Lucie H. 22/12/2021

Ma petite grand-mère, cette grande responsabilité

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La grand-mère maternelle de Lucie n'est plus autonome. Alors sa famille l'a accueillie à la maison, entre rires et crises de nerf.

Je l’appelle Wama, c’est son surnom, ça veut dire grand-mère en cantonnais. Ça fait à peu près deux ans que je vis quotidiennement avec elle. On ne peut pas la mettre dans une maison de retraite et personne dans la famille ne voulait porter le fardeau de s’occuper d’elle, et ça se comprend. Elle est vieille.

Elle ne parle pas très bien français et ne sait pas s’occuper d’elle-même. La totale quoi ! Si ma mère ne l’avait pas « repêchée », elle serait sûrement seule dans son petit appart à Paris, pas loin de La Motte-Picquet, morte affamée. Bref, c’est juste pour vous mettre dans le contexte.

Grosse odeur de poussière et de renfermé… beurk

Imaginez, un soir normal. Il est 20 heures dans ma maison et ça fait déjà plusieurs heures que je suis rentrée. Toute ma famille est exténuée de cette longue journée. C’est l’heure de dîner, mon père crie : « À table ! » Mes frères et moi courrons dans les escaliers, histoire de ne pas énerver notre cher papa. « Quelqu’un va chercher Wama ? » Personne ne réagit à la demande de ma mère, c’est donc encore à moi de le faire. Je me lève, ennuyée. Je toque à sa porte. Pas de réponse. Je rentre. Grosse odeur de poussière et de renfermé… beurk. Elle est là, dans son lit, sur sa tablette. Elle joue à un de ses multiples jeux de boules avec le son à fond. « On mange. » Elle ne comprend pas, j’ai l’habitude.

Quand je retourne à table, ils ont déjà commencé à manger. Encore une fois, j’ai l’habitude. Wama arrive avec son déambulateur. ON PEUT ENFIN COMMENCER PURÉE !

Et bim ! on remettait une portion dans son assiette

Le problème avec ma grand-mère, c’est qu’elle ne veut jamais manger. Elle ne fait que diviser le contenu de son assiette en deux moitiés et elle remet une des moitiés dans le plat. Au début, c’était fun. On trouvait des moyens de la faire manger, tous plus délirants les uns que les autres. Par exemple, on lui faisait croire qu’il y avait un chat, et paf ! elle se retourne, et bim ! on remettait une portion dans son assiette. Le tour était joué. C’est comme ça, mais c’est épuisant.

Et puis, tout le long de la journée elle ne fait que grignoter… Elle nous bouffe tous nos yaourts, c’est carrément une addiction. Le soir quand je rentre, je vois une multitude de petites cuillères mises à la va-vite dans le robinet et une grosse pile de yaourts posés sur le compost. Ce qui énerve fondamentalement mon père, ma mère, mes frères, et moi.

Sa présence crée des problèmes familiaux

Je suis une ado « en pleine période de rébellion », j’ai des parents stricts, je n’ai pas que ça à faire moi ! Mes parents non plus d’ailleurs. Ils bossent jusque tard, mon grand frère c’est pareil, et mes frères sont plus petits et s’en foutent. On a une dame qui vient en journée pour s’occuper d’elle quand personne n’est à la maison, mais en dehors de ça… Wama ne sort plus en extérieur, même dans mon jardin. Elle ne sort plus de sa chambre et passe sa journée à dormir.

Vivre dans une famille nombreuse n’a pas que des mauvais côtés. Entre les brunchs et le ménage en musique, Dialla ne se sent jamais seule !

Sa présence crée beaucoup de tensions : mon père qui subit de devoir vivre avec sa belle-mère, et ma mère qui essaie de la faire manger en dehors de ses grignotages. Le stress de ma mère et mon père qui en rajoute des couches, ça ne va pas ensemble. Ce n’est pas très cool et ça me rend triste, ça m’énerve et m’agace.

J’adore ma grand-mère mais je dois m’occuper d’elle tout le temps. Sa présence crée des problèmes familiaux, des tensions et tout ce qui va avec… C’est dur à vivre quoi.

Lucie, 15 ans, lycéenne, Paris

Crédit photo Unsplash // CC Danie Franco

 

Les proches aidant·e·s

Un·e proche aidant·e, c’est quoi ?

Venir régulièrement en aide à une personne de son entourage en perte d’autonomie, soit à cause de l’âge, soit après une maladie ou un accident, c’est être aidant·e. Environ 11 millions de Français·es le sont, et la majorité s’occupe d’un parent âgé.

Ce rôle a un impact sur le quotidien

47 % des aidant·e·s déclarent que ce rôle a des conséquences sur leur santé physique ou mentale. C’est davantage le cas des femmes, et des conjoint·e·s aidant·e·s. Parmi celles et ceux qui s’occupent de leurs parents, 8 % cohabitent avec.

Les enfants aidant·e·s ne sont pas reconnu·e·s

Beaucoup de mineur·e·s sont aidant·e·s d’un parent. Ils et elles ne sont pas reconnu·e·s comme tel·le, alors qu’une charge de travail et mentale importante repose sur leurs épaules. Ce rôle empêche aussi l’enfant de se construire, puisqu’il le met à une place qui n’est pas la sienne.

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