Sportif de haut niveau, c’était trop de pression
Le tennis est arrivé dans ma vie lorsque j’avais 3 ou 4 ans. Sportif, j’ai vite été repéré comme un bon joueur et j’ai intégré le GAC [Groupe Avenir Club]. J’ai vite eu envie de progresser dans ce sport et d’en faire une passion, voire mon métier, même si cela peut paraître fou. Rien n’avait plus d’importance que le tennis pour moi. La journée comme le soir, je rêvais d’être sur le court. Lorsque j’étais sur le terrain, j’étais tout émerveillé. Au début, je faisais un tournoi tous les mois. Puis c’est passé à deux, puis trois, puis tous les week-ends. Je voulais faire des tonnes de tournois, j’en mourrais d’envie.
J’avais environ cinq heures de cours par semaine, plus une heure d’entraînement physique. Leur but était de former les meilleurs joueurs. C’est à ce moment-là que j’ai ressenti une pression, mais elle ne me dérangeait pas encore. Au début dans le groupe, même si l’on ne s’entraînait pas tous ensemble, nous étions 20. Petit à petit, le nombre est descendu et nous avons terminé à sept.
Ils voulaient qu’on devienne les meilleurs joueurs français
Quelques années passèrent et même si je continuais à m’entraîner et à faire des tournois, j’en faisais moins qu’au début. J’adorais toujours ça mais je faisais d’autres choses, comme le karaté.
Je sentais que mes coachs continuaient de me mettre la pression, à moi et à mes parents, bien plus qu’auparavant. Ils n’arrêtaient pas de me dire qu’il fallait que je joue plus, que je fasse plus de tournois. Que même si j’étais l’un des meilleurs, ce n’était pas pour autant que je devais moins jouer que les autres. Ils voulaient qu’on devienne les meilleurs joueurs français, notamment parce que l’une des filles avec qui l’on s’entraînait était la meilleure joueuse française 2005.
À travers le témoignage du jeune Gabin, le documentaire Terre battue raconte la pression subie en tant que sportif et dépeint un quotidien entièrement tourné vers le sport.
Lorsqu’ils apprirent que je faisais du karaté, il y eut une sorte de jalousie. Ils me posèrent un ultimatum : « Soit tu arrêtes le karaté, soit le tennis. » C’est à ce moment-là que j’ai senti une réelle pression.
Si je m’étais forcé, j’aurai perdu ma passion pour ce sport
Mes parents n’avaient pas beaucoup de contact avec mes entraîneurs, mais un jour je les ai vus parler un long moment ensemble. Lorsqu’ils revinrent vers moi, je sentais que quelque chose n’allait pas. Ils n’osaient pas me regarder dans les yeux. Ils eurent du mal à se lancer. Ils respirèrent un grand coup, puis m’annoncèrent la nouvelle : j’étais exclu du groupe parce que je ne jouais pas assez en dehors des cours.
Je suis rentré chez moi, j’avais le démon, je voulais tout casser. Je m’entraînais peut-être moins que les autres joueurs mais j’étais loin d’être moins bon qu’eux !
Jérémy aussi est très sportif. Il habite à la campagne ; alors avec tous ses entraînements et ses autres activités, il passe sa vie dans les transports.
Avec le recul, je ne suis pas vraiment déçu d’être parti. Je me dis que si je m’étais forcé à jouer, j’aurai sûrement perdu ma passion. Je préfère continuer à un niveau moins élevé plutôt que de me forcer pour satisfaire les entraîneurs. En grandissant, je me suis découvert d’autres passions qui m’ont fait comprendre que le tennis était une grande passion mais pas au point de tout sacrifier pour être le meilleur.
Alon, 14 ans, collégien, Neuilly-sur-Seine
Crédit photo Unsplash // CC Christian Tenguan
Ça ne m’étonne pas du tout qu’il y ait une telle pression ! (qui est, d’un point de vue psychologique, complètement contre-productive, d’ailleurs). Quelqu’un de mon entourage a fait du pôle espoir au lycée (dans une autre discipline) et elle pense que le pôle il ne faut pas y rester trop longtemps. Une de ses amies a arrêté la discipline, sans doute parce qu’elle a fait « trop d’années de pôle ». C’est vraiment un milieu compliqué, surtout si on y rajoute des problèmes de financement qui doivent sans doute exister… Il faut se dire que les entraîneurs mettent parfois la pression aux jeunes parce qu’eux-mêmes ont une hiérarchie qui leur met la pression. C’est en haut de la pyramide qu’il y a un problème et ça retombe sur les ados !
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