Jean-Baptiste D. 19/10/2021

Mes années fac en mode BDE

tags :

Quand son pote lui propose de rejoindre une association étudiante sur un coup de tête, Jean-Baptiste accepte : ça va changer ses années fac.

Le BDE (bureau des étudiants) est souvent synonyme de fêtes alcoolisées et de bizutage repoussant les limites du corps humain, pour ceux qui sont familiers de l’environnement universitaire. Alors oui, c’est en partie le cas pour pas mal de facs. Heureusement pour moi, je n’avais pas le niveau pour entrer en médecine.

Je suis entré à Lyon 2 en 2015, tout frais sorti du bac, dans une licence de Sciences Po et italien. Je ne connaissais absolument personne. Pour moi qui avais passé toute ma scolarité entre Caluire et la Croix-Rousse, entre l’école Sainte-Marie et Saint Jean-Baptiste de La Salle, je plongeais dans le grand bain.

Je trouve des potes, presque tous aussi paumés que moi. Cyprien, Jonas et Cécile. C’est Jonas qui a eu l’idée d’intégrer le BDE de Sciences Po. Personnellement, je n’avais aucune idée de ce que c’était, donc je me suis dit : « Pourquoi pas ! » En plus, c’était juste après les cours et Jonas avait assuré qu’il y aurait de la pizza.

Des fêtes pour lever les fonds refusés par l’université

Et l’aventure était finalement bien plus engagée vers des projets culturels que je ne l’imaginais ! Bien sûr, il y avait des fêtes, mais elles servaient surtout à lever les fonds que l’université nous refusait souvent. Le BDE de ma fac était une association quasi sans budget, avec plein d’idées d’événements.

Tout le monde était vraiment à fond, content et motivé. Avec nous, l’asso est passée à quinze membres. Adam, c’était le fondateur. Un grand gars, cheveux roux coupés très courts et col roulé, infatigable. Étienne, le zicos. Audrey, qui savait s’informer plus vite que l’AFP. Yann, avec son passé dans l’administration Collomb, et Sébastien, notre chef communication. L’équipe au complet avait un objectif : faire un BDE sérieux ! On allait organiser des conférences, des meetings et des cafés débats en rapport avec nos études, avec des intervenantes et intervenants de prestige. Même qu’on aurait des mugs et des sweats top of the pop !

Après un an de pause, les associations reprennent vie sur les campus. Une année de suspension qui a permis à certaines d’entre elles de se renouveler et de repenser leurs activités. Le Monde est allé à la rencontre des étudiant·e·s concerné·e·s.

Bien sûr, l’université ne comptait pas nous verser un centime. Ni nous donner des locaux d’ailleurs ! On a mis un an à obtenir une boîte aux lettres quand l’asso succursale du GUD (groupe union défense), pas vraiment des enfants de cœur, se voyait payer une salle du campus. Mis à part ça, on se finançait tout seul ! Les conférences étaient évidemment gratuites, il fallait qu’on trouve l’argent ailleurs. Nous avons donc exploité le point faible de tout étudiant : des remises inégalables sur l’alcool en soirée ! En une soirée, on s’est fait plus de 2 000 balles juste avec les cartes d’adhésion. Meilleure première impression, donc !

Élus, journalistes et ambassadrices en invités

Le meilleur, c’est qu’on l’a fait. On enchaînait les conférences une fois par mois. « Les nouveaux médias », « Le désarmement nucléaire », « Les Balkans après le Bloc de l’Est ». Grâce au carnet de contacts infini d’Audrey, on invitait des élu·e·s, des journalistes… On a même eu l’ambassadrice du Kosovo, du Mexique et un ancien conseiller à l’ONU. Autant dire qu’avec ces invités, notre budget passait surtout dans leurs transports, leurs logements et la location des amphis. Moi, je gérais les publications du BDE, rédigeais les communiqués, présentais les conférences en amphi et j’écrivais le compte-rendu des conférences avec des interviews. Et les sweats étaient plus doux qu’un mois de mai.

En parlant de conférences d’ailleurs, elles marchaient franchement bien. On a toujours réussi à rassembler au moins une trentaine de participants. La plupart du temps, le prix de la location des amphis était très vite justifié par l’affluence ! Comme on était une asso de l’université, c’était quand même plus facile de louer une salle. Et il nous restait assez d’argent pour organiser d’autres événements, et un week-end à la montagne ! On gérait comme ça : annonces sur les réseaux, interventions au début des cours, bouche-à-oreille. On profitait aussi des soirées pour faire de la publicité à nos autres projets, en plus de récolter de quoi financer les plus ambitieux.

En deux ans, on se sentait vraiment de plus en plus légitimes. On s’était fait un nom dans le milieu universitaire lyonnais. C’est même cette année-là qu’on a obtenu notre premier partenaire ! C’était une appli de référencement pour tous les événements lyonnais. En échange d’un habile placement de produit sur les réseaux, nos soirées étaient mises en valeur.

Des week-ends ski, sans aide

Il y a eu quelques problèmes avec les autres associations étudiantes de la fac. Ça devait leur faire mal, cette asso partie de presque rien qui invitait soudainement du beau monde et engrangeait assez de fonds pour financer des week-ends au ski sans aide. On avait même fini par se faire insulter d’asso d’extrême-droite pour avoir organisé un café-débat pour l’élection présidentielle…

Sacré soirée ce café-débat d’ailleurs ! Presque tous les partis de la campagne de 2017 étaient représentés ; ceux qui nous avaient répondu, en fait. On avait loué le bar entier d’une péniche et fait salle comble. Il y a bien dû avoir une soixantaine de personnes. C’est l’événement qu’on a le plus préparé. Choisir le bon lieu, évidemment, la disposition des tables pour que tout le monde puisse discuter avec tout le monde, assurer l’approvisionnement en rafraîchissements. Aiguiller et arbitrer les débats à chaque table, c’était le plus difficile ! Entre le représentant toujours prêt à glisser une pique à ses opposants politiques et l’arrivée imprévue de l’asso anarchiste de l’université… On s’est bien amusés.

Pendant le premier confinement, Léa se sentait seule dans sa nouvelle résidence étudiante. Mais la vie sociale sur le campus lui a permis de tenir bon.

Des jeunes réunis sur un toit brandissent des verres et font la fête, le ciel est bleu autour d'eux et on aperçoit des toits et des cheminées.

J’ai beaucoup grandi pendant ces deux années au BDE. J’ai appris ce que c’était de soutenir un idéal que l’on souhaite partager grâce à l’asso. Une expérience qui m’a enseigné le sens des responsabilités aussi, qui m’a fait comprendre la diversité étudiante. Comprendre les gens, gagner en assurance, savoir gérer les imprévus, rédiger un article et surtout réaliser qu’un BDE avec des projets comme les nôtres, ça demande de l’investissement, du temps et un bon comptable !

Aujourd’hui, le BDE n’existe plus. Chacun dans l’équipe a trouvé sa voie. Certains ont continué à organiser des événements de leur côté. Moi, j’en garde un sweat délavé par les années, mes premiers articles en temps que rédac chef et un tas de souvenirs incroyables.

 

Jean-Baptiste, 23 ans, volontaire en service civique, Lyon

Crédit photo Unsplash //CC Priscilla Du Preez

Partager

Commenter