« Je joue au basket avec ma tête »
Lâcher le poignet, tirer et retenter. Ces gestes je les ai répétés un nombre incalculable de fois. Mais, ce jour-là, c’était un match pas comme les autres. Dès la première période, j’ai rentré un trois points, un tir longue distance, ce que je ne fais pas d’habitude. Ça nous a donné l’avantage et ça m’a donné la confiance. J’ai aidé mes coéquipiers, j’ai fait quelques actions déterminantes avec des interceptions décisives, je me suis vraiment exprimé sur le terrain ! Je me souviens de ce premier match de basket avec mes potes, un après-midi d’été en 2017 sur le terrain de Sevran. J’étais en sueur mais heureux. Pour la première fois, je me sentais bon à un sport avec des valides alors que je suis né avec un handicap à la jambe gauche qui me fait boiter. Le syndrome de Little.
Au départ, j’étais plutôt fan de foot. Mais ce sport me ramenait toujours à mon infériorité car j’ai du mal à coordonner les mouvements de mes jambes. Au foot, j’ai l’impression de jouer comme un pantin désarticulé. J’ai découvert le basket en EPS au collège. Au début, je n’étais pas très bon, mais j’étais déjà meilleur qu’en foot. J’ai commencé à jouer tout seul, à tirer sans utiliser mes jambes mais plutôt la force de mes bras. J’ai regardé beaucoup de vidéos de coaching. Au bout de cinq mois, j’ai joué en équipe.
« Mon handicap n’est plus une faiblesse »
Maintenant, je joue deux à trois fois par semaine avec mes amis ou ma famille sur un terrain près de chez moi. Vu que je n’ai pas les mêmes qualités physiques, je mise sur la stratégie, c’est-à-dire que je joue avec ma tête. J’analyse le terrain sans le ballon. Je fais des écrans pour empêcher le joueur adverse de passer et créer des occasions pour mon équipe. En jouant avec les valides, je montre mes capacités défensives et je prouve à mon équipe que je peux être fiable au-delà de mon handicap.
Ce sport m’a permis d’avoir un meilleur contrôle de mon corps et de mes mouvements. De quoi me tenir sur un pied d’égalité avec des valides. Ça a fait évoluer ma vision du sport collectif en prenant en compte les particularités de chacun de mes coéquipiers. Mon handicap n’est plus une faiblesse, je le vois comme une autre manière d’appréhender le sport.
Sayeh, 22 ans, étudiant, Villeparisis
Crédit photo Pexels // CC Monstera production
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