« Ici, c’est un club de hand masculin ! »
Il y a un an, j’arrive en région parisienne pour mes études. Hors de question d’arrêter le handball après dix ans de pratique. Je repère un club près de chez moi, à la fois chaleureux et compétitif. Quand je rencontre mon équipe, on m’avertit : « Ici, c’est un club masculin. » Fin septembre, on reçoit le nouveau jeu de maillots féminins, et là, surprise… seulement trois maillots en XL pour une bonne vingtaine de joueuses. Les filles sont contraintes soit de jouer dans des maillots trop petits, soit d’aller emprunter ceux, plus grands, des garçons. « C’est super rabaissant. Ça me rappelle juste que je suis soi-disant trop costaude par rapport à la norme », déplore la capitaine de notre équipe.
Mon premier match à domicile me permet de faire l’expérience d’un public… parti. On joue juste après l’équipe des garçons. En bonnes supportrices des équipes du club, la plupart des filles sont venues les soutenir. Les tribunes sont presque pleines. Le match est serré. Le public crie et retient son souffle. Une fois la dernière seconde écoulée… les gens se lèvent et partent. On a envie de les retenir, de leur rappeler que, nous aussi, on joue ce soir. En plus, on gagne ! Mais il ne reste que quelques parents, une joueuse blessée et les bénévoles du club les plus investis pour célébrer cette victoire. On aperçoit vaguement les garçons au début et à la fin du match. Entre les deux, ils préfèrent aller dépenser joyeusement la prime qu’ils viennent de décrocher à la buvette.
Écart de niveau
Quand on les y rejoint après notre douche, ils sont incapables de donner un score approximatif. Je soupire : « C’est fou qu’il y ait tant de monde pour les garçons et que les tribunes se vident à ce point pour nous ! » Les regards masculins se tournent vers moi. Certains sourient d’avance à la blague qu’ils ont sur le bout de la langue. Ils essaient de m’expliquer ça logiquement : « On sait bien qu’il y a un écart de niveau entre les équipes masculines et féminines de même catégorie ! » Ça ne suffit pas pour me convaincre. À leurs yeux, l’absence de public pour les filles est justifiée.
Après un autre match, les gars de l’équipe senior nous charrient : « Finalement, les filles, le club aurait pu la mettre en place pour vous aussi la prime de match, vous ne lui auriez pas coûté très cher ! » En effet, on n’aura pas coûté cher au club après huit matchs de suite perdus en National 3. Mais oui, le club aurait quand même pu nous la donner, cette prime de victoire dont les garçons bénéficient, alors qu’ils jouent au même niveau que nous. Trois victoires en début de saison et pas une seule somme d’argent récupérée pour les filles. Chez les garçons, c’est 30 euros par joueur dès qu’ils gagnent. Ils ont même eu une augmentation !
Zoé, 20 ans, étudiante, Nanterre
Crédit photo Pexels // CC cotombro studio
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