Odo A. 18/03/2022

Ma dépression, invisible et chiante

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Odo a été diagnostiquée dépressive après un long parcours du combattant. Une maladie qui ne se voit pas, mais qui lui pourrit la vie au quotidien.

Ce n’est pas un jeu d’enfant d’être diagnostiquée dépressive. Il est déjà compliqué de la repérer. Ma dépression a été diagnostiquée à partir de la seconde. Plus précisément, j’ai eu l’occasion d’être diagnostiquée. Mais j’allais mal depuis le collège, en quatrième.

J’étais perdue. Je me sentais vide. J’avais l’impression d’être le bouche-trou. Le bouc émissaire. Et la liste est longue. Si vous ajoutez à ça les disputes familiales, le fait d’apprendre et d’entendre des choses qui vous font douter de ce que vous êtes, les amitiés qui ne vont pas, la scolarité qui ne va plus, le harcèlement des autres élèves, le rejet, vous avez tous les ingrédients pour aller très mal. Je n’étais pas vraiment gentille avec moi-même non plus. Je me rabaissais systématiquement, je me faisais du mal.

J’ai parlé de mes problèmes à l’infirmière de mon collège. De cette sensation de vide. Ce manque de motivation pour faire quoi que ce soit. L’infirmière m’a fortement recommandé l’espace santé jeunes de Nanterre, mais j’avais peur d’y aller. Je n’osais pas. Encore moins toute seule. J’avais… comment dire… honte, je pense. Je me disais : « Non, c’est rien. C’est juste moi qui exagère la chose. J’embête les gens avec mes stupides problèmes. » Finalement, j’ai décidé de ne pas y aller.

Être compris, ça soulage d’un poids immense

J’en ai aussi parlé à ma mère… Les parents ont tendance à se dire que ce n’est qu’une phase. Ils minimisent la chose et c’est totalement compréhensible. C’est normal car, malgré nous, on a tendance à se protéger de la vérité. Surtout les parents. Ils ne veulent pas voir les choses en face parce qu’ils vont se dire que c’est leur faute si on est dans tel ou tel état. Qu’ils n’ont pas su subvenir à nos besoins.

Moi aussi, j’ai cru longtemps que ce n’était qu’une phase. J’ai laissé traîner et ça n’a fait que s’empirer. Je suis restée sans aucune réponse aux questions que je me posais comme : « Qu’est-ce qui cloche avec moi ? » ; « Est-ce que c’est moi qui exagère mon état ? » J’étais en manque cruel d’aide et d’écoute. Je suis restée un long moment comme ça. Je ne sais pas ce qui aurait pu m’aider à cette époque. Déjà que je ne sais pas vraiment ce qui peut m’aider maintenant. Peut-être rencontrer quelqu’un avec un vécu similaire. Être comprise, ça aurait peut-être pu me soulager. Parfois, être compris, ça soulage d’un poids immense.

Je ne m’en rendais pas compte avant le diagnostic

Après avoir été diagnostiquée dépressive, je me suis dit : « Peut-être que ça va m’aider. » Maintenant, j’ai un suivi : je consulte souvent une psychologue et un pédopsychiatre. Mais ça n’avance à rien… Et je ne ressens aucun soulagement, je suis toujours au même stade. Je parle. Je parle de mon passé, de ce que j’ai pu vivre et ça m’ennuie, ça m’agace. Oui, c’est normal que ça prenne du temps, il faut être patient, mais j’en ai marre d’attendre. Toujours prendre sur soi, c’est lassant et fatigant.

La seule chose qui me permet de rester, c’est une promesse. Une promesse que je me suis faite, réaliser mon rêve : devenir actrice. Pouvoir toucher à tout, musique, danse, chant, théâtre. Je me teste, je veux devenir une pro là-dedans. Et peut-être servir d’exemple un jour… Se promettre quelque chose change tout, c’est une sorte de nouvel espoir.

La crise sanitaire a plongé Vianney dans la dépression. Il tente aujourd’hui de sortir la tête de l’eau.

Alors ouais, la dépression c’est complexe parce que c’est invisible à l’œil nu, et c’est chiant. Elle peut être causée par tout type de choses, cela dépend des personnes donc vous n’êtes pas obligés d’avoir subi un traumatisme ou du harcèlement pour en souffrir. À partir du moment où vous allez mal et que vous perdez pied, vous pouvez demander de l’aide.

Le pire, c’est que ça vient petit à petit. On ne se rend pas compte. Enfin, moi, c’était mon cas. Encore aujourd’hui, je ne m’en rends toujours pas compte. Je crois que je n’arrive toujours pas à me faire à cette idée.

Odo, 15 ans, lycéenne, Nanterre

Crédit photo Unsplash //CC Sinitta Leunen

 

42 % des ados présentent des symptômes dépressifs (plus ou moins graves).

71 % d’entre elles et eux n’en ont parlé à personne.

10 % des ados ont fait une tentative de suicide avant leurs 18 ans.

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1 réaction

  1. Merci de ce partage. Pour moi ça décrit bien ce que quelqu’un peut ressentir de sa dépression, même si bien sûr, chaque personne est différente.
    J’espère que tu pourras un jour réaliser la promesse que tu t’es faite
    Bon courage

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