Lind E. 12/01/2021

Maman célibataire à 16 ans, adulte à plein temps

tags :

J'ai eu mon enfant à 16 ans. Quand il est allé à l'école, j'ai décidé d'y retourner aussi. Je me devais de remplir mon rôle de maman jusqu'au bout, pour lui !

Nous étions deux femmes dans la chambre. Vue sur la fenêtre, les deux lits à côté, une table à langer pour le bébé. J’ai donné naissance à mon enfant à l’hôpital de la Roseraie, à Aubervilliers. C’est là où je l’ai vu et pris dans mes bras pour la première fois. Mon petit bout de chou, Aymen, celui qui a changé ma vie, celui qui a fait de moi une autre personne. Allais-je être une bonne maman ? 

J’ai tout de suite été très émue. Les jours passaient et j’angoissais tellement de ne pas avoir son père à nos côtés… Tout d’un coup, je devais veiller à la sécurité de mon enfant, subvenir à ses besoins, me lever la nuit, faire des biberons, acheter des vêtements. Je ne pouvais plus penser à moi, et tant mieux. 

Il n’a pas assumé donc je suis retournée chez mon père

Parce que, moi, j’avais déjà fait ma jeunesse. J’ai arrêté les études en troisième à cause du divorce de mes parents. Ça m’a beaucoup pénalisée. Je n’allais plus à l’école. J’ai habité chez mon ex-copain pendant deux ans et demi : c’est là que je suis tombée enceinte. Il n’a pas assumé donc je suis retournée chez mon père. 

Je m’en suis sortie toute seule avec cet enfant. Au fil du temps, j’ai appris à m’en occuper. Ça m’a permis d’en savoir plus sur la vie, car un enfant c’est énormément de responsabilités. Je me devais d’être là pour lui, quoi qu’il arrive.

J’ai attendu qu’il rentre à l’école pour moi aussi y retourner !

Aujourd’hui, ça fait trois ans, il a bien grandi et moi aussi. À son entrée à l’école, j’ai tout de suite compris que j’avais l’avenir de mon enfant entre les mains, qu’il fallait que je m’en sorte pour lui. Et ça explique aussi ma présence à l’E2C (école de la deuxième chance). Je n’aime pas l’école, mais avoir mon fils m’a fait comprendre que je ne peux plus faire ce que je veux. Je dois me cultiver, me stabiliser.

Je cherche une formation ou un emploi pour me lancer dans la vie active. Ça va changer pour mon enfant, il verra sa mère se lever tous les matins, essayer de s’en sortir comme elle peut malgré le fait qu’elle soit seule. 

Dans cette émission de Grand bien vous fasse ! sur France Inter, Ali Rebeihi et son équipe se sont penchés sur la situation souvent précaire des mères célibataires qui doivent assumer la charge d’élever seules leurs enfants.

Jusqu’à présent, c’était compliqué par rapport à l’absence de son père, et je n’avais pas de travail parce qu’il était trop petit. J’ai attendu qu’il rentre à l’école pour moi aussi y retourner ! En attendant, j’étais au RSA. Pour gérer mes dépenses, il a fallu que je me prive pour mettre de l’argent de côté, pour que lui s’en sorte aussi. J’achetais ses couches mais pas de petits pots, c’était trop cher pour moi et pas bon pour sa santé ! Alors je les faisais moi-même. C’est plus naturel. Et puis vu que je ne travaillais pas, ça me donnait envie de cuisiner. Même les vêtements, faut gérer ! Ça grandit trop vite un enfant, donc acheter des marques, c’est une erreur à ne pas faire : de l’argent perdu pour rien ! 

J’ai dû apprendre à tout gérer toute seule

Sur mon RSA de 720 euros, j’arrivais à mettre 300 euros de côté dans un livret A pour mon fils. J’ai réussi à mettre presque 7 000 euros pour lui depuis sa naissance ! Je gérais tout, toute seule, et heureusement j’avais mon père pour me conseiller. Maintenant, je sais gérer un enfant, un budget, les courses, les vêtements.

Les démarches pour l’inscription à la crèche, je les ai faites toute seule aussi. Je les ai contactées à plusieurs reprises, les crèches, la mairie, pour trouver une place à mon fils avant ses 3 ans. C’était compliqué parce que c’était complet partout. C’est compliqué de trouver la meilleure chose pour son enfant.

Devenue maman à 15 ans, Lolita a appris à naviguer entre les critiques de ses proches et les doutes qui l’accaparaient. Mais maman un jour, maman toujours, elle a décidé de se débrouiller seule et d’élever son enfant comme elle l’entendait. Un récit à retrouver dans notre livre Vies majuscules – autoportrait de la France des périphéries.

En tous cas, avoir un enfant, ça nous change, qu’on le veuille ou non. Quand je repense à toutes ces années, ça m’a rendue mature. J’ai appris à être autonome et indépendante. Je me dois d’être exemplaire. Je suis maman, je ne suis plus une enfant.

 

Lind, 20 ans, stagiaire, Blanc-Mesnil

Crédit photo Unsplash // CC  Charles Deluvio

Partager

1 réaction

  1. Bravo à vous, le métier de parent est à la fois merveilleux et difficile. Pensez aussi à vous, à votre bonheur et il sera heureux.

Voir tous les commentaires

Commenter