Eva T. 17/07/2024

Dans ma bulle à la salle

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Longtemps en surpoids, Eva appréhendait chaque séance de sport au collège. Elle a fini par sculpter le corps dont elle rêvait en pratiquant la musculation.

J’ai toujours aimé le sport et j’ai toujours eu peur d’en faire. À la boxe, j’avais peur qu’on me marque le visage. Au basket, peur du ballon. En natation, peur de mourir en me noyant. J’étais trop timide pour faire de la danse et j’avais très peur de faire de la gym, par rapport à mon poids. Le football, ça allait. Quand j’étais gardienne de but, mon corps était assez imposant pour arrêter la balle. Je n’ai jamais pratiqué de sport en dehors de l’école. Je ne supportais pas l’idée de participer à des compétitions. J’avais très peur d’échouer. Et peur du regard des autres.

J’ai toujours été en surpoids et on me l’a souvent fait remarquer. Aujourd’hui, je prends du plaisir en faisant du sport. Ça me permet de me défouler. Je ne suis plus cette personne qui a peur qu’on la juge ou qu’on critique son poids. Bon, OK, entre-temps, j’ai énormément perdu de poids. Depuis plusieurs années, j’ai pour projet d’avoir un summer body. C’est arrivé en 2024. Ça aide.

« J’ai joué la malade imaginaire »

Quand j’avais 15 ans, je pesais 100 kilos. Un matin, on est venu nous annoncer que tout le monde devait participer au cross, à la fin de la semaine. Misère. Je déteste courir. Je déteste la foule. Je déteste la compétition. Et je n’aime pas trop l’idée que tout le monde voit une pomme de terre sur pattes courir (oui, c’est moi). L’idée d’être jugée par des centaines de personnes, c’était hors de question. Rien que d’y penser, j’avais déjà la boule au ventre. L’idée d’arriver dernière, et qu’on mette ça sur le dos de mon surpoids, à quoi ça sert ? Insupportable. J’ai commencé à chercher un moyen de ne pas y participer : me fouler la cheville, tomber malade, me faire écraser par une voiture ou disparaître. Pas vraiment réalisable.

Le jour J, j’ai fait croire à ma mère que je ne me sentais pas bien. Échec. Elle a très vite compris que je simulais. Il fallait que je trouve une autre solution, radicale et efficace. Nouveau plan. Toute la journée, j’ai joué la malade imaginaire. À 13h30, l’heure du départ, je stressais de plus en plus. J’étais moite, j’avais des bouffées de chaleur. J’en oubliais même mon prénom. J’ai fini par simuler un malaise. J’ai fait l’inconsciente pendant deux minutes. Ils sont partis sans moi, en me disant : « Prends soin de toi Eva ! » La honte.

« À la salle, on a tous nos complexes »

Aujourd’hui, ce que les gens peuvent penser ne me touche pas. Je me suis inscrite à la salle, chose impossible pour moi avant. J’y vais très souvent, avec une amie. Ça nous permet de nous voir, de discuter, de rigoler, mais surtout de travailler certaines parties de notre corps avec les machines. Je suis très épanouie, même si la majorité des gens à la salle sont des hommes. Ça ne me pose plus de problème. Avec le temps, on se rend compte que tout le monde est dans sa bulle. On est tous là pour le même but. On a tous nos complexes.

Je suis mère d’une enfant de 2 ans. J’aimerais pouvoir l’initier au sport dès son plus jeune âge. Qu’elle puisse être habituée, que ça puisse la discipliner et lui donner une certaine confiance en elle. Qu’elle sache partager et qu’elle ait l’esprit d’équipe, ce qui est très important dans la vie. Je compte lui faire tester tout type de sport pour qu’elle puisse choisir ce qui lui plaît le plus. Même si elle a peur, comme j’ai pu avoir peur, je serai là pour l’aider à se surpasser. Dans la vie, la peur crée énormément de blocages et d’opportunités ratées. Je veux qu’elle n’ait aucun regret, qu’elle puisse être une enfant épanouie.

Eva, 25 ans, en recherche d’emploi, Paris

Crédit photo Pexels // CC Polina Tankilevitch

 

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