So C. 27/09/2022

Le deal, je prends ça à cœur

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À la fin du collège, So s'est lancé dans le deal pour ramener de l'argent à la maison. Son taf, il le fait bien, et ses clients l'adorent.

En troisième, j’ai commencé à vendre de la drogue. C’est venu de moi, j’en avais marre de voir le frigo vide et je voulais avoir de l’argent. La drogue, c’est ce qui est le plus facile et qui rapporte le plus. Je vends du shit, de la beuh, et de la trace blanche… 0,5 g de blanche à 40 euros. Je fais ça dans une gare.

Au départ, je vendais des petits 1,5 g et ça me rapportait un petit billet pour que je sois content. Au fur et à mesure, je suis devenu un bon, bon vendeur. Je peux faire 200 ou 210 euros par semaine. Parfois, beaucoup plus.

On m’appelle, je rapplique

J’ai deux téléphones. Les clients ont mon Snap et mon autre numéro de téléphone. C’est un F2 [un portable basique et pas cher, ndlr]. On m’appelle, je rapplique. Ils bipent, passent commande, et je leur donne rendez-vous. On m’appelle même vers 2 ou 3 heures du matin. L’échange se fait vite, en moins de trente secondes, c’est plié. Ils me reconnaissent à ma dégaine : casquette et capuche, et cagoule le soir. Je leur donne le truc, ils me donnent la monnaie et je file. Les gens me font de la pub grâce à mon Snap, en story. Mes produits attirent l’œil parce qu’ils sont bien présentés, et après les gens me contactent.

Plus le client vient, plus il achète, plus je peux faire des cadeaux : genre des pesettes pour faire ses doses, ou alors je rajoute quelques grammes. Moi, je prends ça à cœur, c’est un plaisir. Quand je vois les clients contents, qu’ils ont ce qu’il ont pour leur plaisir, j’aime ça. Le plus marrant, c’est les filles. Elles essaient de faire celles qui viennent de la rue. Elles ont un pot de peinture sur le visage qui ressemble plus à rien et elles font les costaudes, c’est drôle.

J’espère sortir du deal

Le matin, je fais le « détail », je prépare mes coupures. Parfois, je préfère aller faire mes sous plutôt que d’aller en cours. Ça dépend de mon humeur. Mon collègue, celui qui fournit, mon « supérieur », est relax et tarpin gentil. Il ne met pas la pression. Il est chill. Je suis bien entouré. Après, si j’ai un travail, j’espère sortir de ça. J’ai jamais été inquiété par les flics, mais j’ai toujours une bombe lacrymo sur le siège à côté de moi. Et si on vient me demander qui m’achète, je ne dis pas.

PODCAST – Dans les quartiers Nord de Marseille, Jaguor, Nabil, Bilel et Kacim ont vu dans le deal une manière de gagner de l’argent. Peu importent les conséquences.

Avant, moi aussi, je consommais du cannabis en grosse quantité avec mon frère. On passait les 10 g en une journée. J’ai arrêté du jour au lendemain, je perdais trop de sous dedans.

Dans ma famille, personne ne sait ce que je fais. Tant qu’il n’y a pas de sous chez moi, je continuerai. Mon père me dit parfois de ranger ma chambre mais il ne rentre pas dedans. Mon frère ne sait pas non plus. Vaut mieux pas, parce que sinon je risque de passer par la fenêtre du deuxième.

So, 15 ans, lycéen, Alès

Crédit photo Unsplash // CC Adam Hoang

 

Le savais-tu ?

La vente de drogue sur Snap a explosé depuis le premier confinement. La plateforme est idéale pour le deal parce que…

→ les transactions sont moins risquées puisqu’elles se font en ligne

→ les messages et les stories sont éphémères, donc plus difficiles à repérer

→ la carte Snap permet de localiser facilement les clients/dealers aux alentours

→ le réseau permet de faire de la pub gratos : codes promo, stories, cartes de fidélité…

Comme il y a moins de prise de risque et que la drogue est à portée de clic, c’est aussi plus difficile d’en sortir.

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