Harcelée au collège par un groupe de filles
J’avais 11 ans quand je me suis faite harcelée. J’étais une fille ordinaire dans un collège ordinaire d’une ville ordinaire. J’ai fait mes premiers pas au collège Guilleminot à Dunkerque. Il est réputé pour être un collège de riches dans la ville. J’étais très contente d’y entrer, pour moi, le collège était synonyme de découverte d’un nouveau monde. J’étais inscrite en section volley-ball, en plus des cours normaux, j’avais des séances de sport pendant la pause du midi.
Sans que je ne sache vraiment pourquoi, dès le début de l’année, l’ambiance était lourde entre moi et des filles de ma classe. Elles étaient dans mon groupe de volley-ball. Quand on fait du sport, il y a l’esprit de compétition, ces collégiennes me regardaient mal et ne me parlaient pas. Ensuite, quand je passais à côté d’elles, j’entendais « elle est nulle », « elle est grosse », « elle n’a rien à faire ici », « elle devrait partir d’ici ». Ce groupe pensait faire partie des gens populaires. Des élèves cools qui ne parlent qu’entre eux, qui se réunissent au milieu de la cour pour attirer l’attention et qui prennent les autres pour de la merde.
Une proie facile
Elles s’en sont prises à moi parce que j’étais un peu isolée dans la classe. Je ne me sentais pas toujours à l’aise, parfois même en décalage. Par exemple, je ne rigolais pas toujours aux blagues et je m’asseyais au fond de la salle.
Quand j’étais devant elle, je ne disais rien. Harcelée, je fermais ma gueule parce qu’elles étaient cinq à six contre moi. Elles étaient plus costaudes que moi et elles étaient toujours ensemble. Elles essayaient de me contacter sur les réseaux sociaux, mais je les bloquais. Dans la rue, quand je voyais qu’elles étaient en train de me suivre, je faisais un grand détour avant de rentrer chez moi. Au bout d’un moment, elles en avaient marre de me suivre et elles ont lâché l’affaire.
Mon harcèlement ne s’est pas arrêté là : d’autres filles de la classe se sont fait passer pour mes amies. Elles me disaient des choses gentilles pour me faire parler et avoir des infos sur ma vie. Après, elles allaient tout répéter aux autres et parlaient dans mon dos. Elles essayaient de monter le reste de la classe contre moi. Ça n’a pas marché, des personnes sont restés pour me soutenir. Je pense qu’elles se sont acharnées parce que je n’étais pas comme elles, ni fine, ni « cool ». En 5ème, j’ai vu clair dans leur jeu, je les ai vu parler avec mes harceleuses et j’ai entendu leur conversation.
Harcelée, j’étais comme vidée
À partir de là, j’ai commencé à me rebeller. Je répondais à cette bande de filles pour me défendre. Puis, à la maison ça a commencé à déborder : je ne voyais plus personne, je parlais mal à mes parents. Je ne sortais de ma chambre que pour manger. Le reste du temps, j’étais sur mon lit en pleurs et j’écoutais de la musique triste, comme « Klem Schen » ou « Suzuya ».
J’avais des crises d’angoisse avant d’aller à l’école. Des fois, je faisais semblant d’être malade. J’inventais des excuses : mal de tête, maux de ventre, je faisais semblant de vomir. Je me mutilais avec un briquet ou une lame, au niveau des cuisses et des avant-bras, pour me sentir soulagée. Harcelée, j’étais comme vidée. J’ai souvent pensé à m’ôter la vie. Les profs ne disaient et ne voyaient rien. J’étais en échec scolaire : je suis passée d’un 12-13 de moyenne début 6ème à 3-4 le trimestre suivant. Mes parents s’inquiétaient, mais ne savaient pas quoi faire.
Finalement, mon harcèlement s’est arrêté à la fin de l’année de 5ème. Ma prof principale avait convoqué mes parents pour leur parler de mes notes, c’est là que je leur ai tout expliqué. J’ai réussi à parler de mon harcèlement. Les filles ont été convoquées à leur tour et ont tout avoué. C’est de cette manière que mes deux années de souffrance se sont terminée. Malgré ça, trois jours après la rentrée de 4ème, j’ai changé d’école. Je ne me sentais plus de continuer dans ce collège, j’avais besoin de changer d’air.
Éviter que ça ne recommence
Depuis cette histoire, je me méfie beaucoup des filles. Déjà en primaire, je parlais plus avec les garçons qu’avec les filles. Mon harcèlement n’a fait que renforcer ce sentiment. Ils n’ont pas la même mentalité : les garçons ne font pas d’histoires comme les filles qui font des manières pour tout et n’importe quoi. Les garçons, ne sont pas matures, ils ne prennent rien au sérieux. Avoir été harcelée, a changé mon caractère, maintenant, je réponds aux provocations. Je ne me laisse plus faire pour éviter que ça recommence et dès que je ne sens pas une personne, je coupe court à la relation.
Depuis cette histoire, je passe beaucoup plus de temps avec ma famille et quand je rencontre un gros problème, je n’hésite pas à leur en parler. Si j’avais un conseil à donner aux personnes qui se font harceler, ce serait d’en parler. Même si vous n’êtes pas sûr d’être harcelé, parlez-en !
Jorina, lycéenne, 15 ans, Saint-Pol-sur-mer
Je suis touchée par ce récit. Jorina est une jeune fille pétillante et courageuse.
C’est un témoignage, qui je l’espère aidera d’autres jeunes à libérer leur parole.
Merci Jorina