Céleste L. 10/03/2023

Féministe depuis mes 8 ans

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Enfant, Céleste a rapidement pris conscience des inégalités de genre. Elle rêve maintenant de faire évoluer les mentalités.

Je ne me souviens pas d’une vie avant le féminisme. « Pourquoi les hommes, pourquoi pas les femmes ? » C’était le nom de ma chaîne YouTube, à 8 ans. Je voulais devenir célèbre et défendre le féminisme sans montrer ma tête, mais j’avais littéralement cinq vues, dont mes sœurs et mes parents.

J’ai toujours eu conscience que les choses devaient changer pour les femmes. Je baigne là-dedans depuis toujours. On connaît tous quelqu’un de relou aux repas de familles qui va tenir des propos un petit peu chauds… J’avais 7 ans la première fois. Un ami de ma grand-mère a parlé des droits des femmes. Personne n’a hésité à lui répondre, débattre avec lui, sans violence. Sur le moment, je n’ai pas pris la parole, j’étais trop timide, pas assez courageuse. Maintenant, tout a changé, j’ose.

Je peux remercier mes parents pour ça. Ils m’ont toujours éduquée de cette façon. Je les ai vus dans tellement de situations où ils n’ont pas hésité à intervenir. Un jour, on passait les contrôles de sécurité à l’aéroport. L’agent de sécurité m’a dit : « Passez mademoiselle. » Mon père a tourné la tête brutalement, est allé le voir et lui a expliqué très doucement — presque en rigolant — que le mot « mademoiselle » ne devait plus être utilisé. Quelques mois plus tard, il a été supprimé dans l’administration française.

Du féminisme à l’école primaire

Grâce à mes parents et à leurs actions, j’ai une vraie chance comparé à d’autres filles de mon âge. C’est devenu la cause la plus importante de ma vie. Depuis petite, ils abordent le sujet de la sexualité et surtout du consentement avec moi et mes sœurs. Vers 7 ans, mes parents nous ont expliqué comment les organes féminins et masculins fonctionnaient. Quand mes sœurs ont commencé à grandir, on parlait à table du consentement, du préservatif. Ils leur disaient de faire attention à leur verre. Maintenant, c’est à moi qu’ils l’expliquent mais j’entends ça depuis longtemps.

Dans ma classe, j’ai toujours des choses à dire. Mon but (inconsciemment) a toujours été de « convertir » un maximum de personnes au féminisme. Pour moi, éduquer et sensibiliser, c’est le plus important. C’est faire passer ses idées et que les autres (souvent des garçons) prennent conscience qu’il existe une réelle inégalité entre eux et nous. À chaque débat sur ce sujet, tout le monde sait que je vais intervenir.

Mais ce n’est pas toujours facile. Débattre avec des gens de son âge, des garçons têtus, ça revient à se battre contre un mur. Souvent, je n’arrive pas à me contrôler et je veux partir au quart de tour à chaque propos que je ne trouve pas normal. Quand j’avais 9 ans, c’est la seule fois où j’ai dépassé les bornes avec un garçon. Il avait refusé que nous, les filles, rentrions dans la partie de foot. Son seul argument était : « Les filles elles sont nulles au foot, elles ne savent pas jouer. » Je me suis sentie offensée, alors je l’ai giflé. Ce n’était clairement pas la bonne chose à faire. Aujourd’hui, je ne le giflerais pas à nouveau. J’utiliserais des mots et des arguments construits pour qu’il se sente bête et nous laisse jouer. Comme je le fais aujourd’hui.

Des lectures et des vidéos féministes

Ça, c’est grâce à toutes mes lectures. Depuis toute petite, mes deux grandes sœurs me donnaient leurs livres sur le féminisme (et pas seulement). C’est aussi grâce aux vidéos que j’ai regardées… et à force d’observer mes parents. Un des premiers livres que j’ai lu fut Beyoncé est-elle féministe ? Il m’a profondément marquée. Il m’a permis de comprendre qu’il y a différentes formes de féminisme et différentes façons de lutter. J’ai aussi appris dans le livre qu’avant, le beach-volley – mon sport – était un milieu misogyne. Les filles étaient obligées d’avoir des maillots de bain où l’on voyait le tiers de leurs fesses, sinon elles avaient interdiction de jouer. Lors des Jeux olympiques de 2004 à Athènes, 40 % des images diffusées des matchs des femmes étaient des plans serrés sur leurs fesses ou leurs poitrines. Je n’ai pas connu cette époque-là, heureusement.

Aujourd’hui, j’aimerais m’engager en tant que bénévole. Notamment dans des associations féministes comme celles qui aident les enfants dans les banlieues et qui permettent de donner aux mamans du temps libre pour faire des choses qui leur font réellement plaisir. Mes parents sont engagés dans une association de ce style-là et j’aimerais venir avec eux. Quand je serai majeure, j’aimerais aller à des manifestations, donner de l’argent à différentes associations, suivre et donner de la visibilité à des comptes Instagram… En troisième, quand on devait choisir un stage d’observation, j’avais démarché de nombreuses associations féministes et j’avais contacté des femmes qui pensaient comme moi. J’ai été en lien avec un collectif de collage dans ma ville aussi. Mais elles m’ont expliqué que, cette pratique étant illégale, le faire en étant mineure n’était pas possible.

Après avoir subi des violences sexistes, Luce et Cynthia sont devenues féministes. Luce a très mal vécu les regards libidineux sur son corps d’enfant. Pendant son enfance et adolescence au Nigéria, Cynthia devait s’occuper des tâches ménagères, rester à la maison, ne pas fréquenter de garçons.

Capture d'écran de la miniature du Slash "Féministes par nécessité". À gauche, la photo d'une manifestation organisée par le collectif Nous Toutes. À droite, une photo prise lors d'une autre manifestation, la marche du 8 mars.

Plus tard, j’aimerais travailler dans le droit, par exemple en tant que juge pour mineurs. Mais d’autres métiers m’attirent, comme travailler dans une ONG pour la protection des droits de l’Homme (comme Amnesty International). Tant que je mène un combat et que je sens que je peux être utile pour aider les gens et réduire les inégalités, alors je me sens bien. Je sais que pour défendre nos droits, à nous, les femmes, je serai capable de tout. Pour cette cause, rien ne me fait peur.

Céleste, 16 ans, lycéenne, Montpellier

Crédit photo Pexels // CC Sinitta Leunen

 

 

Les moins de 30 ans s’engagent plus que les autres

51 % des moins de 30 ans sont bénévoles auprès d’une asso au moins une fois par an. Cette tranche d’âge est la plus mobilisée, dans tous les milieux sociaux et dans toute la France.

Cette tendance à l’engagement citoyen des jeunes augmente chaque année, et est encore plus importante chez les moins de 25 ans. La lutte contre le changement climatique représente 22 % de l’engagement des jeunes, et la lutte contre les discriminations 12 %.

L’environnement, c’est la cause qui parle aussi le plus à celles et ceux qui n’ont pas encore sauté le pas du bénévolat. Beaucoup s’expriment autrement, notamment en manif ou sur les réseaux.

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