Anaïs B. 17/03/2021

Alcool : j’ai pris des cuites et des risques

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Les soirées étudiantes sont récurrentes et l'alcool y coule à flot. Depuis ses 15 ans, Anaïs navigue entre les verres... et s'y perd parfois.

Oui, j’aime l’alcool. Je n’ai pas attendu d’évènement particulier pour commencer à boire beaucoup. Je n’ai pas attendu d’être étudiante pour me mettre des cuites énormes. La première fois que je suis tombée raide morte, j’avais 15 ans. Je ne tenais plus debout. C’était compliqué pour rentrer. Ce n’était pas pour paraître cool, j’avais juste trop bu.

Au lycée, je me mettais des murges principalement l’été, pendant les fêtes de village qui s’enchaînent de semaine en semaine, sur trois ou quatre jours. Mais le reste de l’année j’étais relativement calme. C’est surtout la vie étudiante et ses soirées qui a été une continuité. Une continuité qui m’a amenée aux urgences de Bordeaux. Coma éthylique. J’avais 18 ans. J’étais pourtant sûre de mon aptitude à tenir l’alcool depuis plusieurs mois. Et j’aurais dû être rodée pour ce « petit apéro chill » qu’on m’avait vendu, mais mon corps n’a tout simplement pas supporté cet énième et important taux d’alcoolémie.

Pourtant, ce coma éthylique ne m’a pas servi de leçon. Le soir de ma sortie de l’hôpital, je suis allée boire un verre avec une amie. J’ai attendu avec impatience la prochaine soirée, et ainsi de suite.

Du lundi au vendredi, de 21 heures à 4 heures

Me voilà en deuxième année de journalisme. Je suis avec mon petit groupe de potes et, tous les soirs, on pinte au bar après les cours. Dès 17 heures, parce qu’on rigole bien. Puis, chacun mange chez soi, et on se retrouve pour la suite de la soirée. Tous les jours, du lundi au vendredi, de 21 heures à 3 ou 4 heures du matin. Pourquoi on s’arrêterait ? On s’amuse bien. Je ne dors que deux-trois heures avant de retourner en cours. Le corps s’y habitue, alors pourquoi ne pas pousser le vice plus loin ? Je bois toujours plus, et plus vite. Oui, j’aime l’alcool. J’aime l’effet sur ma perception de ce qui m’entoure. J’aime ce moment où t’es suffisamment bourrée et euphorique, celui où tu ne te contrôles plus vraiment mais où, en même temps, tu sais encore ce que tu fais, t’es encore consciente du danger potentiel.

Pression à boire, black-out, alcool entre ami·e·s ou en famille, en soirée ou confiné·e·s… Dans la web-série « Rien qu’un verre ! » de France.tv Slash, plusieurs jeunes âgé·e·s de 18 à 30 ans questionnent leur rapport à l’alcool, entre anecdotes, déboires et prises de conscience.

 

Un jour, mon père me reproche d’avoir des tendances alcooliques. Ensuite, ce sont mes ami(e)s. « C’est la vie étudiante, si vous faisiez des études vous comprendriez » est ma seule défense. Mais ils ont raison, ma consommation est clairement trop élevée. Selon l’association Addictions France, la quantité d’alcool à ne pas dépasser pour ne pas avoir une consommation à risque est de deux verres par jour et dix verres par semaine. Nous sommes à dix verres par jour. Et je ne compte même pas les shooters.

On ne s’adresse la parole qu’un verre à la main

Sobre, je suis sociable, j’aime parler avec les gens et délirer, même si je ne les connais pas. Mais il faut bien avouer que l’alcool désinhibe et joue un rôle parfois. Vu qu’on se connait déjà avec mes ami(e)s, je ne sais pas vraiment ce qui nous pousse à nous réunir tous les soirs. Dans mon cas, c’est tout d’abord l’esprit festif, mais aussi l’habitude de retrouver du monde. Et je ne veux pas me retrouver seule, et encore moins siffler une bouteille seule.

