Eva B. 17/03/2022

Harcèlement : je me retrouve dans la même classe que mon bourreau

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En primaire, Eva a été victime de harcèlement par une camarade. Malgré les multiples demandes de sa mère, elle se retrouve dans sa classe, décidée à ne plus se laisser faire.

Toute cette histoire de harcèlement a commencé quand j’avais 10 ans, j’étais en CM2. Au début de l’année, une fille de ma classe, Nassima, a commencé à me critiquer et à voler mes affaires. Au début, je pensais que c’était un jeu, genre on se taquinait. Donc, je n’y ai pas prêté plus attention que ça et j’ai continué à faire ma vie. Sauf que ce « jeu » ne s’est pas du tout arrêté, il s’est même amplifié. Flippée, je ne calculais pas.

Un jour, c’est ma trousse de crayons de couleurs que Nassima me vole. Je rentre chez moi et je raconte à ma mère que je l’ai perdue. Elle me crie dessus et me reproche de ne pas prendre soin de mes affaires. Ce n’était pas vraiment la réaction que j’attendais. Je pars m’isoler dans ma chambre en pleurant. 

La vérité sur mon harcèlement 

On pourrait dire que ce n’était qu’une simple et ridicule histoire de trousse volée, et que j’aurais pu passer à autre chose. Mais je n’y arrivais pas. J’ai très mal vécu cette histoire. Je n’arrivais plus à dormir, je faisais des cauchemars et des crises d’angoisse, je voyais le médecin pour mes insomnies. Dans mes cauchemars, je me faisais frapper par Nassima et je mourais… C’était que des choses horribles.

Deux semaines plus tard, en pleine partie de basket avec la classe, Nassima me pousse. Je tombe, elle se moque de moi. J’étais en pleurs, je me sentais humiliée et faible. Le lendemain, ma mère reçoit un appel de la mère de Nassima. Elle expliquait que je harcelais sa fille et exigeait un rendez-vous avec ma mère, le directeur de l’école et la maîtresse. Étonnée, ma mère savait très bien que ce n’était pas mon genre. 

J’étais stressée le jour de cette convocation, j’avais peur puisque ça faisait déjà plusieurs mois que ça durait. Nassima a raconté que je la tabassais à chaque récré et que personne ne lui venait en aide. Je me suis effondrée. J’ai craqué et j’ai enfin avoué que c’était moi qui subissait du harcèlement, que je me faisais frapper et qu’on volait mes affaires depuis des mois. Les coups avaient commencé avant l’histoire de la trousse, c’était devenu encore plus régulier et plus violent après. Ma mère était choquée. En rentrant à la maison, elle m’a réconfortée et m’a dit que ça allait s’arranger. 

Maintenant, je ne me laisserai plus faire 

Le harcèlement s’est arrêté après ce rendez-vous, mais je n’arrivais plus à aller à l’école sans avoir la boule au ventre. Ce sentiment m’a poursuivi jusqu’en sixième. J’avais perdu toute confiance en moi. Même au sport, dans mon club de judo, j’avais peur que tout le monde me pense faible, alors j’ai arrêté les compétitions. Je me suis mise à manger beaucoup, je n’aimais plus mon corps.

À mon entrée au collège, ma mère a écrit une lettre au directeur. Elle lui a expliqué la situation, et lui a demandé de ne pas me mettre dans la même classe que Nassima. Elle a envoyé ce courrier quand j’étais en sixième, l’école a respecté cette demande. Ma mère a envoyé cette lettre jusqu’à ma quatrième, pour que je ne sois plus confrontée à Nassima. Mais pour la rentrée de troisième, comme on pensait que le collège avait bien compris le message, ma mère n’a pas envoyé ce fameux papier. Résultat, je me suis retrouvée dans la même classe que Nassima. Je ne l’ai pas calculée et il ne s’est rien passé.

Aujourd’hui, je suis en seconde, dans un nouvel établissement, et je suis dans la même classe qu’elle. Cette fois, si elle me cherche, je n’hésiterais pas à agir face au harcèlement. J’ai même l’accord de mes parents. Je sais que j’ai l’air plutôt méchante comme ça quand on me regarde, alors que non. Vu ma façon de m’habiller, on peut me prendre pour un garçon manqué. Je veux juste que personne ne vienne m’embêter.

Je ne me laisserai plus faire. Maintenant, je ne cherche plus à comprendre si quelqu’un m’embête, je le frappe direct, je n’ai plus peur de rien. La bagarre ne me fait pas peur et je sais que ce n’est pas la seule solution : je peux en parler avec mes professeurs s’il le faut. Mais s’il faut se battre, je le ferai.

Eva, lycéenne, 15 ans, Grande-Synthe

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