Municipales (2/5) – La politique c’est pas que pour les hommes de 50 ans
Ça faisait six mois que je bassinais tout le monde à dire que j’allais revenir vivre à Saint-Germain-des-Fossés, que la ville était en train de s’éteindre… Plus je voyais ce que faisait la municipalité actuelle et plus je me disais : « Merde, les gens qui ont ce profil politique classique ils font n’importe quoi ! » Je suis née ici, ma famille est installée ici depuis les années 1850. J’y suis attachée et c’est là que je veux être. Je m’étais dit que je me présenterais peut-être aux élections municipales dans dix ans. Mais… Pourquoi pas maintenant ?
La politique c’est pour « les gens importants »
Il y a quelques mois, je me sentais pas légitime à me lancer en politique. Pour moi, c’était réservé à certaines personnes : la cinquantaine, ancrées localement parce qu’elles sont cheffes de telle boîte… Des gens qui ont « de l’importance ». Et je me disais : « Moi tant que j’ai pas fait un truc fort pour la commune et que j’aurai pas 40-50 ans, j’aurai moins ma place. »
Je voulais pas voler la place de quelqu’un. J’avais l’impression qu’il fallait juste être content d’avoir une place en fin de liste. Et qu’on se sente « élu » quand un élu au pouvoir nous dit : « On a une place pour toi. » En fait, il y a un côté caste sociale en politique. Moi je viens d’une famille d’ouvriers, d’employés, et je pense que ça a participé.
«Prendre le pouvoir en 2020, pourquoi pas toi ?» Tel est le slogan de l’action menée par l’association Tous Elus pour une meilleure représentation de la jeunesse aux élections municipales. Sandrine a bénéficié de leur accompagnement et ça l’a beaucoup aidé à se lancer !
Il y a 500.000 postes d’élus municipaux à pourvoir dans toute la France, vous êtes candidat ? https://t.co/cuSac8SIhg
— Les Echos Start (@EchosStart) November 19, 2019
Comme à Générations Cobaye, où j’étais directrice de com’. Dans les conventions, les conseils d’administration de groupes, je prenais la parole cinq minutes au début, ou cinq minutes à la fin. Tout le reste, c’était les mêmes personnes qui prenaient la parole : des hommes, la cinquantaine d’années en écrasante majorité.
Les élections municipales ? Pourquoi pas moi ?
À l’approche des élections municipales, j’ai vu qu’il y avait une liste d’opposition en train de se lancer à Saint-Germain-des-Fossés. Je trouvais ça génial. Une liste ouverte à tous où il n’y avait pas une hiérarchie hyper lourde. Alors je me suis dit que j’allais leur proposer d’être bénévole pour la communication.
Pour les élections municipales de 2020, la ZEP a recueilli les témoignages de jeunes candidats. Car pour s’engager politiquement, pas besoin d’attendre la cinquantaine !
1/6 : « Un jeune candidat noir, ça ne laisse pas indifférent »
Depuis, je suis sixième de liste. Et c’est quelque chose qui paraissait normal pour à peu près tout le monde autour de moi… sauf moi. À la première réunion, je prenais pas la parole, j’écoutais ce qu’il se passait. Mais l’âge s’est effacé au bout de quelques minutes. Colette, une retraitée, quatrième de la liste, m’a posé plein de questions hyper bienveillantes sur qui j’étais, ce que je faisais. Elle m’a proposé qu’on tracte ensemble dans les boîtes aux lettres, pour faire connaissance et découvrir son quartier. Elle s’était engagée avant moi et ça a contribué à ce que je me sente accueillie.
En fait, le pouvoir, il faudrait le renverser : ceux qui se sentent les moins légitimes sont parfois les plus légitimes.
Sandrine Gras, 29 ans, candidate à Saint-Germain-des-Fossés (Auvergne-Rhône-Alpes)
Crédit photo © Sandrine Gras // Visuel La ZEP