Theo G. 14/12/2021

De Riquewihr à Buffalo, mon voyage pour m’accepter

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Théo s'est découvert et s'est assumé aux États-Unis grâce à la différence des cultures françaises et américaines.

J’ai grandi à Riquewihr, un village médiéval viticole. Je suis fils de vigneron, ma famille fait du vin bio. J’ai toujours eu un attachement pour la nature, les vignes et les villages, ma campagne alsacienne. Je suis allé au lycée à Colmar, et pour moi à l’époque, c’était une ville plutôt grande. Avec sa propre statue de la Liberté ! Et le jour où j’ai visité Strasbourg, là pour moi c’était comme une capitale, avec son vieux centre-ville médiéval et sa cathédrale.

Mais après mon bac, j’ai pu partir aux États-Unis comme garçon au pair dans une famille américaine super sympa et aisée, aux origines irlandaises. Je suis arrivé à Buffalo. C’est une ville moyenne aux États-Unis, mais pour moi c’était une énorme métropole avec ses buildings, ses gratte-ciel… Ça a été le choc culturel, la folie des grandeurs à l’américaine !

Le choc des cultures

Une fois, la mère de la famille (une blonde hyper cool) m’a demandé de l’accompagner en ville pour chercher sa fille au lycée. Elle conduisait et j’étais passager dans sa nouvelle voiture dont je me rappelle plus la marque, une décapotable rouge et sport. On est allés vers le centre ville en prenant l’autoroute aérien, le « skyway » de Buffalo. On avait le soleil étouffant d’août sur la tête, le vent dans nos cheveux qui nous rafraichissait, on sentait l’odeur des céréales de l’usine Cheerios située à la périphérie de la ville, nos lunettes de soleil sur le nez, les voitures à 100km/h autour de nous et la radio « Wave 80 » qui diffusait « You Spin Me Around » de « Dead or Alive », avec comme décor la ville en fond avec les gratte-ciel de Buffalo. Je me suis dit alors « Waouh,  comme c’est stylé » ! Je me croyais dans un film américain des années 80.

Les Américains n’ont pas les mêmes préoccupations, le même rythme de vie que nous. La différence de culture était perturbante. On a beau tout connaître de la culture américaine, la voir en vrai et vivre dedans c’est pas la même. Moi qui me sentais différent même en France, j’ai commencé à aimer cette différence. Être homo c’est déjà compliqué, et moi en plus j’aime les mecs plus vieux, barbus, poilus et bien en chair, alors que les autres aiment en général les mecs musclés, rasés, bien habillés, jeunes et propres sur eux. Avant, j’assumais jamais mes préférences, à chaque fois c’était comme un deuxième coming out.

C’est là-bas que je me suis découvert

En parlant une langue étrangère, on a l’impression d’être quelqu’un d’autre. Du coup, à Buffalo, j’ai profité de cette impression pour m’ouvrir, sortir de ma bulle et profiter d’être « seul » à l’autre bout du monde pour faire ce que je voulais. Le côté puritain des Américains me paraissait gênant, mais au final je connaissais personne là-bas… Donc je m’en fichais, c’était une vraie libération. Sortir, discuter avec des mecs, découvrir mes préférences et mes envies, toutes ces rencontres m’ont aidé à me découvrir. Des rencontres que j’aurais jamais pu faire avant parce que j’assumais pas, et parce qu’au fin fond de l’Alsace c’est compliqué de rencontrer des homos. C’est aussi une épreuve pour garder de la discrétion. Mais à partir de là, c’était : « Ce voyage il est pour moi, je fais ce que je veux, les autres ont pas à décider à ma place ».

A force de m’adapter à cette culture différente de la mienne, je suis devenu de plus en plus à l’aise. Je m’acceptais et je m’affirmais de plus en plus.

Il y aura un avant/après

Un jour, je suis allé à New-York City … Même Buffalo avait l’air d’une bourgade à côté, ses énormes gratte-ciel, le « One World Trade Center » et la « vraie » statue de la Liberté ! L’authentique ! Tellement plus énorme que dans ma petite ville de Colmar.

En reprenant l’avion sur le retour, je me suis fait une promesse ; le Théo qui a pris l’avion vers les États-Unis ne sera pas le même que celui qui revient. Je vais pas mettre de côté tout ce que j’ai découvert, je peux être moi-même.

Aujourd’hui, j’assume mes préférences, mes défauts et qualités. Je me fous du regard des autres tout en restant ouvert d’esprit et à l’écoute. Je m’adapte, comme j’ai appris à le faire pendant mon voyage dans ce pays génial.

Théo, 23 ans, en service civique, Riquewihr

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