Pourtant, au début de l’année scolaire ça partait d’une bonne intention : entretenir sa vie sociale et décompresser des cours. Nous nous sommes pris à notre propre jeu… « Vous vous rendez compte qu’en journée, pendant les cours, on ne s’adresse pas la parole, mais dès que c’est pour boire, on est tous là ? », prend conscience une de mes ami(e)s, verre de gin à la main. Alors quelle type d’amitié entretenons-nous ?

Lors de mon départ en stage en Côte d’Ivoire, je me suis dit que c’était l’occasion de réduire fortement ma consommation d’alcool. Je me suis trompée. Je buvais des bières tous les jours et buvais au maximum quand l’occasion se présentait. Ma consommation n’avait pas changé mise à part le type d’alcool. Oui, j’aime boire, des alcools forts. Surtout la vodka avec un fond de grenadine, supplément glaçon.

Je sens les effets néfastes de l’alcool

Quand je suis rentrée en France au mois de mars 2020, le monde était déjà confiné. Ma fréquence de beuverie a drastiquement chuté, pas par choix, malheureusement. Je me limitais à un ou deux verres par jour, avec, de temps en temps, mes parents. Après la fin du premier confinement, je n’ai pas raté une seule occasion pour rattraper le temps perdu. En revanche, j’ai failli perdre la vie, un soir d’été où je tentais de rattraper ce temps perdu. Alcool au volant. Ce n’est pas faute de prévention…

C’est à ce moment que les ravages de l’alcool sont visibles par tous. « Je n’ai pas envie d’aller à l’enterrement de ma pote de 20 ans », gronde une amie. « En fait, ton problème c’est pas l’alcool, c’est les décisions que tu prends… », constate mon père d’un ton las. Si, mon problème c’est l’alcool. Sobre, je n’aurais pas flirté avec la mort. J’ai honte. Pas de ma capacité à ingérer divers beuvrages alcoolisés, mais des conséquences engendrées. Celles qui auraient pu être évitées. Celles dont on ne peut pas se cacher : accident de voiture, contrôle de police, perte de points du permis, coma, bagarre, etc.

Même avec tout la volonté du monde, il est compliqué de savoir quelle est la meilleure manière d’aider un·e proche qui a une addiction. Dans la famille de Mattéo, la consommation de cocaïne de sa sœur a crée de vives tensions.

Une femme fume la tête vers le ciel.

Cette année, malgré la pandémie, j’ai continué les apéros. On n’a pas besoin de beaucoup de personnes. Même en petit comité, l’alcool coule à flot. J’aime toujours l’alcool, mais je sais boire moins et je m’arrête avant qu’il y ait des conséquences regrettables. Après mon accident de voiture, j’ai commencé à avoir un regard critique vis-à-vis de ma consommation. Et, aujourd’hui, je commence à sentir quelques effets néfastes, notamment des petites pertes de mémoire et le fait de ne pas me souvenir de mes fins de soirées, sans pour autant avoir beaucoup bu (deux-trois verres), sans être ivre morte. Avant, je buvais jusqu’à ce que mon corps me lâche, maintenant je lâche mon verre quand il est encore temps.

Anaïs, 21 ans, étudiante, Bordeaux

Crédit photo Unsplash // Tobias Tullius

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2 réactions

  1. moi ca va j ai eu ma premiere cuite a 9 ans

  2. Moi qui aie toujours eu un coté presque « raciste » avec ceux qui boivent je comprend maintenant grâce a cet écris. On entend beaucoup les avertissements de toute part sur l’alcool mais même si j’ai horreur de l’idée de boire n’ayant pas une seule expérience sur le sujet a 16 ans. Je comprend qu’il y a un coté bon que se sois dans les effet de la boisson ou les réunions avec des personnes avec qui nous n’aurions pas eu l’idée de discuter. Pour cause que c’est un point d’intérêt et que comme dis le dicton, les grands esprits se rencontrent

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