Flora J. 29/02/2024

Choisir de vivre en foyer

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Pour échapper à l’atmosphère violente qui régnait au sein de sa famille, Flora a choisi de partir vivre en foyer. Une démarche qu’elle a assumée seule, jusqu’au bout.

Chez moi, c’était infernal. Je me faisais crier dessus, menacer, dénigrer, critiquer… On ne prenait pas soin de moi. Je ne m’entendais avec personne, chaque minute était difficile. Je vivais chez mon père et ma belle-mère parce que ma mère n’était pas stable financièrement et mentalement. Mon frère et ma sœur vivaient avec nous et on avait tous la même vision de ce qui se passait à la maison.

Ma belle-mère est coiffeuse. Mon père est restaurateur, gérant de deux cafés. Je n’ai jamais aimé ma belle-mère. Je dirais même que je la déteste. Les gens qu’on connaissait nous disaient qu’elle avait l’air gentille. Mais l’envers du décor était tout l’inverse. Elle faisait tout le temps des remarques et se plaignait à mon père. Lui était tout le temps d’accord avec elle et ne nous défendait jamais. Il faisait des commentaires, en mode : « Aime-la, respecte-la, elle te fait à manger, elle t’achète des habits. »

Ce n’est que bien après, qu’il a admis qu’on avait raison depuis le début. Ils ont commencé à beaucoup s’embrouiller. Mon père ne savait pas dans quel établissement elle travaillait alors il appelait tous les salons de coiffure pour lui demander de rendre des comptes. Un jour, il l’a trouvée. Elle a dû démissionner. Les disputes se sont multipliées, elles étaient de plus en plus violentes. Ça nous empêchait, nous les enfants, de grandir comme des adolescents normaux. Ils sont allés jusqu’à se taper dessus et se menacer avec des couteaux. Pour mon père, ça s’est fini en garde à vue. Il n’a pas le droit de retourner dans notre maison.

Chercher un endroit safe

À ce moment-là, j’ai commencé à réfléchir. Je me suis posé des questions. Comment allait être mon avenir ? Est-ce que ça s’arrangerait un jour ? Une de mes profs m’a aidée. C’était une prof d’histoire du collège, avec qui je m’entendais bien. Je lui ai expliqué ma situation et elle a tout suite compris. Elle a cherché des solutions.

J’ai compris que le foyer était peut-être une meilleure option pour vivre. C’est un hébergement pour les personnes qui sont en difficultés familiales et financières. J’en ai parlé aux services sociaux, notamment l’association Cithéa, pour les enfants qui ont une situation difficile. Ma famille et moi, on avait des rendez-vous avec eux, avec la psychologue. On parlait de ma scolarité et de ma famille.

Au départ, la psy se répétait beaucoup, elle disait qu’au bout d’un moment, ça allait s’arrêter. Sauf que c’était toujours la même chose chez moi, même au bout de je ne sais pas combien de rendez-vous. Alors j’ai fini par y aller.

Ma nouvelle vie au foyer

Mon premier jour au foyer a été angoissant et joyeux à la fois. Je ne savais pas si j’allais être seule ou me trouver des amis. En tout cas, j’allais enfin me retrouver loin de chez moi. Là-bas, j’ai rencontré ma meilleure amie, avec qui on peut se soutenir. Elle a vécu certaines choses similaires, on se comprend.

En foyer, je me sens plus stable dans tous les domaines : financièrement, scolairement, mentalement et physiquement. C’est ce que je cherchais. À l’école, j’ai de meilleurs résultats. Je suis plus à l’écoute de ce qu’il se passe en cours et je comprends mieux. Le foyer couvre tous les frais. On me donne de l’argent de poche chaque mois, pour les vêtements, l’hygiène et la coiffure. Le reste c’est pour l’anniversaire et Noël.

Au moment où je vous parle, ma vie a basculé depuis un an à peu près. Ça fait dix mois que j’y suis, et tout se passe bien à part quelques petites embrouilles. C’est ça de vivre dans un foyer, on vit en collectivité.

Plus tard, je me vois vivre seule dans une maison, avocate et célibataire, sans contact avec ma famille. Je n’ai aucun souvenir heureux avec elle et je n’en veux pas à l’avenir. Renouer le lien, ce serait comme ressasser le passé. Je pense au métier d’avocate depuis plusieurs années. Je veux faire des affaires familiales. J’avais des doutes mais j’ai eu le déclic pendant l’audience avec ma famille. Car on ne m’a jamais vraiment écoutée et entendue.

Flora, 17 ans, lycéenne, Île-de-France

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