ZEP 23/09/2021

Je suis devenu adulte en détention

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Avant sa dernière détention, Raphaël se sentait invincible. Mais de multiples ruptures et une thérapie l'ont fait mûrir, à presque 50 ans.

« Mes premières permissions, c’était trois ou cinq jours, mais il fallait quand même signer au commissariat. Il fallait prendre le bus. Je voyais qu’il y avait trois minutes d’attente, c’était dérisoire, mais c’était trop : je ne pouvais pas rester stagner à un arrêt de bus, il fallait que je marche. Il fallait que je sois au milieu de la vie. »

« J’étais très insolent envers la vie. J’ai toujours eu beaucoup de chance, et je croyais que tout était éternel. Le décès de mes parents au début de ma détention m’a permis de mûrir. J’ai bientôt 50 ans et je réalise que je deviens adulte maintenant. »

« Ma dernière permission, c’était en mars 1997. Il ne me restait pas grand chose à faire. J’ai fait l’imbécile. J’ai passé une permission extraordinaire avec mes parents. Au retour de permission, j’ai eu la mauvaise idée de revenir avec 54 grammes de haschich dans le ventre. J’ai laissé ma mère partir en me disant : « S’ils m’attrapent, c’est une leçon. » Je suis rentré, et ils m’attendaient. J’ai passé 45 jours au cachot. » 

Reformaté comme un PC, il faut que je me reprogramme

« Durant ma détention, j’ai rencontré une femme sur les réseaux sociaux. On se disputait en permanence. C’était une personne qui était là pour m’aider, et moi je lui faisais du mal. J’ai réalisé que j’avais un souci. Je gérais mal la frustration et il fallait que je règle tout ça. J’ai entamé une thérapie en détention qui m’a fait prendre conscience de tout un tas de choses. »

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« J’étais dans l’insouciance. Pour moi rien n’était grave, tout pouvait être réparé, tout pouvait recommencer. Cette peine m’aura permis de grandir, de faire la paix avec un certain passé. Je ne regrette pas cette détention, même si ma peine est lourde parce que j’ai pris quinze ans. J’ai dû me reformater comme un PC. Maintenant, il faut que je me reprogramme. »

 

Raphaël, 49 ans, en détention, Île-de-France

Illustration © Merieme Mesfioui (@durga.maya) // Musique Kiala Ogawa

Journalistes : Elliot Clarke et Nathalie Hof

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1 réaction

  1. Merci Raphaël d’avoir changé. Quel dommage que des thérapies d’ordre émotionnel et corporel ne soient pas mises en place en prison. La récidive diminuerait considérablement.

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