve de devenir un jour il footballeuse professionnel

  2. À l’époque, je ne connaissais pas du tout le foot féminin, je ne voyais que les hommes jouaient à la télé; sur les réseaux sociaux, la radio etc.. puis lorsque j’ai commencé à en entendre parler, j’ai pu voir quelques matchs de l’équipe de France Féminine, passée à la télé (uniquement sur une chaîne secondaire), l’Euro, ne passait pas sur TF1, et dans les gradins c’étaient quasi-vides. Cette année, il y a eue plus de monde (comme le match France – USA aux parcs des princes, qui étais plein. Même si les Bleues ont perdues, je continue toujours de les soutenir et je regarde chaque année le football féminin (plus souvent), que le football masculin. J’aurais voulue en faire du foot, plus jeune, je n’étais passionnée que de ça, je jouais toujours dehors avec des garçons, et j’ai d’ailleurs appris à y jouer en regardant les matchs à la télé. Mais, ma mère n’a jamais voulue (elle préférée que je fasse de la danse), mais toujours étant « garçon manqué » (à part le hip-hop), tout le reste ne m’intéressait pas. J’ai eue la chance d’être dans une équipe à l’USS en 6e au collège, ou j’ai participer à un tournoi. Sur tous les matchs, j’ai rencontré qu’une seule fille qui faisait partie d’une équipe qu’avec des garçons (elle avait d’ailleurs un très bon niveau), le truc, c’est bien que les garçons de mon équipe appréciait mon style de jeu, ils ne me laissaient qu’en défense et parfois au goal, parce que je savait défendre; mais mon poste de prédilection était MO (Milieu Offensif) et ATT (Attaquante). Nous étions arrivées jusqu’en demi puis perdues, mais ce fut ma plus belle expérience. Aujourd’hui, je me contente de jouer à Fifa sur la play, (j’ai pu battre quelques gars en ligne – de vrai machos – qui n’aime pas perdre ou faire match nul avec moi), mais je leur tiens tête puis je ne suis pas une mauvaise perdante. Et je regarde les matchs. Je n’y joue plus (même si le foot ça ne se perd pas); et je fais toujours de la Pub lorsque j’entend parler d’un nouveau club pour filles pour les encouragez à s’inscrire. Ne perd pas cette détermination de vue, ni ton courage et ta persévérance; une femme a autant de qualité techniques de jeu qu’un homme 😉 Bon courage à toi, et ne lâche rien !!!

  3. Salut Ilhem, j’admire ton courage; ta détermination et ta persévérance. Tu as raison. Même si le football féminin commence à mieux se faire voir en diffusant des matchs de Coupe ou de l’Euro à la télé; il reste encore beaucoup critiqué. C’est parce qu’il existe toujours cette inégalité entre les hommes et les femmes. Quand je regarde les hommes et les femmes jouaient, je ne vois aucune différence… elles foncent sur le ballon, elles se prennent des coups, elles jouent techniques, en passes, elles font de belles actions et elles marquent des buts incroyables; puis elles sont Professionnelles (même si leurs salaires est inférieure à celui des hommes). La différence, c’est qu’elles jouent parce qu’elles sont passionnées par ce sport et que l’argent passe après; les hommes, eux, la plupart; font beaucoup de simulation sur le terrain (des chochottes, comme je les appellent) et pour eux le salaire est primordial. Enfin, bref, c’est le comportement de ce genre, comme toi tu as eue, qu’il faut transmettre à des filles qui rêvent de jouer au foot, mais qui n’osent pas. De nos jours, il y a peu de publicités sur des équipes féminines (et ce, quelque soit le sport : handball, basket, rugby…), les femmes ne sont jamais mises en avant et pourtant, elles ont fait leurs preuves et elles montrent leur potentiel technique admirable à chaque fois.

  4. Je suis responsable d’une association de supporter. Le vrai problème est la médiatisation des matchs et donc sa considération par le monde environnant. Il faut changer cette façon de voir y compris par les journalistes dames.

  5. Tu as raison de te battre pour ta passion qui est le football ⚽️ et chacun chacune doit pouvoir faire le sport sûils souhaite sans être jugée. Continu sur ta lancée on te verra peut être en équipe pro dans les années futures. Pour la coupe du monde féminine je suis d’accord avec toi pas assez de publicitépourtant les femmes sont aussi douées que les hommes et nous voyons du très beau football ⚽️ … ALLEZ les BLEUES … et surtout CONTINU de vivre ta PASSION

  6. Après 30 années de bénévolat dan un club masculin, avec un ami nous avons créé un club exclusivement féminin.
    Nous avons été copieusement critiqués, voir injuriés par certains de nos ex collègues sans susciter la moindre réaction en notre faveur de nos élus (quand ils ne prenaient pas parti pour eux).
    Nous avons été amenés à nous exiler vers une commune voisine, qui nous a accueilli et permis de pouvoir poursuivre.
    Aujourd’hui, nous sommes enfin … tolérés mais … certaines rancoeurs subsistent encore chez certaines personnes .

  7. Belle attitude sur la majorité de l’article, même si je ne vois pas quelle place de match masculin à 4 000 euros. (sauf peut-être une place de Finale de Ligue des Champions ou Coupe du Monde au marché noir)
    Autre réserve : dans le titre « un sport de filles ». Des jeunes garçons qui veulent faire de la danse subissent la même « omerta ». La bataille doit être qu’une fille ou un garçon puisse pratiquer le sport dont il a envie SANS A PRIORI SEXISTE RIDICULE.

  8. on est beaucoup dans ce cas là

Voir tous les commentaires

Commenter