Confinement : j’ai pris le relai de mes parents
Cela fait maintenant un an que le Covid est entré dans ma vie. En mars 2020, Macron annonçait le premier confinement mais à cette époque j’étais encore très loin de m’imaginer tout ce qui arriverait par la suite.
Je me souviens avoir été tout d’abord ravie du fait de la fermeture des écoles. Je me disais que c’était une bonne chose, que j’allais pouvoir me reposer, regarder des séries, profiter de ma famille… Mais, tout ne s’est pas exactement déroulé comme je l’imaginais.
Tous dans la même maison, mais personne ne se croise
Très vite, des tensions se sont fait sentir dans toute la maison. Il y avait une pression ambiante dans l’air. Mon père stressait, à la fois, à cause du Coronavirus et à la fois, par peur de faire faillite. Car étant commerçant il était contraint de fermer sa boutique et son stress se répercutait sur tous les membres de la famille.
Ma mère, quant à elle, était en télé-travail. Moi qui pensais que ce confinement me permettrait de passer plus de temps avec elle, qui en temps normal travaillait déjà beaucoup, je me trompais complètement ! En effet, je ne la voyais plus. Étant directrice des ressources humaines, l’annonce du confinement avait totalement bouleversé l’équilibre de l’entreprise dans laquelle elle travaillait, lui donnant énormément de fil à retordre, et la surchargeant de travail.
Elle passait ses journées enfermée dans sa chambre en faisant des journées de travail qui commençaient à 8 heures le matin, et se terminaient entre 22 h 30 et 23 heures le soir. Elle ne prenait quasiment pas le temps de manger. Toute cette période de négligence lui a coûté cher puisque par la suite elle est tombée en dépression.
Quant à moi, j’avais l’impression de vivre hors du temps, j’étais complètement décalée, je me couchais vers 5 heures du matin et commençais mes journées vers 14 heures. J’avais beaucoup de mal à suivre les cours à distance. J’avais l’impression de travailler sans arrêt mais de ne rien apprendre. J’avais énormément de mal à me concentrer et je vivais très mal le fait de ne plus voir mes amis, d’autant plus qu’il faisait un temps magnifique dehors. Je pense que cela a été ma plus grande frustration.
Mon confinement en un mot : les « cris »
En plus, de toute cette charge de travail et ces tensions déjà présentes, j’essayais d’aider au maximum mes parents, afin de leur enlever quelques poids des épaules. J’essayais de m’occuper de mon petit frère et ma petite soeur, les aider pour leurs devoirs, les occuper, leur faire à manger… Mais le fait qu’ils ne sortaient pas et ne se dépensaient pas autant qu’en temps normal n’arrangeait pas les choses.
Au contraire, ils ne faisaient que de se disputer, de crier, de se vexer pour un rien, ce qui me rendait la tâche beaucoup plus compliquée. Je pense que si je devais donner un mot pour décrire mon confinement, ce serait le mot « cris ». En effet, j’entendais constamment des cris et des chamailleries dans mes oreilles, même pendant les moments où j’essayais de me concentrer pour travailler. Il y a tellement de fois où j’aurais voulu partir de cette maison et ne plus revenir !
Nous étions donc tous les cinq, 24 heures /24 heures dans notre appartement d’environ 120 m², dans le 3e arrondissement de Paris. Même si notre appartement reste grand et que nous sommes assez privilégiés, le fait que nous n’ayons que deux chambres pour trois à partager avec mon frère et ma sœur renforçait l’impression que j’avais de ne plus me sentir chez moi.
Je partageais donc ma chambre avec ma petite sœur et j’avais vraiment le sentiment de ne plus avoir d’intimité, d’espace pour respirer tranquillement. Même si ce fut très compliqué pour moi, je n’ose pas imaginer les situations des familles nombreuses vivant dans de tout petits appartements dans des quartiers plus défavorisés.
Un fort sentiment de frustration
Depuis mon entrée en seconde, le Covid continue d’avoir des répercussions sur ma vie. Nous avons repris une certaine stabilité au sein de notre famille, chacun a repris son rôle. Aujourd’hui, ma mère recommence tout juste à travailler, tandis que mon père reste toujours enfermé dans cette sorte de boucle infernale où il est encore obligé de fermer sa boutique.
Même si la situation actuelle se présente beaucoup mieux que pendant le confinement de mars dernier, j’ai quand même l’impression de passer à côté de ma jeunesse. D’après tous les témoignages que j’entends, la seconde est censée être « la meilleure année de ma vie » mais tout ce que je ressens, c’est le sentiment d’être constamment frustrée de ne pas pouvoir faire ce que je veux, sortir à ma guise… Et le fait que chaque parent éduque différemment ses enfants, avec des degrés de tolérance différents pour les sorties et soirées en période de virus, contribue à alimenter cette frustration.
Alors même si d’un certain coté je comprends les décisions de mes parents qui ne plaisantent vraiment pas avec le Covid, je ne peux m’empêcher de me sentir « coupée du monde » quand je vois tous ces jeunes qui s’amusent et qui l’exposent sur les réseaux sociaux. Parfois en me réveillant le dimanche matin, il m’arrive que mon fil d’actualité et mes stories sur Instagram soient remplies de vidéos de jeunes en train de danser, de s’amuser et j’avoue qu’il m’arrive de les envier.
Malgré que le Covid ait apporté beaucoup plus de mal que de bien, j’ai pu me rendre compte que la vie est précieuse et que tout peut basculer d’un moment à un autre sans que l’on ne s’y attende et donc qu’il faut profiter de l’instant présent.
Marie, 15 ans, lycéenne, Paris