« J’ai cru que c’était à cause de moi »
À 14 ans, j’ai été victime d’attouchement sexuel par mon « demi-frère » de 25 ans. Je regardais un film avec lui après sa rupture amoureuse. Il a commencé à approcher sa tête de la mienne. Je l’ai repoussé. Il a pris mon poignet et m’a empêchée de bouger. Je l’ai refoulé une nouvelle fois et il a fini par me poser de force sur lui. Il a commencé ses va-et-vient. Au moment où il a enfin levé les yeux vers moi, me voyant en pleurs, il s’est arrêté, puis il est parti.
Le lendemain, j’en ai parlé à ma mère au dîner. J’étais d’abord honteuse mais j’ai fini par lui dire. Elle s’est levée et elle a mis un long t-shirt large sur moi en m’accusant d’avoir des vêtements trop provocants pour les garçons. Face à sa réaction, j’ai ressenti de la culpabilité. Je me suis mise à pleurer tout en restant silencieuse.
Ne pas faire tâche
Comme si ça ne suffisait pas, elle m’a demandé par la suite d’oublier ce qui venait de se passer pour éviter les embrouilles dans la famille. J’ai répliqué que je ne pouvais pas, encore, faire comme si de rien n’était. Deux fois, c’était trop !
La première fois, j’avais 9 ans et c’était avec un ami proche de la famille. Il avait 38 ans. Je l’avais dit à ma mère et elle m’avait répondu qu’il fallait oublier. Là aussi. Quand c’est arrivé avec mon demi-frère, j’étais vraiment motivée à ce que, cette fois, elle réagisse et m’aide. Voyant qu’elle ne faisait rien de tout ça, j’ai arrêté de batailler.
Suite à ça, j’ai perdu toute confiance en moi. Je me voyais comme une mauvaise fille recherchant de l’attention parce que je m’habillais légèrement. J’ai fini par croire que c’était à cause de moi et que vêtue comme ça, c’était normal qu’on abuse de moi.
Ça a créé chez moi un traumatisme sur ma façon de m’habiller. Pour que ça ne se reproduise pas, j’ai décidé de m’habiller avec des vêtements larges, en cachant la moindre partie de mon ventre ou de mes jambes, voire de mes bras.
« Rien n’était de ma faute »
Avec le temps, j’ai fait des recherches par moi-même. J’ai regardé des reportages sur des femmes abusées, comme moi, et j’ai pris conscience de certaines choses. Aujourd’hui, je m’habille comme bon me semble et mon regard sur les hommes n’est pas mauvais, au contraire. Je me suis sociabilisée et je suis devenue amie avec des garçons pour voir si, oui ou non, ils étaient tous pareils.
Depuis, j’ai eu de nombreuses relations amoureuses. Avec le temps, j’ai pris confiance en moi et j’ai pris conscience que rien n’était de ma faute. Je suis maintenant convaincue que les habits ne doivent pas avoir la moindre influence sur le comportement d’autrui.
Aujourd’hui, j’essaie de ne plus avoir le moindre contact avec mon « demi-frère » mais comme ma mère et mon beau-père n’ont pas coupé le contact avec lui, ça lui arrive de venir à la maison, comme si de rien n’était. Quand ça arrive, j’appelle mon meilleur ami qui vient me chercher.
Arès, 15 ans, collégienne, Nouvelle-Aquitaine
Crédit photo Pexels // CC Mart Productions
À lire aussi…
Je me suis remise de mon viol, par Sarah, 16 ans. La jeune fille a mis deux ans à se reconstruire, petit à petit. Elle a pu compter sur l’aide de ses proches, de sa mère et de la justice.