Léa F. 12/07/2020

Non, je n’ai pas d’alternative à la voiture

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Dans mon village du Gers, il n'y a ni bus ni train. Ici, rouler en voiture n'est pas une liberté, mais une nécessité. Pour les courses, les activités... Ça me coûte du temps et de l'argent.

Depuis quatre mois, ma mère n’a plus de voiture. Depuis quatre mois, ma mère ne fait quasiment plus rien. 

Dans le Gers, on trouve des tracteurs, des champs de maïs, des vignes, de l’Armagnac et beaucoup de petits villages. Pas d’autoroutes et surtout, pas de transports en commun. Attention, le Gers est tout de même maintenant équipé en fibre optique ! Mais pas de transports en commun.

Je vis dans un village du Gers depuis mes 7 ans. Il n’y a pas de gare, pas de bus et pour aller faire les courses ou partir en famille, le covoiturage ne fonctionne pas des masses. Résultat : la voiture devient quasi obligatoire. Dès le moment où tu as une voiture, tout va bien ! Enfin, presque. Une seule voiture pour faire les courses, amener les enfants à l’école quand ils ratent le bus, aller travailler, aller chercher les enfants à l’école après l’aide aux devoirs, faire les courses, aller au petit cinéma du village d’à côté, aller au resto, amener les enfants aux anniversaires ou chez les copains. 

Il faut prendre le temps pour tout

Vous vous dites que c’est gérable ? C’est sans compter les temps de trajet. Pour un aller simple : 15 minutes pour aller faire les courses, 45 minutes pour acheter des vêtements, 15 minutes pour aller au cinéma, 15 minutes pour aller au collège en voiture et presque 1 heure pour aller au collège ou au lycée en bus scolaire. Et nous ne sommes pas les plus isolés. Entre les tracteurs qui roulent à 20 km/h et les animaux qui traversent la route, la route est parfois lente. Le temps est plus long à la campagne, il faut prendre le temps pour tout. 

Dans les campagnes et certaines villes, la voiture reste un moyen de déplacement pratique et souvent nécessaire. Le Parisien a recueilli le témoignage de trois automobilistes qui partagent leur expérience.

Quand j’étais petite, avec mon frère et ma sœur, ma mère faisait souvent le taxi pour nous. Quand elle travaillait, quand elle était en week-end, quand elle était en vacances. À 18 ans, j’ai passé le permis par nécessité. La liberté ! Ou pas. Toujours pas de seconde voiture, je devais emprunter la voiture de ma mère qui se retrouvait donc coincée à la maison. Je me suis retrouvée à devoir faire à mon tour le taxi pour ma mère. 

Mais quand on vient du Gers, niveau fac, il n’y a pas beaucoup de choix. Moins d’un an après avoir eu le permis, j’ai dû déménager à Toulouse. Ça fait maintenant deux ans et demi et, à Toulouse, plus besoin de voiture. 

Elle est dépendante de la bonté des autres

Aujourd’hui, ma mère vit à deux pas de son travail, donc pas besoin de prendre la voiture mais, pour tout le reste, si. Un jour, la voiture s’arrête. Impossible de la réparer. La banque n’accepte pas le prêt pour en racheter une. La galère. C’est comme ça que ma mère s’est retrouvée sans voiture pendant quatre mois. Pour faire les courses, les magasins ne livrent pas à la campagne alors il faut qu’elle appelle un ami ou ma sœur. Pour aller faire du sport à la salle, il faut qu’elle appelle un ami ou ma sœur. Pour acheter des vêtements, elle doit commander en ligne, parce qu’elle en a marre d’appeler ma sœur pour lui demander. Et sortir prendre l’air, aller faire un tour en ville et faire distraitement les magasins, elle ne le fait pas. Parce qu’il faut appeler quelqu’un pour se faire porter. 

Résultat : elle va travailler et rentre chez elle. Quand elle peut, elle va faire les courses à pied. C’est loin, les courses sont vite finies, elle ne peut pas tout porter de toute façon. Elle est dépendante de la bonté des autres et de leur emploi du temps. 

Léo a grandi dans une maison isolée, en Haute-Garonne, et n’a jamais eu beaucoup d’infrastructures et d’activités pour s’occuper. Alors il surfe sur internet, beaucoup.

La campagne, c’est un endroit isolé, oublié des personnes de la ville. On l’a vu quand l’État a souhaité augmenter les taxes sur le carburant. « Vous n’avez qu’à moins prendre la voiture », « prenez une voiture essence sinon vous serez surtaxés », « prenez une électrique, c’est mieux l’électrique », … À la campagne, les gens ont besoin d’une voiture. Pour pouvoir changer de voiture et acheter une essence, on fait comment quand la banque refuse de nous prêter de l’argent ? Une électrique ? Admettons, c’est pratique ! En revanche, on n’a pas forcément un endroit où mettre la borne pour la recharger. Prendre moins souvent la voiture ? Je dois vraiment expliquer pourquoi cette phrase m’énerve ?

 

Léa, 20 ans, volontaire en service civique, Toulouse

Crédit photo Unsplash // CC Darya Skuratovich

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