Adil P. 11/01/2021

Ma cité, elle n’a rien à voir avec ce qu’on montre à la télé

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Entre chasse à l’homme et barbecues improvisés, la cité d’Adil est un lieu de vie paisible. Il ne la changerait contre aucune autre.

Dans ma cité tout le monde se connaît, que ce soit les plus grands ou les plus petits. C’est un terrain de jeu, avec des chemins partout. Parfois on fait des chasses à l’homme. Une personne doit attraper toutes les autres qui courent entre les bâtiments. Quand quelqu’un se fait attraper il doit aussi attraper les autres.

Lorsqu’il fait chaud, on organise des tournois de foot. Il y a toujours une équipe qui rage à la fin parce qu’ils perdent tous leurs matchs. On fait ça au city au pied des immeubles, c’est un genre de mini stade de foot. On se pose là, entre garçons, pendant que les filles vont devant le centre de loisirs pour parler ou écouter de la musique. C’est vrai qu’on ne se mélange pas trop entre les filles et les garçons à la cité, sauf au centre, pour jouer aux cartes.

Barbecue et jeux de cartes

On organise aussi des barbecues. Sur Snap on a un groupe où on se donne la date et l’heure. C’est souvent le week-end. On s’organise deux à trois jours en avance et on est parfois 20 à l’arrivée. On a notre petit coin. Un endroit où avant il y avait des bancs un peu partout. Un jour, la mairie les a retirés et n’a jamais rien mis à la place. Du coup, on a créé ce lieu pour nos barbecues. Pour les courses, chacun donne quelque chose. L’important c’est de participer. Seuls les petits ont le droit de ne pas payer. Ils mangent gratos.  Mes potes font les sandwichs avec une demi-baguette et 4 merguez. Tout le monde a son rôle. Moi c’est la cuisson de la viande et l’entretien des braises. Les plus petits font des allers-retours pour venir prendre d’autres sandwichs ou d’autres verres de jus.

Des fois, les plus grands de la cité viennent faire leur sport au city stade. Les 2003, ils flinguent leurs bécanes sur une longue ligne rouge. Quand il pleut, on va tous s’abriter dans le centre de loisirs où il y a deux grandes pièces. Nous on va dans la deuxième pièce où il y a plusieurs canapés avec un placard. Dedans, il y a plusieurs paquets de cartes. Le plus souvent, on joue à un jeu et le perdant repart chez lui toujours avec la main gonflée. On fait un huit américain et les perdants reçoivent un coup sur la main de chaque personne qui réussit à gagner.

Les dimanches, quand le centre est fermé, on se pose devant et on fait des débats sur le rap, le foot et d’autres sujets où tout le monde s’énerve pour rien. Quand on parle de rap on compare les feat. Il y en a qui disent qu’untel a lavé l’autre et c’est comme ça que les débats se lancent. Ça peut durer plusieurs heures.

Les politiques trop loin des cités

A 23 heures, on sort parfois. Pratiquement tous mes potes fument la chicha dans un parking souterrain où il y a une voiture abandonnée. Quand ils ont fini de fumer, on sort du parking pour se poser devant le centre où on reste jusqu’à 2 heures ou 3 heures du matin. Même pendant le couvre-feu. Dans le parking, la police ne baraude jamais, à part quand il y a des gens qui les appellent. Après on rentre chez nous. On se rejoint sur la Play et on joue jusqu’à des fois 5 heures ou 6 heures.

Je suis heureux d’habiter là. Pour rien au monde je changerai de cité. A la télé ils disent que dans les cités il n’y a que de la violence, les trafics de drogue et plein d’autres trucs alors que pratiquement toutes les personnes politiques qui disent ça n’y ont jamais vécu.

 

Adil, 15 ans, lycéen, Livry-Gargan

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