Agressions : j’ai peur quand je marche dans la rue
J’ai peur de sortir seule dans la rue, que ce soit la nuit ou le jour. Chaque homme que je croise est potentiellement une menace. Chaque sortie en extérieur devient une source d’angoisse. Et ça, je m’en suis rendue compte parce que les remarques, interpellations et agressions sexistes/sexuelles sont bien trop fréquentes. C’est anormal !
J’en discute beaucoup avec mes ami·e·s, qui sont très compréhensifs et/ou qui vivent la même chose. Ça fait du bien de pouvoir s’exprimer et de se sentir comprise.
Tout le monde n’est pas conscient de ces agressions
J’en parle rarement avec mes parents. Parce que mon père ne s’en rend pas compte et il n’est pas très bien informé. Quand j’essaye d’aborder le sujet des femmes avec lui, je vois bien qu’il pense que le patriarcat est quasiment fini. Peut-être aussi que c’est difficile pour un père d’admettre que sa fille puisse être en danger et qu’il ne peut pas faire grand chose contre ça. Je ne lui en veux pas vraiment. Je pense que ce qui compte pour le futur, c’est de faire évoluer les mentalités des nouvelles générations.
J’ai essayé d’en parler avec des hommes que je connais moins, mais pour être honnête ma patience a été mise à rude épreuve. La plupart d’entre eux me répondent « Oui, mais les hommes aussi ». S’ils veulent défendre une cause, il ne faut pas en écraser une autre. Certains hommes ne se rendent pas compte de l’ampleur de ce problème de société. En effet, ils prétendent vivre les mêmes situations que les femmes. Mais, eux, à l’inverse, ils ne sont pas sans cesse sexualisés et traités comme des objets de désir et de fantasme.
Non, le harcèlement ne dépend pas de la tenue que la victime porte. J’ai été agressée, insultée, regardée de manière déplacée à toute heure de la journée, avec tout type de tenue, par tout type d’hommes. Cela va des regards insistants et des insultes jusqu’aux attouchements.
Nos peurs sont légitimes
Avec les réseaux sociaux, je constate que cela touche la grande majorité des femmes, et ça m’attriste énormément. Tous ces témoignages sont indispensables pour informer, sensibiliser et libérer la parole : récemment, on pouvait voir que des hommes éjaculaient sur des femmes dans la rue et les transports en commun. Cela me rend d’autant plus méfiante et anxieuse. Je n’en ai pas honte, car je sais que nos peurs sont légitimes.
Ces agressions et insultes me font ressentir une profonde humiliation et du dégoût. Mais, je n’ai plus honte. Concernant les viols que beaucoup de femmes subissent, dont moi, je trouve que c’est encore différent, parce que j’ai toujours honte et je me sens toujours sale. Malgré le fait que je sache que ce ne soit pas de ma faute, une voix au fond de moi me dit que j’aurais pu faire quelque chose.
Développer des techniques anti-agressions
Être une femme seule dans la rue, c’est comme avoir un poids. Se sentir observée de la pire des façons et devoir se méfier de chaque être masculin que l’on croise. Au quotidien c’est très lourd à porter. Cette pression me rend incapable de me sentir bien et libre lorsque je suis seule dehors.
Au fur et à mesure que le temps passe, je développe des techniques pour me préparer au mieux à une éventuelle agression. Par exemple, mettre mes clés entre mes doigts pour pouvoir me défendre, prendre mon téléphone dans ma main à l’intérieur de ma poche, me mettre à courir au moindre doute.
Tous les hommes ne sont pas dangereux, mais on ne peut pas se permettre de relâcher notre attention. Si quelqu’un vous propose un paquet de bonbons et vous dit qu’il y en a un seul empoisonné, vous vous méfieriez de tout le paquet.
Luna, 19 ans, étudiante, Rennes
Je comprends parfaitement ce que vous dites car ma fille décrit la même chose. Sachez que dans la rue il y a des femmes plus âgées comme moi qui sont prêtes à vous soutenir. 🙂