Le grand huit émotionnel d’un jeune futur père
Mi-novembre 2022. J’ai 25 ans. Un soir, ma copine me lance une chose sur la table. Je récupère l’objet et je vois qu’il s’agit d’un test de grossesse. C’est le choc. Je me suis toujours dit que j’étais une personne stérile. En retournant le test, je vois écrit « enceinte 1-2 semaines ». Je commence à stresser grave. À ce moment-là, j’ai bien cru que mon cœur allait arrêter de battre.
J’interpelle ma copine, qui a filé entre-temps dans la salle de bain. Je lui demande si c’est une blague. Dans le passé, on m’avait déjà fait le coup. Des ex me disaient qu’elles étaient enceintes de moi pour me récupérer. Elle me confirme que c’est bien vrai. Je vais devenir papa. Je n’y crois pas. Je lui dis de prendre rendez-vous avec un gynécologue pour qu’il n’y ait pas de doute.
« It’s a boy »
Début décembre, nous voilà dans le cabinet de la gynéco. On patiente d’abord plus de dix minutes en salle d’attente. Le stress monte. Une dame vient nous chercher. Ma copine s’installe tranquillement sur le siège. L’échographie peut commencer. Sur l’écran, on aperçoit une sorte d’œuf. Je ne sais pas trop ce que c’est alors je pose la question à la gynéco. Elle nous annonce qu’on va bel et bien devenir parents dans neuf mois et que le terme pour accoucher sera environ le 2 août 2023. Je réalise enfin que je vais être papa. À la fin de l’examen, la gynéco nous donne un nouveau rendez-vous dans trois mois pour suivre l’évolution de la grossesse et connaître le sexe du bébé.
Fin février ou début mars, nous revoilà donc au cabinet pour une nouvelle échographie. La plus importante pour moi, car je vais savoir si je vais être papa d’un garçon ou d’une fille. On a parié avec ma copine. Pour moi, ce sera un garçon. Pour elle, une fille.
L’échographie se déroule bien. Vient enfin le verdict tant attendu : c’est un garçon ! J’ai les larmes aux yeux. J’ai même crié : « It’s a boy. » Si ça avait été une fille, je ne sais pas comment j’aurais réagi concrètement. C’est à ce moment-là qu’on a commencé à choisir le prénom du bébé. Je voulais l’appeler Donatello mais ma copine n’était pas d’accord. Nous avons mis plusieurs prénoms sur des bouts de papier et nous avons tiré au sort. Le papier que nous avons tiré portait le prénom Lyenzo, un joli prénom pas commun.
« Ma copine ne sentait plus le bébé bouger »
Au fur et à mesure que le ventre de ma copine s’arrondit, j’abandonne peu à peu mes craintes et mes incertitudes pour embrasser pleinement mon rôle de futur papa.
Mai-juin, ma copine est déjà enceinte de six, sept mois. Bientôt la fin du terme, c’est à ce moment que ça a été le plus compliqué pour ma copine, et surtout pour moi. Tous les trois, quatre jours, on faisait des allers-retours à la maternité parce qu’elle avait des contractions. C’était insupportable pour elle mais beaucoup trop tôt pour le bébé de sortir.
Nous arrivons en juillet. Le jeudi 13 juillet 2023 pour être précis. Il est 13 heures environ quand nous appelons le Samu. Ça faisait quelques jours que ma copine ne sentait plus le bébé bouger. Nous sommes très inquiets. Le Samu arrive et l’accompagne à la maternité, je la rejoins directement là-bas. Nous attendons presque deux heures. Lors de l’attente, on entend un homme s’énerver contre le personnel. Il vient d’apprendre que sa femme, enceinte, a perdu son bébé alors qu’elle attend depuis quatre heures aux urgences. Ça me fait flipper. Les médecins finissent par arriver.
Le bébé a un faible pouls alors ils gardent ma copine 24 heures en surveillance, puis 24 heures supplémentaires. Le samedi 15 juillet, elle a de très grosses contractions mais ce n’est toujours pas le moment pour que le bébé sorte. Je commence à m’énerver sur les médecins et du coup ils contactent la gynéco de ma copine pour savoir s’ils peuvent la déclencher. Elle est enceinte de 36 semaines et 5 jours. Les médecins nous annoncent qu’il faut attendre le mardi 18 juillet pour qu’elle soit à 37 semaines de grossesse. Soit encore trois longues journées d’attente.
« Le moment le plus intense de ma vie »
Mardi 18 juillet, nous y sommes. C’est enfin le jour du déclenchement. Les médecins vérifient si le col de l’utérus de ma copine est suffisamment dilaté. Ça n’est pas le cas. On attend jusque dans la soirée. Des contractions de plus en plus fortes arrivent enfin. Le lendemain, c’est-à-dire le mercredi 19 juillet, les médecins décident de donner des médicaments à ma copine pour accélérer le travail. Ils ne prennent effet que dans l’après-midi : les contractions sont régulières. On nous envoie en salle de travail. Mais je ne suis pas au bout de mes peines…
Aïssa a donné naissance à deux enfants : une fille, puis un garçon. Pour elle, aimer le second n’avait rien d’une évidence, car la grossesse n’était pas désirée.
Notre fils ne montre le bout de son nez que le lendemain. Le jeudi 20 juillet à 4h02, je deviens papa. C’est le moment le plus heureux et le plus intense de ma vie.
Sept mois se sont écoulés depuis. Mon fils grandit tellement vite, c’est incroyable. J’aurais aimé que ma grande sœur soit présente pour le voir grandir et me voir grandir avec lui. Elle m’aurait épaulé, accompagné dans tous les moments de galère. Elle me manque horriblement. Parfois, je vois mon fils fixer le plafond et sourire. J’ai entendu dire que les bébés voyaient les anges. C’est sûrement l’ange de sa tante.
Jordan, 26 ans, volontaire en service civique, Lille
Crédit photo Pexels // CC MART PRODUCTION